World Policy Conference 2016 : Discours de Jean-Marc Ayrault, Ministre des Affaires étrangères et du Développement international, Doha

20.11.16

Discours de M. Jean-Marc Ayrault Ministre des Affaires étrangères et du Développement international France – Forum de Doha, 20 novembre 2016

Excellence,
Mesdames et Messieurs,

Je suis très heureux d’être aujourd’hui parmi vous, à Doha, et d’avoir l’occasion de vous faire part de mes réflexions sur les perspectives du Moyen-Orient, cette région qui concentre, aujourd’hui plus que jamais, la plupart des grands défis auxquels l’ensemble de la communauté internationale fait face.
Je rends hommage à l’Institut Français des Relations internationales pour l’organisation de cette World Policy Conference, qui est devenue en quelques années un rendez-vous important et un moment de promotion d’un monde de dialogue et d’échanges. J’exprime tout particulièrement ma gratitude à Thierry de Montbrial, son président.

Il y a maintenant presque un mois s’est éteint son Altesse Cheikh Khalifa bin Hamad Al-Thani, qui a tant contribué à l’amitié franco-qatarienne. Permettez-moi d’honorer sa mémoire et de vous dire que la France partage la tristesse du peuple qatarien.

Le Qatar et la France sont confrontés, comme la communauté internationale, à un monde incertain. 
Un monde incertain parce que, de plus en plus, les enjeux relèvent d’une logique planétaire où rien n’est possible sans l’action de tous. C’est particulièrement le cas pour la préservation de l’environnement.
Un monde incertain, parce que l’efficacité de chacun dépend de l’action collective : c’est l’interdépendance. Je pense à l’économie, au commerce international, aux enjeux de sécurité.
Un monde incertain, parce que la volonté de quelques Etats de s’affirmer sur la scène internationale ou de renouer avec l’expression d’une puissance passée remet en cause des équilibres qui avaient un peu vite été considérés comme acquis.
Un monde incertain, enfin, parce que soumis à la menace globale d’un terrorisme qui se joue des frontières et impose une guerre nouvelle, qui frappe nos Etats et nos sociétés en leur cœur, en combinant l’idéologie la plus rétrograde et les méthodes les plus barbares aux technologies les plus modernes.
La France, vous le savez, a été frappée à plusieurs reprises et encore le 14 juillet dernier, le jour de sa fête nationale, par des attentats meurtriers. Nous n’oublierons pas l’élan exceptionnel de solidarité venu du monde entier, les rassemblements populaires, les monuments illuminés aux couleurs du drapeau français – comme au Qatar –, les nombreux dirigeants exprimant leur solidarité. Mon peuple a été extrêmement sensible à ces témoignages et j’exprime ma gratitude, depuis Doha, au cœur de ce monde arabe qui paie, de très loin, le plus lourd tribut au terrorisme de Daech.
Car la France n’est bien sûr pas la seule à être frappée. Le terrorisme a touché New York, Boston, San Bernardino ou Orlando. Il a fait des ravages à Paris, Nice, Bruxelles, mais aussi à Istanbul, Kaboul, Bagdad, Dacca, Syrte, Tunis, Bamako, Niamey, Tel Aviv, Ouagadougou ou Abidjan. Cette liste macabre n’est pas exhaustive, même si elle est déjà longue, beaucoup trop longue. Nous en connaissons tout le paradoxe : la majorité des victimes de ces terroristes, qui se revendiquent de l’islam, sont des musulmans.
Cette menace, elle est mondiale. Notre réponse doit l’être tout autant : la France et le Qatar et, avec eux, l’Europe et les pays du Golfe ont, ensemble, un rôle essentiel à jouer dans ce combat.
Face aux désordres du monde, la seule réponse consiste à unir nos forces, à faire preuve de solidarité et à trouver des solutions collectives à des problèmes communs. Nous devons continuer à agir. Agir sans relâche. Agir en restant fidèles à nos principes. Ne jamais nous résigner. C’est la conviction de la France.
Pour cela, nous avons besoin d’un partenaire américain ouvert au monde, pleinement engagé, jouant la carte de la coopération avec ses alliés et celle du multilatéralisme, sans lequel il est illusoire de penser répondre aux enjeux globaux auxquels nous sommes tous confrontés. J’ai cité la lutte contre le terrorisme, mais il y en a tant d’autres : le dérèglement climatique, la gestion des flux migratoires, la sécurité collective, le développement durable.
Nous travaillerons avec le futur Président américain parce que les Etats-Unis sont un pays ami de la France et parce que notre coopération est indispensable. C’est la raison pour laquelle le Président de la République a tenu, dès les premières heures, à établir un dialogue avec Donald Trump. Pour faire en sorte que les doutes nés d’une campagne électorale trop polémique soient rapidement levés. Pour favoriser, malgré certaines divergences, une coopération solide avec la nouvelle administration. Il n’y a pas de temps à perdre et je me réjouis, qu’à l’occasion de son entretien avec François Hollande, Donald Trump ait affiché une volonté claire de travailler avec la France.
Ce qu’il faut à tout prix éviter, c’est l’aventure isolationniste, l’unilatéralisme ou une forme de rupture avec ce qui constitue, en fin de compte, un Etat de droit international. Partout surgissent les nationalismes, qui, à force de glissements progressifs et incontrôlés, pourraient aboutir à des chocs brutaux dont l’histoire nous a enseigné les dangers et les conséquences dévastatrices. Plus que tout autre continent, l’Europe peut en témoigner.

