Election municipale à Istanbul : « Erdogan doit faire preuve d’une certaine ouverture »

La victoire d’Ekrem Imamoglu à la mairie d’Istanbul va contraindre le président Erdogan à davantage d’ouverture pour ne pas s’isoler, estime Dorothée Schmid, spécialiste des questions turques.

L’écrasante victoire dimanche de l’opposition face au candidat de Recep Tayyip Erdogan aux élections municipales d’Istanbul est un avertissement pour le président turc, estime Dorothée Schmid, chercheur à l’Institut français des relations internationales (IFRI), spécialiste des questions turques.

Comment expliquer ce large revers du parti d’Erdogan aux élections municipales d’Istanbul dimanche ?

DOROTHÉE SCHMID. Il y a de nombreux facteurs. Les problèmes de politique extérieure de la Turquie, c’est-à-dire sa relation extrêmement orageuse avec les Etats-Unis ou ses difficultés militaires en Syrie, pèsent très fortement. La Turquie doit aussi se sortir de la crise économique dans laquelle elle est plongée. Tout cela donne l’impression d’un pouvoir à bout de souffle avec trop de dossiers difficiles à gérer à la fois. Pour la première fois, on sent que le colosse est beaucoup plus fragile qu’il y a deux ou trois mois.

Le manque de démocratie en Turquie a-t-il pu jouer dans la récente défaite de l’AKP, le parti d’Erdogan ?

Peut-être, mais il y a un climat liberticide en Turquie depuis longtemps déjà avec les manifestations anti-Erdogan de 2013. Il s’est renforcé avec la tentative de coup d’Etat manqué de 2016.

Que va concrètement changer cette élection municipale ?

C’est la première fois que les partis d’opposition à Erdogan arrivent à s’allier contre l’AKP, en surmontant leurs divisions. On retrouve trois groupes dans cette alliance : le CHP, c’est-à-dire le parti kémaliste de Imamoglu, quelques dissidents du parti nationaliste et le soutien d’une partie des Kurdes. Mais, le parti kémaliste doit maintenant se réformer et tenir la route après sa victoire aux municipales.

Quelle stratégie pourrait appliquer Erdogan face à ce nouveau concurrent qu’est Imamoglu ?

Erdogan a commencé sa carrière politique à Istanbul, c’est l’homme du peuple stambouliote. Cette défaite de l’AKP a donc été un choc symbolique. On a l’impression qu’il est à bout de souffle, usé. Il sera peut-être obligé de lâcher du lest. Mais le président turc est aussi capable de retournement de situation impressionnant. Le grand défi pour Erdogan, c’est de ne pas s’isoler. Il doit faire preuve d’une certaine ouverture, pratiquer le pouvoir avec plus de collégialité au sein de son parti pour éviter une dissidence.

Erdogan et Imamoglu, c’est finalement un choc entre deux personnalités très différentes ?

Oui, Erdogan joue sur le clivage et passe son temps à insulter son adversaire. Pour lui, le nouveau maire est une sorte de bobo qui n’a pas compris les besoins du vrai peuple d’Istanbul. Il le traite même de terroriste. À l’inverse, Imamoglu est quelqu’un d’assez atypique et dynamique. Il est jeune, utilise beaucoup les réseaux sociaux et parle aux minorités. Les électeurs sont satisfaits d’avoir une tête différente de celle d’Erdogan : Imamoglu incarne une nouvelle génération de politiciens plus modernes.

Peut-il être un concurrent sérieux pour Erdogan en 2023 ?

Depuis qu’Imamoglu est sorti du bois, tout le monde a cela en tête et considère qu’il a un très bon profil pour être candidat. J’imagine aussi qu’Erdogan y pense, dans ses pires cauchemars ! Mais il peut se passer tellement de choses en l’espace de trois ans… La Turquie est un pays qui bouge vite.

Par Raphaël Dupen

Publié le 24 juin 2019 dans Le Parisien

Olivier Blanchard : « Les taux vont rester durablement bas »

L’ancien chef économiste du FMI redoute que la zone euro soit mal préparée pour affronter la prochaine récession.

Ancien chef économiste du Fonds monétaire international, Olivier Blanchard appelle les Etats à sortir de l’obsession de la dette publique. Présent à Sintra (Portugal), au Forum de la Banque centrale européenne (17 au 19 juin), il souligne les marges de manœuvre que leur offrent les taux bas.

Les pays membres viennent de s’entendre sur un projet de budget pour la zone euro. Est-ce une avancée majeure, comme l’estime Bruno Le Maire ?

Je n’ai pas encore eu le temps de me pencher sur les détails, mais c’est l’embryon de quelque chose. Certains soulignent que c’est un début, d’autres, que c’est un moyen de tuer tout projet plus ambitieux. D’une certaine façon, les deux sont vrais ! Je pense que mettre le pied dans la porte est en général positif. Il est plus facile d’avancer lorsqu’une institution existe que de partir de rien. Dans tous les cas, je suis favorable à la création d’un vrai budget commun.

