Olivier Blanchard : « Les élites ne se sont pas assez préoccupées de la montée des inégalités »

9 juillet 2018

Propos recueillis par Marie Charrel et Philippe Escande, Le Monde

L’ancien chef économiste du FMI estime qu’une désagrégation de l’euro n’est pas exclue, mais que l’Union européenne pourrait lui survivre.

Face à la montée du populisme, les gouvernements doivent s’attaquer d’urgence aux inégalités, prévient Olivier Blanchard, économiste au Peterson Institute de Washington. Présent aux Rencontres économiques d’Aix-en-Provence vendredi 6 juillet, l’ancien chef économiste du Fonds monétaire international (FMI) s’inquiète également des fragilités de la monnaie unique.

Les tensions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine menacent-elles la reprise mondiale ?

A court terme, le principal risque porte sur l’investissement. Face au comportement aussi imprévisible d’un dirigeant comme Donald Trump, la décision la plus rationnelle que les entreprises sont susceptibles de prendre est d’attendre. Au niveau macroéconomique, cela peut se traduire par une baisse de l’investissement de 1 ou 2 points de PIB : ce n’est pas rien, mais ce n’est pas catastrophique au point de déclencher une récession mondiale.

A moyen terme, les conséquences sont bien plus préoccupantes, au regard de ce que cela pourrait signifier pour l’avenir et les relations internationales. Et ce, alors que si l’on s’en tient aux seuls chiffres, l’économie mondiale va mieux. Les grands déséquilibres ont été résorbés. Le véritable danger est aujourd’hui de nature politique.

L’Union européenne doit-elle repenser sa stratégie économique et commerciale afin de se passer des Etats-Unis ?

Nous n’en sommes pas là, même si les relations entre les deux continents risquent d’être plus compliquées. En outre, il ne faut pas oublier que les hausses tarifaires se traduisent en général par un ajustement par les taux de change, compensant en partie les effets négatifs. Dans le cas de l’union monétaire, l’euro se déprécierait. Mais les secteurs ne seraient pas tous affectés de la même façon.

Les gouvernements populistes hongrois et polonais prônent une hausse des dépenses sociales tout en dénonçant l’échec des politiques d’austérité…