Pour l’Europe, qui demeure, ne l’oublions pas, la première puissance économique au monde, cette incertitude qui accompagne l’arrivée d’une nouvelle administration américaine est un encouragement à prendre encore plus son destin en main. C’est ce que la France souhaite lorsqu’elle plaide pour des avancées dans le domaine de la politique européenne de défense et de sécurité. C’est également son objectif lorsqu’elle est à l’initiative pour que l’Union renforce le contrôle de ses frontières extérieures. Les lignes bougent, comme en témoignent les décisions récentes des ministres européens des Affaires étrangères et de la défense sur la question de la défense européenne.

Ensemble, sur la scène internationale, nous ne sommes pas démunis. Nous ne sommes pas impuissants.L’accord de Paris sur le climat en est l’illustration : lorsqu’il s’agit de répondre aux grands défis universels, nous sommes capables de trouver des solutions responsables. La COP 22 qui s’est achevée vendredi à Marrakech, sous la présidence avisée du Maroc, permet d’engager résolument la mise en œuvre de ce cadre global pour la lutte contre les dérèglements climatiques. C’est avant tout une chance : la chance de transformer nos économies vers un modèle sobre en carbone, la chance de promouvoir l’innovation, la chance de favoriser des comportements plus responsables et plus solidaires au sein de nos sociétés, la chance d’offrir un monde meilleur aux générations futures.
Ce succès nous incite à prendre conscience du besoin de solidarité dans la réponse aux enjeux communs : je pense évidemment à la gestion des flux migratoires et à la lutte contre le terrorisme, mais aussi au développement, à l’éducation, aux droits fondamentaux, à la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes.
Nous avons aussi été capables d’arrêter la course de l’Iran vers l’arme nucléaire en alliant nos forces pour qu’un accord équilibré soit trouvé. Il est essentiel de mettre en œuvre les engagements pris de part et d’autre et d’encourager l’Iran à devenir un acteur responsable dans la région.
Le monde dans lequel nous vivons appelle un nouveau regard. Alors que certains évoquent le retour de la guerre froide, je pense au contraire que le temps des superpuissances est révolu : elles ne peuvent plus faire de notre monde leur terrain de jeu ; elles ne peuvent plus dessiner et redessiner, à leur guise, les frontières, notamment ici au Moyen-Orient. L’avenir de nos sociétés ne se décidera pas sans elles. Nous ne devons pas attendre un hypothétique Yalta ou un nouveau Sykes Picot, qui serait imposé aux populations arabes et à leurs dirigeants. Une telle méthode n’est aujourd’hui plus possible.
La réalité, c’est que la France, l’Europe et le monde arabe sont intimement liés. Et progressivement, cette réalité s’impose à nous : elle découle de cet espace partagé, ouvert, un espace d’échanges sillonné par les hommes et dans lequel s’est forgée, en dépit des vicissitudes de l’Histoire, une communauté de destin. 
Cette communauté de destin s’incarne en particulier dans la relation que la France entretient, depuis toujours, avec le monde arabe. C’est une relation ancienne, multiple, complexe, que l’on ne peut réduire, comme certains voudraient le faire, à ses seuls volets économique et militaire. Cette vision est erronée et ne rend pas justice à la profondeur de nos liens, ni à la richesse de notre histoire commune.
Daech voudrait faire de la France l’ennemie du monde musulman. Ce discours vise bien évidemment à nous séparer. Le terrorisme aveugle promu par cette organisation et les réactions populistes qu’il attise n’ont qu’un but : nous entraîner sur le terrain de l’affrontement des civilisations, dans un manichéisme dévastateur qui voudrait opposer de manière inéluctable l’Orient et l’Occident. La France refuse cette opposition aussi factice que fatale : elle connaît notre histoire commune et sait qu’elle constitue un socle solide sur lequel il est possible de bâtir ensemble.
Dans moins de deux semaines, se tiendra à Abou Dhabi la Conférence sur la préservation du patrimoine culturel en péril. Voilà une illustration concrète de cette communauté de destin. Voilà une preuve de notre capacité à relever les défis et à conjurer les menaces de ce siècle.
Ma conviction, c’est qu’il est possible et nécessaire de construire une relation confiante entre l’Orient et l’Occident. C’est notre responsabilité commune. La France et le monde arabe ont une voix à faire entendre et une expérience à partager. Forts du chemin parcouru ensemble, il leur appartient d’orienter résolument leur partenariat vers l’avenir.
Je pense naturellement à la jeunesse. Le monde arabe connait une vitalité exceptionnelle. Ses jeunes sont nombreux et aspirent à un avenir meilleur. Notre premier devoir est de leur faire confiance et de leur permettre de réaliser leurs projets. En 2011, la jeunesse arabe a fait entendre sa voix. Son message était clair. Nous ne l’avons pas oublié. L’émancipation des peuples est une source d’énergie considérable, une force et une promesse pour l’avenir.
Voilà pourquoi, avec les autorités qatariennes, nous avons décidé d’apporter tout notre appui au gouvernement tunisien. Le succès de la Tunisie démocratique est le plus beau message d’espoir qui puisse être adressé aux jeunesses de cette région. Ce succès passe par une reprise économique qui donnera à chacun ses chances, sa dignité, son avenir.
Car c’est bien dans cette jeunesse qu’il faut investir, investir massivement dans la connaissance et la culture, dans la transition énergétique, dans la diversification et la modernisation économiques. C’est ainsi que le monde arabe pourra assurer son avenir. Les exemples ne manquent pas : des programmes « Vision 2030 » mis en œuvre au Qatar et en Arabie saoudite, au modèle de ville durable à Masdar aux Emirats arabes unis ou au programme Tanfiz en Oman. Tous ces projets – et tant d’autres – sont la preuve éclatante de ce que le monde arabe et le Golfe, en particulier, ne manquent pas d’ambition.
La France se tient à vos côtés et est prête à contribuer à votre réussite. Elle est prête à inscrire sa coopération dans le cadre de cette nouvelle approche que vos pays développement, avec chaque fois la volonté de se doter d’une industrie locale et d’infrastructures efficaces et modernes, de favoriser l’accès de la jeunesse au marché du travail.