Alors que la croissance ralentit, vous appelez les gouvernements à réviser leur politique budgétaire à l’aune des taux bas. Que voulez-vous dire ?

Lorsque les taux d’emprunt sont bas, la dette publique s’accumule moins vite, son coût pour le budget et l’économie est plus faible. De plus, lorsque les taux sont bas, il devient difficile ou même impossible de les diminuer encore, si bien que la politique monétaire a des marges de manœuvre limitées. Dès lors, la politique budgétaire prend une importance majeure : elle est presque le seul levier susceptible d’augmenter la demande, et donc la production et l’emploi.

[…]

La suite de l’interview de Oliver Blanchard est disponible sur Le Monde.

Marie Charrel 

Publié le 20 juin 2019 dans Le Monde

The politics of the globalization backlash: Sources and implications

Logo of the Global Reasearch Unit

Abstract

A backlash against globalization has led to widespread political movements hostile both to economic integration and to existing political institutions throughout the advanced industrial world. Openness to the movement of goods, capital, and people has had important distributional effects. These effects have been particularly marked
in communities dependent upon traditional manufacturing, some of which have experienced a downward spiral from the direct economic effects of foreign competition through broader economic decline to serious social problems. Those harmed by globalization have lashed out both at economic integration, and at the elites they hold responsible for their troubles. Political discontent is in part due to failures of compensation – insufficient provision of social safety nets for those harmed by economic trends. It is also due to failures of representation – the belief that prevailing political parties and politicians have not paid adequate attention to the problems faced by large groups of voters. Countries vary on both dimensions, as do national experiences with the populist upsurge. Previously dominant socio-economic interests and political actors may act to try to address this dissatisfaction, but the path faces serious economic and political obstacles.

© 2018 by Jeffry Frieden, Harvard University. All rights reserved.

To read the full working paper, click here.

Le monde n’a plus le temps

World map

WASHINGTON – En 2015, la communauté internationale a redoublé d’efforts pour relever les défis posés à la planète, avec, notamment, deux grandes avancées des Nations Unies : le Programme de développement durable à l’horizon 2030 [voté en septembre 2015] et la Conférence des parties de la Convention cadre sur le changement climatique de Paris (COP 21 [qui s’est tenue du 30 novembre au 11 décembre 2015]). Passé un premier mouvement d’enthousiasme, l’élan imprimé vers la réalisation des objectifs de développement durable et dans la lutte contre la dégradation du climat s’est pourtant essoufflé. Il semble que les mises en garde de plus en plus alarmées lancées par l’ONU ou par d’autres organismes concernant l’accélération des extinctions d’espèces, l’effondrement des écosystèmes et le réchauffement de la Terre suscitent de nombreuses réactions allergiques.

Il n’est plus temps de nous demander si le verre, eu égard aux progrès réalisés, est à moitié plein ou à moitié vide. Il n’y aura bientôt plus de verre du tout. Malgré l’attention portée par les médias aux initiatives civiles et politiques pour faire face aux crises qui s’annoncent, les tendances à long terme sont inquiétantes. Voici quelques mois, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a rassemblé les preuves écrasantes des conséquences dévastatrices qu’aura sur des milliards d’humains dans le monde un réchauffement global supérieur à 1,5° C au-dessus des niveaux préindustriels.

Un récent rapport de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques lance un autre coup de semonce. L’activité humaine, conclut ce rapport, met en danger d’extinction un million d’espèces – chiffre sans précédent. Les océans, qui fournissent à plus de quatre milliards d’humains nourriture et moyens de subsistance, sont menacés. Si nous ne prenons pas immédiatement des mesures pour renverser ces tendances, il sera probablement impossible de rattraper le retard que nous aurons pris.

Pendant des décennies, la plupart des grandes économies se sont appuyées sur une forme de capitalisme qui assurait des bénéfices considérables. Mais nous sommes aujourd’hui les témoins des conséquences de la célèbre formule de Milton Friedman, lauréat en son temps du Nobel d’économie : « La [seule] responsabilité sociale de l’entreprise est d’accroître ses profits. » Un modèle de gouvernance d’entreprise fondé sur la maximisation de la valeur actionnariale a longtemps dominé notre système économique, déterminant nos cadres comptables, nos régimes fiscaux et les programmes de nos écoles de commerce.

Mais nous atteignons un point où de grands penseurs de l’économie remettent en question les fondements mêmes du système dominant. The future of Capitalisme [non traduit] de Paul CollierPeople, Power and Profits [à paraître en français] de Joseph E. Stiglitz et The Third Pillar [non traduit] de Raghuram G. Rajan examinent en détail le problème. Le système capitaliste actuel, déconnecté de la plupart des gens et sans attaches dans des territoires où il opère, n’est plus acceptable. Les systèmes ne peuvent fonctionner dans l’isolement. À la fin, la réalité s’impose : les tensions commerciales mondiales resurgissent, les nationalistes populistes arrivent au pouvoir et les catastrophes naturelles se multiplient et gagnent en intensité.

