Thèmes 2012

Séance plénière 1 : «Gouvernance économique mondiale»

La mondialisation a été initialement perçue comme une transformation irréversible vers un monde uniforme et plat, mais prospère. C’était comme si, du moins d’un point de vue économique, les prétendus « obstacles » des identités nationales ou régionales devaient être abolis. Comme si le monde entier était destiné à devenir un marché unique, régulé par des organisations internationales et dirigé par des technocrates supposés compétents. Depuis la crise financière et économique des cinq dernières années, nous observons des tendances bien différentes : davantage d’agressivité dans l’affirmation des identités collectives, une demande accrue de renationalisation des politiques économiques, des pressions protectionnistes, etc. Cette évolution est perceptible, même dans le cadre très intégré de l’Union européenne. L’idée que la mondialisation est irréversible ne peut plus être considérée comme juste. L’objet de cette session est d’évaluer la stabilité du système économique mondial et de faire des recommandations sur la façon de la renforcer, afin de préserver les bénéfices d’un monde ouvert, tout en répondant aux revendications politiques de préservation des identités collectives et de justice sociale.

Séance plénière 2 : «G2 ?»

Même s’il est probable que les États-Unis vont rester la seule superpuissance dans l’avenir prévisible, la Chine est devenue un challenger crédible. Elle est maintenant la deuxième économie du monde et, sauf accident économique ou politique, elle pourrait passer au premier rang dans les prochaines décennies. Non seulement elle se dote de tous les attributs de la puissance, mais elle se comporte de plus en plus comme une puissance, au sens classique du terme, du moins vis-à-vis de ses voisins. Les deux pays sont assez allergiques au multilatéralisme, mais alors que les États-Unis ont développé un sens du leadership au cours du XXe siècle, la Chine n’a pas eu une telle expérience historique. Ils se font une rude concurrence économique, mais aussi politique, en particulier, mais pas exclusivement, en Asie. Se dirigent-ils vers une confrontation ? Ou, au contraire, pourrait-il y avoir une sorte de « détente, entente, et coopération», pour reprendre l’ancien vocabulaire de la guerre froide – c’est à dire une sorte de G2 ? Comment un tel G2 pourrait-il être acceptable pour le reste du monde ? Quelles forces décideront de l’option qui l’emportera ?

Séance plénière 3

Le président Mario Monti nous présentera sa vision de la gouvernance mondiale.

Session plénière 4 : « l’avenir de l’UE »

L’Union européenne est, au niveau régional, un laboratoire unique pour la gouvernance mondiale. Pourtant, au cours des dernières années, elle a subi deux déconvenues majeures : la crise de la zone euro et une crise d’identité. En dépit d’un certain nombre de mesures importantes, la première crise n’est pas encore terminée. Si elle survit, la zone euro devrait se renforcer et constituer le cœur naturel d’une Union restaurée. Combien de temps doit-on accorder au processus de sauvetage ? Pourrait-il échouer, et l’UE pourrait-elle résister à un tel choc ? La seconde crise est illustrée par la tentation britannique de s’éloigner de l’UE et par des mouvements nationalistes qui se renforcent, en particulier, mais non exclusivement, dans certains pays récemment devenus membres. L’esprit des pères fondateurs a disparu, et l’UE semble bien avoir perdu son sens d’identité. Ses institutions sont largement perçues comme non démocratiques et inefficaces. Pourtant, sa contribution extraordinaire à la paix et à la prospérité est reconnue par beaucoup dans le monde entier. Son attribution du prix Nobel de la paix, cette année, est un symbole significatif à cet égard. Comment les membres de l’UE pourront-ils se mettre d’accord sur une vision commune de leur avenir commun? Un tel accord doit-il constituer un préalable à un élargissement futur ?

Session plénière 5 : « Bonne gouvernance et réussite économique »

Le concept de gouvernance est pertinent à différents niveaux. Il se réfère à l’art et la science de fixer et d’atteindre des objectifs dans des systèmes complexes. Une réussite économique durable suppose une «bonne gouvernance» à au moins trois niveaux : (1) au niveau de l’entreprise, ce qui signifie une bonne gestion ; (2) au niveau national, ce qui signifie de bonnes politiques publiques pour assurer un climat qui favorise la croissance et l’emploi dans le court, moyen et long terme, tout en restant socialement acceptable et en préservant l’environnement ; (3) au niveau international, ce qui signifie optimiser la coordination entre les politiques nationales, gérer les externalités et réduire les risques systémiques. Le troisième niveau est crucial si la mondialisation doit survivre. Le but de cette session est d’explorer les relations entre les trois niveaux, et donc les liens entre les affaires et la politique. Comment devrait-on définir la responsabilité sociale des entreprises dans ce contexte ? La diversité des cultures et des valeurs est-elle un atout ou un obstacle ? Les médias ont-ils un rôle spécifique à jouer ?

