Iran : les Etats-Unis rajoutent des sanctions ciblées

Le Trésor américain continue de sanctionner Téhéran et ses alliés. Les Européens patinent sur l’élaboration d’un véhicule financier qui leur soit propre.

Comme un métronome. En parallèle à la restauration des sanctions contre l’Iran par les Etats-Unis le 5 novembre dernier qui a notamment touché la vente de pétrole, les transports maritimes et avions iraniens, des banques et 700 individus, le Trésor américain a poursuivi une stratégie de sanctions ciblées. Le 16 octobre, il a ainsi bloqué les actifs de plusieurs établissements financiers dans l’orbite de la  Fondation coopérative Basij, accusée de financer le corps des gardiens de la révolution et le recrutement d’enfants soldats. Le 13 novembre, le Trésor a également bloqué  les actifs de quatre membres du Hezbollah développant des réseaux financiers et d’action en Irak.

« Ils soutiennent les actions terroristes en faisant de la contrebande de pétrole », a expliqué à Paris Sigal Mandelker, sous-secrétaire au Trésor en charge du terrorisme et de l’intelligence financière. Elle arrivait d’une tournée de cinq jours qui l’a menée de Londres à Berlin, Paris et Rome où elle notamment rencontré les milieux d’affaires pour redire le sérieux des sanctions américaines. « Nous allons les faire strictement respecter », a-t-elle prévenu, afin de pouvoir renégocier l’accord sur le nucléaire iranien ».

Pas d’hébergeur

Cherchant à préserver l’accord nucléaire et à éviter les sanctions secondaires américaines,  les Européens souhaitent développer depuis septembre un véhicule financier qui pourrait aider surtout les petites entreprises n’ayant pas d’intérêts aux Etats-Unis à commercer avec l’Iran. Mais ce « Special Purpose Vehicle » (SPV) est difficile à concevoir et à mettre en place d’autant qu’aucun pays ne souhaite l’héberger. L’Autriche s’y est refusée et, selon l’agence Reuters, la France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne (signataires de l’accord nucléaire) font maintenant pression sur le Luxembourg et pourraient aussi solliciter la Belgique.

A Paris la semaine dernière, Kamal Kharrazi, président du conseil stratégique des relations étrangères de la république islamique d’Iran et ancien ministre des Affaires étrangères, constatait « qu’avoir un passeport iranien est maintenant devenu un délit pour les banques ! ». La Bundesbank vient en effet de refuser le versement de 300 millions d’euros de la banque Europaeische-Iranische Handelsbank à un Iranien pour préserver les relations avec les Etats-Unis.

Isolement

Les sanctions américaines font leur effet et Kamal Kharrazi a prévenu : « tant que l’accord nucléaire permet de préserver les intérêts iraniens, nous resterons. Mais si l’Europe ne tient pas ses engagements, nous sortirons. Et quels effets cela aura-t-il sur le contexte sécuritaire de la région ? ». Accusé de plusieurs actions terroristes ces derniers mois en Europe (Danemark, France) dont un attentat fomenté lors d’un rassemblement des Moudjahidines du peuple à Villepinte, Teheran se défend. « C’est un piège très bien planifié à un moment où l’Iran et l’Europe doivent décider de leur avenir », a-t-il déclaré.

Le 18/11/2018, Les Echos

Virginie Robert