Pour le dire simplement, notre façon d’envisager le capitalisme a aggravé des problèmes sociaux et environnementaux auparavant solubles et semé de profondes divisions sociales. L’explosion des inégalités et l’intérêt exclusif donné aux résultats de court terme (c’est-à-dire aux gains trimestriels) ne sont que deux symptômes d’un système brisé.

Maintenir en état de fonctionnement une économie qui puisse soutenir les intérêts de toutes ses parties prenantes requiert que nous portions notre attention sur le long terme. D’une certaine façon, nous le faisons déjà. Mais nous devons rassembler les efforts entrepris en une campagne concertée qui engage des réformes systémiques au-delà du point critique. Ainsi seulement aurons-nous atteint une boucle de rétroaction récompensant des philosophies à long termes, des conceptions durables de la vie économique.

Le plus important est que nous ne succombions pas à la complaisance. Les tensions à court terme concernant le commerce et d’autres questions ne manqueront pas d’attirer l’attention de l’opinion et des gouvernements. Mais permettre aux premiers gros titres de nous distraire du souci de catastrophes environnementales et sociales serait manquer la forêt pour l’arbre.

Cela dit, l’élan qui conduira l’avènement d’un changement positif ne peut se fonder sur la peur. Les crises qui menacent sont aussi réelles que terrifiantes, mais les cris d’alarme semblent faire de moins en moins recette. Les gens s’immunisent contre la réalité. Le changement à long terme doit donc provenir d’un réajustement du marché et de nos structures de régulation. Si consommateurs, investisseurs et autres acteurs du marché doivent continuer de s’instruire et de se former, partant, de pousser au changement, nous devons aussi réexaminer rapidement et en profondeur les règles et les normes qui régissent aujourd’hui le capitalisme.

Les acteurs du marché qui ne changent pas de comportement doivent en assumer les coûts réels. Discours, commentaires et rapports annuels ne suffiront pas. L’économie de marché est une force puissante, qui nécessite une direction ; le compas est entre les mains des régulateurs et des acteurs du marché. Il est temps de passer aux choses sérieuses et de mettre en place les incitations et les sanctions financières qui présideront à une évolution systémique. Ce n’est qu’après les avoir instituées que nous pourrons débattre pour savoir si le verre est à moitié vide ou à moitié plein.

Traduit de l’anglais par François Boisivon

Bertrand Badré
Publié le 17/06/2019 dans Project Syndicate

Bertrand Badré, a former Managing Director of the World Bank, is CEO of Blue like an Orange Sustainable Capital. He is the author of Can Finance Save the World? 

« Sur le budget de la zone euro, le compte n’y est pas ! »

Portrait de Jean Pisani-Ferry à Rome, Italie

Après des mois de négociations, les ministres des Finances de l’Eurogroupe ont donné leur feu vert vendredi dernier à un budget de la zone euro. Doté d’une mission de « convergence et de compétitivité », il est loin de l’ambition initiale de la France de disposer d’un outil de stabilisation. L’économiste Jean Pisani-Ferry estime cette réponse très insuffisante.

Est-ce que le budget de la zone euro acté en fin de semaine par les ministres des Finances européens valait le capital politique que la France y a placé ?

Tout l’enjeu de ces discussions portait sur la création d’un instrument budgétaire commun de stabilisation de la zone euro en cas de choc important sur une économie. Ce n’est pas une lubie française, c’est la position du FMI, de l’OCDE, ou de la BCE. Un tel instrument a été proposé par la Commission et une large majorité d’économistes le soutiennent y compris des Allemands orthodoxes.  Le résultat des négociations  est que le nouvel outil exclut cette fonction de stabilisation. Il est consacré à l’appui aux réformes et aux investissements. Le glissement s’est fait par compromis successifs entre la proposition française initiale, l’accord franco-allemand qui soutenait l’objectif de stabilisation, et le résultat final où ce dernier a été abandonné.

Ce n’est donc pas une bonne nouvelle ?

Non. L’aspect positif c’est qu’on soit parvenu à consacrer un instrument pour la seule zone euro. C’est symboliquement important, comme l’a été  il y a 20 ans la création de l’Eurogroupe.

Comment expliquer la modestie du résultat ?

Par la mollesse de l’Allemagne à défendre ce projet et  la forte résistance de la coalition emmenée par les Pays-Bas avec des pays, dont la Suède et le Danemark, qui ne veulent ni financer des dépenses supplémentaires, ni laisser se créer un vrai budget pour la zone euro.

Est-ce que ce n’est pas une première étape utile ?

