Élisabeth Guigou propose une nouvelle alliance Afrique-Europe

14.10.2019

Mohamed Amine Hafidi, Le Matin

Lors de l’atelier «Afrique», Cheikh Tidiane Gadio, ancien ministre des Affaires étrangères sénégalais a conditionné l’essor du continent à la résolution des menaces sécuritaires.

Élisabeth Guigou, présidente de la Fondation euro-méditerranéenne Anna Lindh pour le dialogue des cultures, propose une nouvelle alliance Afrique-Europe et de travailler sur des questions communes comme le climat, la sécurité, l’emploi des jeunes, l’éducation, la santé et la maîtrise des migrations. Elle suggère en outre la création d’une banque afro-européenne, qui serait issue d’une alliance entre la BEI et la BAD.

L’Afrique est l’avenir du monde. «Nous pouvons l’être effectivement, nous disposons d’énormes atouts, mais ce n’est pas pour aujourd’hui. Nous souffrons actuellement d’énormes maux, notamment sur le volet sécuritaire. Nous sommes attaqués de partout et les djihadistes ne cessent de grandir». Cheikh Tidiane Gadio, président de l’institut panafricain des stratégies, paix, sécurité et gouvernance, a lancé un cri de détresse, le 13 octobre à Marrakech, lors de la 12e édition du World Policy Conference qui a pris fin hier. L’ancien ministre des Affaires étrangères du Sénégal a conditionné l’essor du continent à la résolution des menaces sécuritaires qui le minent, tout en déplorant le fait que l’Afrique soit oubliée et laissée pour compte. «Le monde a décidé de laisser l’Afrique gérer ses problèmes toute seule. Le Mali, où les attaques terroristes prennent de l’ampleur, est aujourd’hui abandonné, Boko haram continue à tuer au Nigeria et “l’État islamique” commet des assassinats en République démocratique du Congo. Nous vivons actuellement une crise sécuritaire sans précédent en Afrique. Nous assistons aux ventes d’Africains comme esclaves, les narcotrafiquants ne sont pas dérangés et les terroristes du monde commencent à déménager en Afrique», déplore Cheikh Tidiane Gadio. Si le continent est devenu une terre fertile qui attire de plus en plus de terroristes, c’est à cause principalement «de l’attaque de la Libye et sa destruction», regrette Gadio. «J’exige un poste permanent en Conseil de sécurité représentant l’Afrique avec un droit de veto. Si on disposait de ce siège, on ne permettrait pas une attaque de la Libye», a-t-il déclaré. L’ancien ministre sénégalais a également lancé un appel aux Européens, afin d’opérer des changements dans leur politique africaine et laisser les Africains décider par eux-mêmes. Élisabeth Guigou, présidente de la Fondation euro-méditerranéenne Anna Lindh pour le dialogue des cultures, semble être du même avis. «L’Europe ne doit plus décider de l’agenda toute seule et doit tourner le dos au néocolonialisme. L’Afrique et l’Europe ont le même défi, celui de sortir du radar des pouvoirs et être dominées par la Chine et/ou être victimes de la guerre commerciale sino-américaine. Il faut voir ensemble comment défendre nos intérêts et travailler sur une nouvelle alliance Afrique-Europe, en travaillant sur des questions communes comme le climat, la sécurité, l’emploi des jeunes, l’éducation, la santé et la maîtrise des migrations», a déclaré Guigou. Selon elle, l’Afrique doit se passer des aides publiques européennes, «qui ont prouvé leur inefficacité», et opter pour des financements de projets communs publics et privés, qui créent de l’emploi et qui soient tournés notamment vers l’industrialisation du continent. La présidente d’Anna Lindh pour le dialogue des cultures propose la création d’une fondation tournée vers l’Afrique, la Méditerranée et l’Europe où des groupes de travail seront amenés à collaborer autour de sujets névralgiques. Pour résoudre les problèmes de financement, elle propose un rapprochement ou une alliance entre la Banque européenne d’investissement (BEI) et la Banque africaine de développement (BAD), pour la création d’une banque afro-européenne afin de mobiliser les fonds et assurer un financement des projets d’infrastructures en Afrique.

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