Excellence,
Mesdames et Messieurs,

L’ambition du Qatar et des autres pays du Golfe ne doit pas nous faire oublier les tensions qui traversent la région. Les drames qui secouent la Libye, la Syrie, le Yémen, l’Irak, les différences entre Islam chiite et Islam sunnite que les radicaux de tous bords souhaitent ériger en une véritable fracture : ces crises ébranlent le Moyen-Orient et freinent son développement et son intégration économique.
Membre permanent du Conseil de Sécurité, la France s’engage et assume ses responsabilités, avec deux convictions fortes  : la première est qu’il n’y a pas de contradiction entre la lutte contre le terrorisme et le respect des droits de l’Homme. Les groupes terroristes prétendent abolir les frontières et souhaitent imposer partout leur logique totalitaire et destructrice. A cet universalisme de la terreur, la réponse de la France, c’est celle de l’universalisme des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La lutte contre les discriminations et les inégalités, la promotion des droits civils, politiques et sociaux, de l’égalité entre les femmes et les hommes, l’affirmation de la liberté de conscience et d’expression, sont nos meilleures armes contre l’idéologie obscurantiste et mortifère que prônent Daech, Al Qaeda, Boko Haram et leurs avatars. C’est vrai en France, en Europe, dans le monde arabe et partout où ces mouvements nous ont déclaré la guerre.

La seconde conviction est qu’il existe un point commun à toutes ces crises : aucune ne pourra être réglée par la seule option militaire ; toutes appellent une solution politique qui ne peut résulter que de la négociation.
Le dialogue, la diplomatie, la confrontation des idées : c’est ainsi que nous sortirons des impasses dans lesquelles la logique de la force nous a bien souvent conduits et que nous ouvrirons des perspectives de paix réelles et crédibles.
Nous assistons en Syrie à la plus grande catastrophe humanitaire de notre temps. Le peuple syrien est pris en étau, supplicié d’un côté par un régime barbare, acculé de l’autre par des groupes terroristes dénués de tout scrupule et de toute conscience humaine. Depuis 2011, le conflit a provoqué la mort de plus de 300 000 personnes. La moitié de la population est réfugiée ou déplacée.
Cet enchaînement tragique se déroule à nos portes. C’est un cercle vicieux que les soutiens de Damas nourrissent en connaissance de cause pour amener la Syrie à un face-à-face morbide entre deux impasses : celle du régime et celle du terrorisme. Ni le régime d’Assad, ni Daech, ni Al-Nosra ne respectent les principes les plus élémentaires du droit international humanitaire et des droits de l’Homme.
Certains prétendent qu’il n’y aurait, au fond, qu’à choisir entre deux maux le moindre. Confier au régime de Bachar Al Assad la tâche de nous débarrasser de Daech. Nous savons que rien n’est plus faux que cette logique délétère consistant à exonérer de leurs crimes ceux-là même qui attisent par leur barbarie d’Etat la barbarie terroriste. Cette erreur est une erreur non seulement morale, mais aussi stratégique.
J’invite à ne pas commettre cette erreur. La France a proposé des solutions qui s’inscrivent dans le cadre fixé par les décisions du conseil de sécurité. La résolution que nous avons portée pour mettre fin au martyre d’Alep n’a été bloquée que par le seul veto russe. Chacun doit désormais prendre ses responsabilités.
Nous devons faire plus pour maintenir une alternative au pouvoir sanguinaire de Bachar Al Assad. La France continuera d’œuvrer pour que le peuple syrien puisse enfin vivre en paix. Elle continuera à tenir ce langage de vérité à ses alliés, à résister à la tentation de baisser les bras et de détourner le regard.