Je me demande s’il ne vaudrait pas mieux avouer que le compte n’y est pas. D’une certaine manière, le budget de stabilisation Macron s’est transformé en « contrat de réforme Merkel ». La ministre espagnole des Finances, Nadia Calvino a dit sans ambages qu’il vaudrait mieux en rester sur un désaccord. Le risque, c’est de cocher la case budget pour mieux oublier la stabilisation.

Vidéo intégrée

Ministerio de Economía y Empresa

@_minecogob

📽️@NadiaCalvino Estoy convencida de que un día habrá un presupuesto para la zona euro. Es imprescindible tener un instrumento fiscal que complemente la Unión Monetaria y garantice verdaderamente una estable y sólida de cara al futuro

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Pourtant, il y a en Allemagne des responsables politiques qui défendent une assurance chômage européenne qui est un instrument de stabilisation ?

Le ministre des Finances Olaf Scholz l’a suggéré sans aller bien loin dans sa démarche. Les Néerlandais sont contre cette idée mais en revanche ils sont favorables à un système bancaire et financier intégré sur lequel on ferait reposer cette capacité d’absorption des chocs, sur le modèle américain. C’est insuffisant mais cohérent. La réticence allemande à l’égard d’un système financier intégré, doublée d’une absence d’engagement sur la stabilisation budgétaire ne l’est guère. Toutes ces divisions envoient un mauvais signal, y compris aux marchés, car ils indiquent qu’on veut l’euro mais sans se donner les moyens d’un système robuste.

Que manque-t-il d’autre à la zone euro pour fonctionner plus efficacement ?

Il faudrait réformer les règles du Pacte de stabilité et de croissance qui sont aujourd’hui illisibles. Sanctionner un Etat au prétexte qu’il affiche un déficit budgétaire structurel dont le mode de calcul est opaque et controversé serait politiquement périlleux. Il y a un consensus pour dire que ces règles ne fonctionnent pas.  Notre groupe d’économistes franco-allemand propose de les redéfinir et de se fonder sur un objectif d’évolution des dépenses publiques . Et puis, il devient indispensable de faire progresser le rôle international de l’euro qui stagne. Le dollar n’est pas un bien public mondial, c’est un instrument de la politique de puissance américaine et les Chinois accélèrent l’internationalisation du renminbi. Deux conditions sont nécessaires pour cela : créer un actif sûr propre à la zone euro, des obligations qui pourraient être émises par le MES en contrepartie de lignes de crédit aux différents Etats de la zone euro. Et, en situation de stress, il faut prévoir que la BCE puisse fournir de la liquidité en euro à des banques centrales partenaires, ce qui n’est pas dans son mandat actuel.

Tout cela veut-il dire que la zone euro n’est toujours pas hors de danger ?

Oui, même s’il y a eu des progrès avec la supervision des banques, et  le renforcement du Mécanisme européen de stabilité (MES) créé pour assister les Etats qui perdent l’accès au marché. L’accord sur les facilités de liquidité proposées aux pays de la zone euro en difficulté passagère est utile.

Comment évaluer le risque du retour d’une crise financière spécifiquement européenne, sur les dettes publiques ?

Il y a clairement un risque italien. Les Italiens veulent rester dans l’euro, mais la dette italienne ne sera plus soutenable si les taux d’intérêt s’éloignent de leur plancher actuel et que la croissance reste extrêmement faible.  La Commission a raison d’alerter mais il ne faut pas se tromper de diagnostic : C’est vraiment la croissance qui lui a fait défaut depuis vingt ans, pas la discipline budgétaire. J’ai fait le calcul : si la France avait suivi depuis 1999 la politique budgétaire de la Péninsule, notre dette serait de 45 % seulement du PIB ! La France, elle, a eu la croissance.

Avec les taux d’intérêt actuels, est-ce le moment d’investir massivement, par exemple dans la transition énergétique ?

Oui. Le bas niveau des taux a une forte composante structurelle, en raison de l’importance de l’épargne et d’une demande soutenue d’actifs sûrs. On peut en déduire qu’ils vont rester bas un certain temps. Que faire de cette fenêtre ? La réponse économique est claire : Il faut s’en servir pour des dépenses d’investissement, comme l’écologie et les réformes – pas des dépenses courantes. Malgré son niveau d’endettement, c’est également vrai pour la France, à condition de réduire les dépenses courantes.

Mais aucun gouvernement européen ne défend cette ligne…

C’est vrai. Mais nous avons un problème « intertemporel » massif auquel il faut bien réfléchir. Rien ne justifie de faire financer notre consommation par les générations futures. Mais nous allons leur laisser une dette financière et une dette climatique. Laquelle est la plus importante ? Celles et ceux qui ont aujourd’hui 15 ans préféreront sans doute l’amélioration du climat à la réduction de la dette. L’argument traditionnel sur le fardeau aux générations futures se renverse.

Les tractations s’intensifient sur la distribution des postes en Europe. Le choix pour la BCE est-il important ou secondaire ?

