«Le Maroc constitue une plateforme africaine idéale pour les investisseurs chinois» Entretien avec Leung Chun-Ying

18.10.2019

Mohamed Amine Hafidi, Le Matin

Leung Chun-Ying : «Notre croissance oscille autour de 6%, ce qui est honorable». Ph. Saouri

 

En marge de la World Policy Conference, tenue du 12 au 14 octobre à Marrakech, Le Matin a rencontré Leung Chun-Ying, ex-chef de l’Exécutif de Hong Kong. Cet invité de marque est revenu sur le rôle que peut jouer le Maroc dans le projet de «La nouvelle Route de la Soie», le ralentissement de la croissance chinoise, ainsi que les protestations à Hong Kong, qui «tendent à s’amenuiser».

Le Matin : Quel rôle peut jouer le Maroc dans le projet de «La nouvelle Route de la Soie», notamment en tant que porte d’entrée en Afrique ?

Leung Chun-Ying : La réussite de tout partenariat économique durable dépend, en premier lieu, des relations humaines et culturelles entre les pays en question. Sur ce volet, j’estime que le Maroc a initié d’importantes actions. Le meilleur exemple est sans conteste la décision du Maroc d’annuler les visas pour les citoyens chinois. Une décision qui a été saluée et très agréablement accueillie par nos compatriotes. Elle s’est traduite par l’augmentation considérable du nombre de touristes chinois ayant visité le Maroc.

Le contact humain est très important et est souvent le précurseur de très bonnes initiatives dans le futur. Il contribue à l’émergence de plusieurs opportunités comme l’afflux d’investissements chinois au Maroc. Naturellement, le Maroc pourrait se positionner comme plateforme idéale pour les investisseurs chinois désireux de prospecter et investir en Afrique de l’Ouest notamment. Cependant, les deux pays devront créer et renforcer les vols directs. Le lancement, début 2020, d’une nouvelle ligne Casablanca-Pékin est un bon début.

La croissance de l’économie chinoise a subi un ralentissement ces derniers mois. Est-ce principalement dû à la guerre commerciale avec les États-Unis ?

La guerre commerciale est l’une des raisons derrière le ralentissement de la croissance de l’économie chinoise, mais permettez-moi de vous rappeler que la plupart des grandes économies mondiales ont subi un ralentissement de leur croissance. Ceci étant dit, il faut savoir que notre croissance oscille autour de 6%, ce qui est honorable. Je ne suis pas très inquiet par rapport à la situation économique en Chine, mais plutôt par rapport à l’ordre économique mondial actuel et les bouleversements internationaux que traverse le monde.

En tant qu’ex-chef de l’Exécutif de Hong Kong entre 2012 et 2017, vous avez dû gérer l’une des pires crises qu’ait pu connaître cette zone, à savoir le mouvement des Parapluies. Où en est la situation actuellement ?

Aujourd’hui, la violence des protestations et son intensité sont en train de diminuer, mais cela ne nous empêche pas de rester vigilants et de devoir gérer cette crise avec une grande prudence. L’une des demandes des protestataires, et qui est en partie derrière ce mouvement, est la volonté de recourir à un suffrage universel pour l’élection du chef de l’Exécutif de la ville, ce qui est contraire à notre Loi fondamentale, approuvée par les Hongkongais il y a plusieurs années. Je pense que le problème n’est pas purement politique, mais il s’agit plutôt de demandes et de revendications contre cette loi.

Une révision de la Loi fondamentale est-elle envisageable ?

Vous devez savoir que Hong Kong dispose d’un niveau d’autonomie très élevé. Le chef de l’Exécutif a plus de pouvoir que les maires des villes de pays dits démocratiques et développés. J’ai été chef de l’Exécutif de Hong Kong et je peux vous dire que j’avais plus de pouvoirs et prérogatives que les maires de Londres, New York, Tokyo et Paris.

Quel a été l’impact économique de ces protestations ?

Il y a eu effectivement un impact sur l’économie de Hong Kong. Toutefois, j’ai l’intime conviction que nous allons dépasser ces problèmes et que Hong Kong retrouvera son dynamisme. Nous avons, par le passé, traversé des crises économiques et politiques dues à des conjonctures internationales défavorables mais aussi à cause de problèmes internes. Nous avons, à chaque fois, pu surmonter ces difficultés.

Avez-vous évalué l’impact économique de cette crise ?

Ce que je peux vous dire, c’est que l’impact sera significatif. Je ne veux pas m’amuser à prédire. Je préfère rester optimiste, tout en étant proactif. Nous devons agir avec justesse et pour le bien commun afin de surmonter cette crise et remettre l’économie de Hong Kong sur les rails

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