Session plénière 6 : «L’avenir du Moyen-Orient»

Quelles qu’en soient les causes immédiates, l’origine fondamentale du «printemps arabe» est la non-viabilité de l’ordre qui a émergé dans la région MOAN (Moyen-Orient – Afrique du Nord) à la suite de la décolonisation et dans le contexte de la guerre froide. Le «printemps arabe» a libéré des forces centrifuges puissantes, qui sont maintenant à l’œuvre entre et dans les pays de la région. L’émergence d’un nouvel ordre nécessitera sans doute au moins une génération. Des puissances extérieures vont sûrement exercer une influence sur le processus, du fait que leurs grands intérêts économiques et sécuritaires sont impliqués. En outre, il existe des signes d’un nouveau type de rivalité Est-Ouest dans la région. Ainsi, les membres permanents du Conseil de sécurité sont-ils ouvertement divisés sur la Syrie. Quoi qu’il en soit, le sort de la région MOAN sera probablement déterminé principalement par des facteurs internes, parmi lesquels la culture et l’idéologie joueront un rôle essentiel. Le but de cette session est d’examiner l’avenir du Moyen-Orient au sens large, essentiellement du point de vue de la région elle-même. Quels seront les risques et les opportunités, dans la région et aussi au-delà, dans l’ère post-printemps arabe ?

Séance plénière 7 : «L’Afrique»

L’Afrique n’est plus perçue comme un continent perdu. Elle bénéficie d’une croissance durable (5% en moyenne sur la dernière décennie), avec des ressources naturelles et humaines importantes (bonus démographique). Une immense classe moyenne (300 millions de personnes) est en train d’émerger, en même temps que l’urbanisation. À long terme, la bonne gouvernance et l’éducation – deux facteurs connexes – seront les principaux déterminants de la réussite économique et sociale. Pour le moment, la gouvernance fait quelques progrès, bien que trop souvent des régimes présidentiels forts continuent de coexister avec des États faibles. Une telle situation alimente à la fois la grande et la petite corruption. La fragilité de nombreux États est également une cause majeure de conflits locaux ou régionaux. Il faut reconnaître, cependant, que le nombre et la létalité des conflits en Afrique sont moindres que durant la guerre froide. Dans le même temps, leurs effets externes sont devenus plus importants dans certains cas (Mali). Le but de cette session est d’examiner l’état de l’Afrique dans le contexte de la mondialisation et de la gouvernance mondiale, tant du point de vue politique qu’économique.

Séance plénière 8 : «Débat général»

Comme dans les éditions précédentes de la WPC, le débat général portera sur les enjeux actuels, en relation avec la gouvernance mondiale. Ce qui revêt une importance particulière cette année, c’est la perspective d’un leadership stable, à moyen terme, dans trois grands pays : les États-Unis, la Chine et la Russie.

WORKSHOPS

Atelier «finance»

L’atelier « finance » examinera l’état des réformes de la réglementation financière lancées par la communauté internationale pour éviter une nouvelle crise financière mondiale.
Les problèmes suivants seront examinés en vue d’apporter des réponses à trois questions :

  • · Quels progrès ont été accomplis à ce jour ?
  • · Quelles sont les principales faiblesses qui subsistent du point de vue de la stabilité financière ?
  • · Quelles sont les voies appropriées pour corriger la situation dans une perspective à moyen terme ?
  1. Construire des banques solides

    Un premier point important est d’évaluer la mise en œuvre actuelle des décisions de Bâle III ; jusqu’à maintenant, seuls 8 des 22 pays membres du Comité de Bâle ont adopté l’ensemble de la réglementation de Bâle III.
    Il est essentiel d’adopter une législation appropriée le plus vite possible dans toutes les juridictions.
    Une autre question majeure est celle des risques systémiques et des risques moraux associés aux institutions financières d’importance systémique (IFIS). Pour mettre fin au concept de « trop gros pour faillir » il faut progresser dans un certain nombre de dimensions : les réformes des régimes nationaux de résolution ; les plans propres à chaque IFIS ; une surveillance plus soutenue et plus efficace ; des exigences de fonds propres au-dessus des normes minimales. Une attention particulière devrait également être accordée aux banques ayant une importance systémique au niveau national (D-SIB).

  2. La question des « shadow banking » et des non banques

    L’objectif de la communauté internationale est de s’assurer que ces formes de finance soient soumises à une surveillance et une régulation appropriées afin de prévenir une crise qui pourrait survenir en dehors du système bancaire réglementé.
    Les points suivants devront être particulièrement examinés : l’atténuation de l’effet d’entraînement entre les non banques et le système bancaire, la réduction de la vulnérabilité des marchés monétaires ; l’harmonisation des mesures d’incitation liées à la titrisation pour éviter des effets de levier excessifs dans le système financier ; la supervision vigilante des nouvelles activités de « shadow banking » issues des mutations du marché.

  3. Faire face à la procyclicité dans de nombreux aspects du fonctionnement des marchés financiers

    Le fonctionnement stable des marchés financiers repose non seulement sur des institutions financières solides, qu’il s’agisse de banques ou non, mais aussi sur une série de facteurs comme, par exemple, les règles comptables, les agences de notation de crédit, l’identification des personnes morales, l’infrastructure des marchés – notamment en ce qui concerne la réforme du marché des dérivés de gré à gré. La communauté internationale doit veiller à ce que nous fassions tout ce qui est possible pour réduire au minimum la tendance du système financier à générer endogènement des alternances d’emballements et d’effondrements et, ce faisant, pour renforcer la stabilité du système financier mondial.