Il est important. Angela Merkel poussera-t-elle la candidature de Jens Weidmann (le dirigeant actuel de la Bundesbank, NDLR) ? Je me demande s’il considère toujours que le programme d’Opérations Monétaires sur Titres (OMT) de la BCE est contraire au Traité, comme  il est allé le plaider devant la cour constitutionnelle de Karlsruhe . Si oui, cela le disqualifie. Au-delà, ce n’est pas une question de nationalité mais de qualité personnelle. En cas de crise financière, il faut réagir, et bien réagir, en quelques heures. Ben Bernanke, le président de la Fed, a eu les bons réflexes en 2008 parce qu’il avait étudié les années trente. Il serait grave que le choix pour la BCE apparaisse principalement comme une question de nationalité ou que le poste serve de variable d’ajustement secondaire par rapport au choix du président de la Commission européenne.

Catherine Chatignoux et Dominique Seux
Publié le 17/06/2019 dans Les Echos

Mme Assia Bensalah Alaoui s’exprime à l’ouverture du Forum de Tunis

Tunis – Mme Assia Bensalah Alaoui, ambassadeur itinérant de SM le Roi, a souligné, mardi à Tunis, la convergence de vue entre le Président de la République française, Emmanuel Macron et Sa Majesté le Roi Mohammed VI sur l’importance du dialogue multilatéral initié dans le cadre du Sommet des deux Rives de la Méditerranée.

«Sa Majesté le Roi a une ambition immense pour la région méditerranéenne et pour les populations et particulièrement les jeunes pour leur redonner espoir et rechercher un meilleur-vivre ensemble dans le respect des diversités», a déclaré Mme Bensalah Alaoui à l’ouverture du Forum de Tunis, l’un des cinq Forums régionaux thématiques préparatoires au Sommet des deux Rives prévu le 24 juin courant à Marseille.

Elle a qualifié d’«inédit» ce projet, initié par le Président français, puisque, dit-elle, «c’est pour la première fois que des politiques acceptent de se dessaisir du contrôle d’un processus».

«C’est un projet qui donne les premiers rôles à la société civile non pas pour faire de la figuration, mais pour porter et incarner des projets qui sont concrets et qui seront mis en œuvre», a-t-elle soutenu.

Et d’ajouter qu’au fil des forums, «nous avons été extrêmement surpris par l’avalanche des projets que nous avons reçu et par la créativité de ces jeunes qu’on nous dit qu’ils sont blasés, qu’ils ne veulent pas faire de la politique, qu’ils ne s’intéressent à rien, mais nous avons eu la démonstration du contraire, un dynamisme, une énergie et un engagement sans précédent avec des centaines d’initiatives».

La méditerranée est portée par ces jeunes talents qui ont un espoir et qui ont confiance dans l’avenir et dans le «faire ensemble», a affirmé Mme Bensalah Alaoui qui a travaillé pendant plus d’un quart de siècle sur la Méditerranée, arguant que «faire ensemble est la garantie d’une meilleure intégration basée sur le concret, la communauté de vue et l’harmonisation des approches».

Notant que les projets présentés répondent aux aspirations des jeunes et ambitionnent, notamment, d’éliminer toutes les disparités entre femmes et hommes, l’ambassadeur itinérant de SM le Roi a estimé que la méditerranée a aujourd’hui besoin de changements de paradigmes et d’une économie innovante basée sur un nouveau modèle de développement inclusif.

Intervenant pour la même occasion, la présidente du Comité de pilotage du Sommet des deux Rives et chef de file pour la Tunisie, Mme Ouided Bouchamaoui, a déclaré que l’Assemblée des Cent planche sur l’examen de plusieurs projets innovants et concrets visant à transformer la méditerranée et à créer des opportunités pour les jeunes.

Elle a précisé que les projets identifiés couvrent pratiquement tous les secteurs et sont portés par la société civile. «Les projets validés lors de l’assemblée des Cent seront présentés aux ministres des affaires étrangères des Etats membres de ce dialogue multilatéral initié par le Président de la République française», dit-elle, expliquant qu’il s’agit de projets qui répondent aux objectifs de développement durable et qui tiennent compte de l’importance de la digitalisation, de la formation et de l’employabilité des jeunes.

L’Assemblée des Cent, un Comité de pilotage regroupant neuf pays de la Méditerranée occidentale de la rive Nord et de la rive Sud, s’est réuni aujourd’hui dans la capitale tunisienne pour une large consultation des représentants de la société civile des pays du bassin occidental de la Méditerranée, correspondant dans son expression politique à l’espace du Dialogue 5 +5.

Ce dialogue multilatéral initié par le Président de la République française, Emmanuel Macron, réunit le Portugal, l’Espagne, la France, l’Italie et Malte de la rive nord et le Maroc, l’Algérie, la Mauritanie, la Libye et la Tunisie de la rive sud. Il inclut par ailleurs des partenaires européens et internationaux, à savoir l’Union Européenne, l’Allemagne, la Banque Mondiale, la Banque Européenne d’Investissement (BEI), la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD) ainsi que l’Organisation de Coopération et de Développement Economique, l’Agence Française du Développement, La Fondation Anna Lindh et l’Union pour la Méditerranée.

