Jawad Kerdoudi : “Maroc-France : L’avenir des relations bilatérales après la réélection de Macron”

Rédigé par Anass MACHLOUKH le Lundi 25 Avril 2022

 

Après la réélection d’Emmanuel Marcon à l’Elysée, les relations franco-marocaines sont face au défi du renouveau après cinq ans de vicissitudes. Détails.

 

 

Maroc-France : L’avenir des relations bilatérales après la réélection de Macron

Comme prévu par les sondages, le président français Emmanuel Macron a pu se faire réélire. Le locataire de l’Elysée a pu s’imposer face à sa rivale du Rassemblement National (RN), Marine Le Pen, au second tour de l’élection présidentielle en obtenant 58,5% des suffrages. Le candidat de la République en Marche a pu ainsi succéder à lui-même, fait inédit depuis la fin du mandat de Jacques Chirac étant que ni Nicolas Sarkozy ni François Hollande n’ont pu faire de même. Au Maroc, pays qui abrite la plus grande communauté française en Afrique, les ressortissants français ont voté massivement pour le président sortant, en lui accordant 87,44% des voix.

En obtenant un nouveau mandat à l’Elysée, le président français est confronté à une mission de taille sur le plan diplomatique : rétablir le prestige de la France sur la scène internationale d’autant que son quinquennat précédent a été émaillé de revers, dont la crise avec le Mali et le retrait des troupes françaises de ce pays historiquement sous influence française est l’exemple le plus marquant.

Sur l’échiquier africain, le Maroc occupe une place importante aux yeux de la France qui considère le Royaume comme un « pays ami ». Une appellation qui date de l’époque de l’indépendance et qui demeure d’actualité malgré les crises qui ont pu surgir. Les spéculations abondent de toutes parts pour tenter d’entrevoir ce à quoi ressembleront les relations entre Rabat et Paris durant le second mandat d’Emmanuel Macron, surtout que les relations bilatérales n’ont pas été si prospères récemment. Les malentendus ont été nombreux.

Flashback : le président français n’a pas visité le Maroc depuis le 15 novembre 2018, date de l’inauguration du TGV Tanger-Kénitra où il a accompagné SM le Roi. Une autre visite a été prévue en juin 2019 pour l’inauguration de l’Usine PSA à Kénitra mais elle a fini par être annulée. Malgré les justifications d’agenda avancées par l’Elysée, de nombreux commentateurs ont estimé que cette annulation n’a pas été fortuite et serait due à des divergences sur plusieurs sujets dont celui de la ligne TGV Agadir-Marrakech.

Depuis lors, le dialogue entre Rabat et Paris est moins chaleureux, sachant que des visites ont été effectuées par les ministres de l’Intérieur, de la Justice et des Affaires étrangères au Maroc mais pour régler des problèmes qui persistent toujours. La question migratoire demeure l’un des points épineux, la décision de Paris de réduire de moitié les visas accordés aux Marocains a été accueillie avec agacement par les autorités marocaines qui, pourtant, coopèrent de façon proactive dans le dossier des mineurs isolés. Aussi, la crise du Covid-19, la guerre en Ukraine ont-elles éloigné les deux pays l’un de l’autre, laissant le vide s’installer entre eux.

Macron plutôt que Le Pen ?

L’élection de Macron demeure préférable aux yeux du Maroc, estime Jawad Kerdoudi, président de l’Institut marocain des Relations internationales qui estime que la candidate du RN, Marine Le Pen, aurait été plus dure sur la question migratoire si elle était élue. Notre interlocuteur juge que la France est un appui précieux du Maroc dans l’affaire du Sahara. « Dans les cinq prochaines années, le Maroc doit profiter de la présidence française de l’Union Européenne pour obtenir une position plus audacieuse de l’UE sur la question du Sahara », a-t-il précisé.

En plus de la question migratoire, l’affaire Pegasus n’a pas été de nature à réchauffer les relations. Le gouvernement français n’a pas réagi aux accusations mensongères d’espionnage émises contre le Maroc, tellement grotesques comme de hautes personnalités françaises le reconnaissent.

Pour autant, l’attitude de la Justice française, qui a jugé irrecevables les poursuites engagées par le Maroc contre les médias français ayant relayé ces accusations, a interloqué l’opinion publique marocaine. À quoi s’ajoute une question beaucoup plus complexe : l’Afrique de l’Ouest où la présence économique de plus en plus importante du Maroc est vue avec méfiance en France qui préfère ne pas avoir un concurrent supplémentaire dans sa zone d’influence traditionnelle.

La diplomatie des coulisses en ordre de bataille

En dépit de tous les soucis qui puissent subsister, les relations entre Paris et Rabat sont très enracinées. La France est le deuxième partenaire commercial et le premier investisseur étranger au Maroc avec un réseau de 1000 entreprises implantées. Raison pour laquelle les deux pays sont condamnés à coopérer.

Comme ses anciens soutiens traditionnels au sein de la classe politique française (Jean Louis Borloo, Dominique De Villepin, Jack Lang…) ne sont plus politiquement actifs, le Maroc mise sur le réseautage pour réactiver ses réseaux à Paris. Mission qui incombe au nouvel Ambassadeur du Royaume, Mohammed Benchaâboun. Ce dernier multiplie les rencontres avec le groupe d’amitié Maroc-France au Sénat, dont le président, Christian Cambon, est l’uns des fervents défenseurs de l’amitié franco-marocaine.

Lire l’article original sur le site de L’Opinion.