  4. Prévention des risques systémiques et renforcement de la surveillance macroprudentielle

    Toutes les dispositions précédentes sont importantes pour minimiser les risques systémiques au niveau des économies prises individuellement, des régions comme la zone euro et l’Union européenne, et de l’économie mondiale dans son ensemble. Il est également nécessaire de faire le point sur les actions des nouvelles institutions créées spécifiquement pour prévenir des risques systémiques, des deux côtés de l’Atlantique, comme le « Conseil européen du risque systémique » (CERS) et le « Conseil de surveillance de la stabilité financière ».
    Parmi bien d’autres sujets, il est essentiel d’améliorer la gestion macroprudentielle et d’approfondir la compréhension des aspects endogènes de l’instabilité systémique de la finance mondiale ainsi que de la rapidité, devenue extrême, de la transmission des chocs, enfin de l’instabilité financière issue des déséquilibres macroéconomiques.

Atelier «Énergie et environnement»

La quête de l’énergie a toujours été un élément clé des relations internationales, aussi bien en temps de guerre qu’en temps de paix. La pérennité d’un monde ouvert n’est donc pas pensable sans une forme de gouvernance mondiale qui garantisse l’accès de tous les pays à différentes sources d’énergie et à des prix équitables. Avec les préoccupations croissantes concernant le changement climatique, cette nécessité fondamentale a pris une nouvelle dimension. Jusqu’à présent, la «communauté internationale» n’a pas réussi à parvenir à un consensus sur la façon de coopérer à cet égard. Cet atelier sera organisé en trois parties (la majorité du temps sera alloué à la partie III). La partie I donnera un aperçu de l’état actuel de la question de l’énergie, du point de vue politique, économique et environnemental. La partie II portera spécifiquement sur la question essentielle des incohérences dans les politiques énergétiques, au niveau mondial, mais aussi au niveau régional. Par exemple, l’Union européenne s’est révélée incapable jusqu’à présent de définir une politique énergétique commune, même si, historiquement, la communauté du charbon et de l’acier a été au cœur de sa fondation. La partie III se concentrera sur l’offre d’énergie en mettant l’accent sur les nouvelles sources dans le contexte du changement climatique. Cinq thèmes seront abordés : deux techniques (pétrole et gaz non conventionnels, et énergies renouvelables), un social et politique («l’acceptabilité»), un économique (coûts de l’énergie et compétitivité économique), et un international (la géopolitique de l’énergie). Les deux derniers thèmes nous conduiront à nous interroger sur la réalité de l’intégration économique et, plus généralement, sur la mondialisation.

Atelier «risques majeurs»

L’interdépendance croissante s’accompagne de risques croissants, et parfois imprévisibles. En effet, le nombre des relations non linéaires augmente, ce qui signifie une non proportionnalité entre les causes et les conséquences (ce qu’on nomme «l’effet papillon»). Dans un tel contexte, il arrive souvent que l’on ne puisse plus appliquer les méthodes statistiques classiques – plus ou moins basées sur la loi dite normale, ou loi de Gauss (courbe en cloche). Des catastrophes majeures sont susceptibles de se produire, alors que dans un contexte classique leur probabilité serait considérée comme négligeable. Ces phénomènes soulèvent des questions essentielles sur la prévention et le partage des risques, en particulier pour l’économie de l’assurance. L’atelier sera organisé en trois parties. La partie I abordera la question des risques majeurs du point de vue de la recherche. La partie II discutera de la myopie des États. En effet, historiquement parlant, les gouvernements se sont souvent révélés incapables de prévenir les catastrophes, même dans des contextes favorables lorsque les risques pouvaient être clairement identifiés, ce qui est typiquement le cas pour de nombreuses questions liées à la démographie. Comment est-il possible d’améliorer à long terme la prise de décision publique concernant des risques plus ou moins bien identifiés, sans tomber dans le piège de la pusillanimité, comme avec certaines interprétations du principe de précaution ? Y a-t-il une corrélation entre la prise de risque collective et les régimes politiques ? Est-ce que la notion de bien public mondial a encore un sens dans le contexte de risques majeurs ? La partie III traitera de trois exemples très différents : la cybersécurité, qui est maintenant largement reconnue comme un sujet explosif ; le vieillissement, avec ses potentiellement graves conséquences économiques et financières ; et la sécurité alimentaire, qui, au même titre que l’énergie, doit être considérée comme un élément clé de la gouvernance mondiale. Ce ne sont que des exemples. Beaucoup d’autres pourraient être choisis, comme les migrations climatiques, les pandémies ou la sécurité nucléaire. Il convient également de noter que dans les deux autres ateliers de cette édition de la WPC (en particulier l’atelier «Finances») on parlera également des risques majeurs.