Les forums qui ont eu lieu dans 5 pays des deux rives ont vu une large participation de la société civile méditerranéenne encourageant la mise en œuvre de projets concrets, faisables et repliables basés non seulement sur l’initiative économique, mais également et essentiellement sur le respect de l’humain et le développement durable. Ils ont traité de sujets divers et variés mettant l’accent sur l’innovation, le partage des bonnes pratiques, l’inclusion et la complémentarité. Il s’agit du Forum «Énergie» (Alger 8 avril 2019), Forum «Jeunesse, éducation, mobilité» (La Valette 24 et 25 avril 2019), Forum «Économie et compétitivité» (Rabat 29 avril 2019), Forum «Culture, médias, tourism» (Montpellier 2 et 3 mai 2019) et Forum «Environnement et développement durable» (Palerme 15 et 16 mai 2019).

À travers 5 tables rondes correspondant aux 5 thématiques déjà mentionnées, Le Forum de Tunis fera la synthèse de cette large consultation et présentera la Déclaration de Tunis qui marquera l’aboutissement de cet exercice sans précédent.

Superpower scrutiny at Shangri-La

The Interpreter – The Chinese are finding they are now subject to the Spiderman rule: with great power comes great responsibility.

For the past two years, the highlight of the annual IISS Shangri-La Dialogue in Singapore was the keynote speech by the sadly departed former US defence secretary Jim Mattis. This year the task of speaking on behalf of America to the leading forum of Asian defence ministers fell to Mattis’s successor, acting defence secretary Patrick Shanahan. The American was conciliatory towards China, a message that would have been welcome to a region that generally prefers not to have to choose between Washington and Beijing.

But Shanahan doesn’t have Mattis’s authority or backstory, and his delivery was poor too (although he made a good stab at pronouncing the name of the Australian frigate HMAS Toowoomba). Watching on with several Lowy Institute colleagues, I thought it was revealing that Shanahan intervened several times to limit the number of questions put to him by delegates through the IISS director-general John Chipman. It’s always better to show confidence by taking all the questions, as Mattis did – even hard questions put by blunt Australians.

The message matters, but so does the messenger. Mattis casts a long shadow and it will be a while before Shanahan escapes it.

SINGAPORE, SINGAPORE – MAY 31: (CHINA OUT, SOUTH KOREA OUT) U.S. Acting Secretary of Defense Patrick Shanahan attends the Shangri-La Dialogue on May 31, 2019 in Singapore. (Photo by The Asahi Shimbun via Getty Images)

Shanahan wasn’t the only one to miss a note. British Secretary of State for Defence (and possible Tory leadership candidate) Penny Mordaunt was underwhelming later in proceedings. For some reason, perhaps to compliment the Chinese, she characterised the United Kingdom as a “win-win” nation, like Singapore. In fact, the UK’s strategic circumstances and foreign relations are very different from Singapore’s, and the Brits know from centuries of diplomacy that relations between great powers rarely play out on a win-win basis.

In an effort to downplay British bellicosity, Mordaunt compared future British Freedom of Navigation Operations (FONOPS) in disputed Asian waters to a ship visit to Manhattan. The only effect of this comment will be to undercut the impact of future British ship movements on the minds of those in Zhongnanhai. These are the fruits of Brexit.

The best performer on the same panel – indeed the star of the Dialogue – was French defence minister Florence Parly. Parly slayed. She was plain-spoken, tough-minded and funny. It helped that she was accompanied to Singapore by an aircraft carrier strike group: the magnificent Charles de Gaulle, which was berthed at Changi Naval Base over the weekend. Parly had some fun with Mordaunt on this point. Thank goodness for France, I thought at the end of Parly’s speech. True, the French can be frustrating – but they are also magnificently obstinate, to use Parly’s own word. These days, the West sorely needs some obstinacy.

The star of the Dialogue, French defence minister Florence Parly (Photo: International Institute for Strategic Studies/Flickr)

asked Parly about Michael Kovrig – the Crisis Group analyst from Canada who was a delegate to last year’s Dialogue but who is now in detention in China. This has had terrible consequences for Kovrig and his family – but it has also affected China, dampening intellectual exchange and making it much harder for outsiders to visit China and meet with Chinese policymakers. My question was a tough one for defence ministers, and Parly chose not to respond, but I felt it was important to say Kovrig’s name aloud.

That same afternoon there was a packed session on strategic interests and competition in the South Pacific. Australia’s Department of Foreign Affairs and Trade Secretary Frances Adamson performed impressively on the panel. When asked to comment on the likelihood of the People’s Republic of China establishing a military base in the Pacific, she deftly invited Senior Colonel Zhou of the People’s Liberation Army to answer instead – no doubt the last thing the colonel was expecting or hoping for. Zhou’s careful response – along the lines of “there is no military base” – reminded me of former US president Bill Clinton’s expert use of the present tense back in the day.