Le retour de la paix en Irak est également capital. La reprise de Mossoul, puis de Raqqah, des mains de Daech privera bientôt, je l’espère, ce pseudo-Etat de son assise territoriale d’où il a distillé, en Irak, en Syrie et jusqu’en Europe, le poison de son obscurantisme et sa folie meurtrière. Mais cette victoire devra nécessairement être suivie d’une réconciliation plus large.
Les fractures attisées au Moyen-Orient ne reposent sur aucune base idéologique ou religieuse et sont instrumentalisées. Beaucoup, dans la région et à l’extérieur, sont tentés par l’amalgame et la simplification. Mais la peur est mauvaise conseillère. Nos efforts doivent tendre vers la réparation du lien entre les communautés. Nous croyons que cela signifie quelque chose en Irak d’être irakien, en Syrie d’être syrien, au Qatar d’être qatarien. La remise en cause des frontières est un jeu dangereux : quelle alternative offre-t-elle aux citoyens arabes, sinon l’effritement du lien social, la promotion de logiques identitaires, ethniques, religieuses, toutes réductrices, toutes destructrices et qui aboutissent, en fin de compte, à la guerre de chacun contre tous ?
Les territoires libérés de Daech doivent être des exemples de coexistence pacifique et de gouvernance respectueuse de la diversité. Car j’en suis sûr, les musulmans, les chrétiens, les juifs, les minorités ethniques et religieuses, quelles qu’elles soient, peuvent vivre ensemble dans un Moyen-Orient en paix, comme elles l’ont fait par le passé. La gestion de l’après-Daech doit permettre de traiter le mal à la racine, en asséchant le terreau sur lequel ce monstre a pu prospérer.
Je n’oublie pas le conflit yéménite, qui a, jusqu’à présent, fait plus de 7 000 morts et 37 000 blessés. Ce sont 21 millions de personnes qui ont besoin d’une assistance médicale et 3 millions d’une aide alimentaire immédiate. La France est très préoccupée par les récents développements sur le terrain. Elle condamne les attaques contre le territoire saoudien, qui menacent la stabilité régionale. Tandis que les violences se poursuivent et que la situation humanitaire se détériore, il est urgent que les parties parviennent à s’entendre sur une sortie de crise. Il est urgent qu’elles cessent leurs attaques contre des civils et contre d’autres Etats. Seule une solution politique, celle que portent aujourd’hui les Nations unies, mettra fin au conflit.
La stabilité de la région, la paix et la sécurité passent aussi par un règlement juste et durable du conflit israélo-palestinien. Nous le savons : le statu quo actuel est un leurre. Sur le terrain, la situation se dégrade de jour en jour. La poursuite de la colonisation et l’absence de toute perspective politique rongent les espoirs des deux peuples. Elle nourrit les frustrations qu’exploitent ceux qui, dans les deux camps, veulent enterrer la solution des deux Etats. Nous ne voulons pas nous résigner. Nous allons donc poursuivre nos efforts et l’initiative que nous avons lancée le 3 juin dernier. Notre constat est inchangé, tout comme notre objectif : l’organisation d’une conférence internationale, qui doit permettre d’envoyer un message en faveur de la paix, de réaffirmer l’attachement collectif à la solution des deux Etats et de montrer ce qu’elle apporterait aux Israéliens comme aux Palestiniens. Notre démarche n’est pas unilatérale. Elle n’est pas guidée par l’ingérence. Elle est au contraire collective, lucide et déterminée. L’enjeu est essentiel, d’abord pour Israël et la Palestine, mais aussi dans toute la région et au-delà.

