World Policy Conference: Les leçons des chocs politiques

14.10.2019

Badra Berrissoule, L’Economiste

Protectionnisme US, incertitudes au Moyen-Orient, … les menaces

La «puissance» de la Chine face à la révolte de Hong-Kong

Les défis africains encore loin d’être réalisés

Invité à la 12e WPC à Marrakech, l’ancien directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn, en aparté avec la directrice des publications du groupe Eco-Médias, Nadia Salah

La WPC invite chaque année 250 personnalités, experts, ministres, chercheurs, hommes politiques, académiques, leaders d’opinion, grands patrons… Ci-dessus, Mostafa Terrab, PDG de l’OCP, aux cotés de (à gauche) la nouvelle ambassadrice de France, Hélène Le Gal, et Mona Makram Abeid, sénatrice égyptienne, et Marie-Christine Balling , professeure

Thierry de Montbrial, fondateur de la WPC, en conversation d’ouverture avec le 1er ministre ivoirien Amadou Gon Coulibaly

Invité à la 12e WPC à Marrakech, l’ancien directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn, en aparté avec Bark Taeho,  ancien ministre du Commerce de la République de Corée et président du Lee&Ko global commerce Institute

Salaheddine Mezouar, Fathallah Oualalou, parmi les conférenciers de la 12e WPC qui poursuit ses travaux jusqu’au 14 octobre

 

 En trois jours, la World Policy Conférence (WPC) a fait un tour d’horizon complet sur les changements qui s’opèrent dans le monde: le protectionnisme des USA et les conséquences de la politique et des virages de Donald Trump, la division de l’UE, la sécurité en Asie, la montée en puissance de la Chine.

Et d’autres sujets plus pointus, mais tout aussi importants, comme le commerce, les IDE ou encore la technologie. Pour la 5e fois, la WPC, fondée par Thierry de Montbrial, a choisi Marrakech pour tenir sa 12e rencontre annuelle soutenue en cela par l’OCP Policy Center. Et tout naturellement, le décryptage de l’Afrique était au cœur du débat.

«Nous devons imaginer la possibilité que les fonds de la Banque mondiale servent d’effet de levier pour mobiliser les ressources nécessaires pour faire face aux besoins de financement des infrastructures en Afrique», suggère Amadou Gon Coulibaly, Premier ministre ivoirien.

Car, malgré les croissances enregistrées, les difficultés restent et pour transformer l’économie, répondre aux enjeux de l’emploi et de la réduction de la pauvreté,  il faut d’abord disposer d’infrastructures. Ce sont là les défis africains, mais en attendant, les chocs politiques affectent les perspectives économiques et aucun Etat n’échappe aux impacts.

«L’Amérique préfère recourir à l’arme économique et ne craint pas de brutaliser ses alliés et d’autres partenaires en leur imposant sa propre politique extérieure et ses propres lois. Ce qui génère beaucoup d’incertitudes», note Thierry de Montbrial.

L’Europe divisée et se débattant dans ses propres problèmes n’a plus le même poids. En Asie de l’Est, l’empire du Milieu n’hésite pas à affirmer haut et fort ses objectifs de croissance contre vents et marées. La Chine étend son influence et agit au nom du développement ou de la réduction de la pauvreté.

C’est d’ailleurs aussi ce qu’en pensent des dirigeants africains. Pour Arkebe Oqubay, ministre et conseiller spécial du 1er  ministre d’Ethiopie, «les pays africains doivent être réalistes et profiter de l’engagement chinois dans l’industrialisation du continent et sa transformation structurelle».

Même son de cloche auprès de Salaheddine Mezouar, ancien ministre des Affaires étrangères et actuellement président du patronat marocain: «La Chine est une force qui va permettre un retour d’équilibre et il faut que l’Europe l’accepte», indique-t-il.

Alors la Chine en sauveur? Pas tout à fait. La révolte d’une partie de la population de Hong Kong contre l’emprise du gouvernement de Pékin jette une ombre sur la république populaire au moment où la croissance ralentit à cause de la guerre commerciale. Pour rappel, les jeunes Hongkongais refusent la mainmise de la Chine sur le petit territoire qui fut britannique jusqu’en 1997 et souhaitent une indépendance.

«Et si on succombe à tous ces mouvements de protestations, d’autres suivront en Chine ou ailleurs», défend Leung Chun-Ying, vice-président de la Conférence consultative politique du peuple chinois, ancien chef de l’exécutif de la région administrative de Hong Kong.

Concernant la pérennité de la mondialisation, pour Eric Li, fondateur et associé de Chengwei Capital, le libéralisme ne fournit pas toutes les réponses. Il rappelle d’ailleurs que la Chine a tiré 700 millions de personnes de la pauvreté. L’empire a laissé d’autres sur la route. «La proposition chinoise est d’identifier une nouvelle approche pour rendre la mondialisation viable, plus juste pour l’ensemble de l’humanité». Pour la première fois, les Chinois étaient en force pour défendre leur modèle.

Au même moment, Donald Trump annonçait qu’un accord commercial avait été trouvé avec la Chine. Cet accord «de phase 1», partiel et qualifié de «très important» par le président américain, inclut notamment la suspension d’une hausse programmée des tarifs de douane sur les importations chinoises.

Terrorisme

Comment pourrait-on parler de sécurité en Afrique, alliée de l’Europe, alors que le terrorisme au Sahel continue et que la communauté internationale fait la sourde oreille. Comment pourrait-on parler de potentiel alors que l’Afrique est en train de perdre sa jeunesse qui émigre à cause de la pauvreté. Or, c’est cette pauvreté qui alimente les tensions sociales et constitue un environnement favorable à l’expansion du terrorisme qui se propage dans toute la sous-région ouest-africaine, estime Amadou Gon Coulibaly, Premier ministre ivoirien. «Les pays de la Cedeao ont décidé de mobiliser 1 milliard de dollars dont 500 millions par les pays de l’Uemoa pour financer la lutte contre le terrorisme». Gon Coulibaly regrette d’ailleurs que seule la France s’est réellement impliquée dans la lutte contre le terrorisme au Sahel.

Lire l’article sur l’Economiste