Australia has a good story to tell about its contribution to the Pacific, but our weakness is our policy on climate change – an existential issue for some Pacific island nations. Adamson put the best case she could, defending the government’s position and talking up the practical results being achieved. But Pacific discontent with Australia’s climate stance was apparent throughout the whole session. New Zealand’s Defence Minister Ron Mark made a point of praising France’s approach to the issue, for example, while remaining silent on Australia’s approach. The Fijian military chief Admiral Viliame Naupoto said that there are three strategic competitors in the Pacific – the United States, China and climate change – and climate change is winning.

This week Scott Morrison went to the Solomon Islands bearing gifts and the PM won terrific press coverage as a result. But our climate policy limits Australia’s influence and prestige in the region. It is hard to step up when our climate policy keeps pulling us down.

The following morning, China’s defence minister Wei Fenghe had his star turn at the IISS lectern – the first time in eight years that that PRC had been represented at Shangri-La at defence minister level. Whereas Shanahan had dialled the volume down on US-Chinese rivalry, Wei dialled it up – to 11. He was forthright and uncompromising, making it clear that in China’s eyes accommodation is a one-way street.

Wei took questions from the delegates with confidence. But it was also notable that his questioners piled on, raising awkward topics that the Chinese prefer not to address in public, including Xinjiang and the militarisation of the South China Sea. Often this sort of treatment is reserved for Americans; not this year. The Chinese are finding they are now subject to the Spiderman rule: with great power comes great responsibility – and great scrutiny.

Kudos to IISS for providing the forum at which power in Asia can be scrutinised.

Michael Fullilove

5G : la confrontation sino-américaine

« Technologie clé », la 5G va permettre, à brève échéance, des débits de télécommunication mobile de plusieurs gigabits de données par seconde, c’est-à-dire cent fois plus rapides que les réseaux 4G. Sa maîtrise représente donc un enjeu majeur dans la mesure où l’Internet des objets en dépend directement. De la voiture autonome à la domotique en passant par la médecine, la 5G est appelée à renforcer l’intégration et l’interopérabilité des réseaux. De nombreux essais sont actuellement à l’œuvre : le déploiement de la 5G à grande échelle pourrait commencer à horizon 2020. Compte tenu de sa dimension systémique, la 5G n’est pas une technologie comme les autres. Si un réseau 5G venait à être compromis, les effets en cascade pourraient être dévastateurs.

La Chine occupe d’ores et déjà une position dominante. Ce sont deux fournisseurs chinois – Huawei et ZTE – qui se montrent les plus innovants sur le plan technologique et les plus agressifs sur le plan commercial. Pour les États-Unis, la 5G se situe désormais au cœur de la confrontation technologique qui les oppose à la Chine. De son issue dépend le contrôle du système international. Ils mettent en garde leurs alliés contre les équipementiers chinois. L’Australie a annoncé bannir Huawei et ZTE de son marché 5G, suivie par la Nouvelle-Zélande. À l’inverse, et à l’instar de l’Union européenne, la Grande-Bretagne a indiqué qu’elle ne fermerait pas son marché à Huawei après avoir fait expertiser les systèmes par ses services de renseignement. Cette expertise a donné lieu à un « désaccord technique » entre Washington et Londres qui s’est transformé en « désaccord politique », selon la formule d’un diplomate américain. Le Conseil national de sécurité britannique, la plus haute instance en la matière, s’est profondément divisé sur ce dossier, ce qui a notamment entraîné la démission du ministre de la Défense, Gavin Williamson, soupçonné d’avoir commis des indiscrétions au sujet de cette décision, début mai. En toile de fond, l’arrestation au Canada, en décembre dernier, de Meng Wanzhou, directrice financière de Huawei et fille du fondateur, fait l’objet d’intenses tractations.

Cette situation invite à rappeler l’importance que les États-Unis ont toujours accordée aux Five Eyes, c’est-à-dire à leur alliance, en matière de renseignement, avec l’Australie, le Canada, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni. Bénéficiant d’un consensus bipartisan, l’administration Trump est décidée à contenir la montée en puissance de la Chine. Et décidée, si nécessaire, à le faire seule. Selon un diplomate américain, Huawei « n’est pas un fournisseur de confiance », ce qui pourrait conduire les États-Unis à « réévaluer leur capacité à partager des informations et à être interconnectés » avec les pays y ayant recours. Avec une vigueur sans précédent, l’administration Trump dénonce les vols de propriété intellectuelle et l’espionnage numérique à laquelle la Chine se livre. Si un accord avait été trouvé par l’administration Obama, le déploiement de la 5G fait aujourd’hui figure de casus belli pour Washington.