Excellence,
Mesdames et Messieurs,

Les chefs d’œuvre de la civilisation islamique, de Cordoue à Samarcande, ces chefs d’œuvre que l’on peut admirer ici, au musée d’art islamique de Doha, montrent tout ce que le monde arabe a apporté à l’humanité. Ce qui frappe l’esprit, c’est que ces chefs d’œuvre nous sont familiers. Ils nous parlent et nous touchent, nous Européens, car ils sont aussi une part de notre histoire. Ils sont le symbole de cette communauté de destin que je viens d’évoquer.
Ce qui se joue aujourd’hui en Syrie, en Irak, au Yémen, en Libye, ces spasmes qui secouent le Moyen-Orient, sont sans doute le plus grand défi auquel nous ayons été confrontés, au cours de notre longue histoire commune.
De la réponse que nous apporterons à ces crises sans précédent dépendra bien sûr l’avenir de cette région et l’avenir de l’Europe. Mais le défi dépasse largement nos frontières : il touche la communauté internationale dans son ensemble car il met à l’épreuve notre responsabilité et notre capacité à agir collectivement.
Aux prophètes de malheur, à ceux qui ne croient qu’à la force, la France oppose une autre conviction, qu’elle porte sans relâche : il n’y a pas de fatalité au Moyen-Orient. La guerre n’est pas inéluctable, pas plus que l’instrumentalisation des conflits par ceux qui voudraient faire de cette région le terrain de leurs rivalités. Notre responsabilité, c’est de tout faire pour démontrer qu’il existe une voie de paix, celle qui oppose aux forces d’oppression et de destruction la force du dialogue, de la négociation et de la réconciliation.