La diplomatie américaine défend désormais l’argumentaire suivant auprès de ses alliés tentés de céder aux propositions commerciales de Pékin. Premièrement, en raison de leur subordination aux services de renseignement chinois, Huawei et ZTE proposent des services nullement sécurisés. Aux risques d’espionnage s’ajoutent surtout ceux d’interruption partielle ou complète en cas de tensions ou d’affrontement. Deuxièmement, Huawai et ZTE ont organisé la transmission des données à travers des serveurs directement contrôlés par le Parti communiste chinois. Troisièmement, les entreprises chinoises se livrent à une concurrence déloyale, dans la mesure où elles bénéficient d’aides publiques massives. En outre, elles proposent des contrats de long terme destinés à construire des monopoles de fait capables d’imposer leur prix. Quatrièmement, à la différence de la 4G, la 5G, une fois déployée, menace la stabilité de l’ensemble du système en raison du pouvoir de réseau qu’elle impose.

La diplomatie américaine prend soin de préciser qu’il ne s’agit pas d’une guerre commerciale : mis à part les acteurs chinois, les autres solutions ne sont pas américaines mais coréenne (Samsung) ou européenne (Nokia, Ericsson). Il se pourrait bien que la 5G offre aux Européens une occasion unique d’agir sur le plan stratégique global, à condition de se coordonner et d’investir. Encore faut-il le vouloir.

La dimension humaine doit être placée au centre de la gouvernance mondiale

La dimension humaine doit être impérativement placée au centre de la gouvernance mondiale, a indiqué, dimanche à Rabat, l’ambassadeur itinérant de SM le Roi, Assia Bensalah Alaoui.

« La dimension humaine est souvent ignorée sinon bafouée face à la montée de la violence notamment chez les régimes autoritaires et les réseaux internationaux de criminalité », a insisté Mme. Bensalah Alaoui, qui intervenait lors d’un débat à l’occasion de la 11ème édition de la World Policy Conference (WPC).

« La violence est également devenue une violence verbale voire factuelle chez certains leaders », a-t-elle déploré, notant que cette violence engendre des divisions au sein de la nation, mais également entre les nations.

Qualifiant d’inadmissible toute forme de violence, notamment celle faite aux femmes, Mme Bensalah Alaoui s’est par ailleurs félicitée de l’attribution du prix Nobel de la paix à des femmes, la Yézidie Nadia Murad et la gynécologue congolaise Denis Mukwege, y voyant une manière de réparer les injustices subies par les femmes.

D’autre part, l’ambassadeur itinérant de SM le Roi a mis en avant le lien entre la migration, l’identité et la diaspora, soulignant la nécessité de capitaliser la richesse de la diversité des cultures, qui peut être bénéfique non seulement aux pays d’accueil, mais également à ceux d’origine, comme c’est le cas avec la diaspora marocaine.

Pour sa part, le directeur de l’Observatoire « Pharos », Pierre Morel, a jeté la lumière sur l’interaction directe entre la mondialisation et la réflexion identitaire.

→Lire aussi: Nomination de Assia Bensalah Alaoui au Conseil de l’ONG «Leaders pour la paix»

L’identité est un concept complexe qui évolue avec le temps en fonction de multiples contextes, a précisé l’ancien représentant spécial de l’Union européenne pour l’Asie centrale et la crise en Géorgie, appelant à ne pas radicaliser l’identité et la ramener à une seule dimension.

La religion est un élément mobilisateur de la réflexion identitaire mais ne la définit pas à elle seule, a-t-il ajouté, préconisant « le pluralisme cultuel et religieux face à l’approche réductrice de l’identité et aux réductions auxquelles sont sujets les minorités religieuses ».

Ont notamment participé à ce débat, qui a été consacré à diverses thématiques allant de la conjoncture internationale à la globalisation des firmes internationales, le senior fellow à l’OCP policy center et ancien ministre de l’Economie et des finances, Fathallah Oualalou, le vice directeur de l’Institut d’Etat des relations internationales de Moscou (MGIMO), Artem Malgin, le Doyen de l’École d’affaires publiques et internationales d’IE University, Manuel Muñiz, et le Président émérite de la Fondation McCall MacBain, ancien Secrétaire général de l’OCDE, Donald Johnston.

La 11ème édition de la World Policy Conference a réuni plus de 250 personnalités de haut niveau, de plus de 40 pays et de divers horizons, en vue d’échanger les réflexions, préoccupations et solutions autour des bouleversements incessants que connaît le monde.

Les travaux de cette onzième édition ont porté sur les enjeux du commerce international, l’éducation, le développement de l’Afrique, les questions énergétiques et le climat, l’état de l’économie mondiale et d’autres sujets.

Fondé en 2008 par Thierry de Montbrial, président de l’Institut français des relations internationales (Ifri), cet événement international a été classé 3ème meilleure conférence de think tank au monde en 2017, d’après le Global Go-To Think Tanks Index de l’Université de Pennsylvanie.

Ambassadeur itinérant de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Assia Bensalah Alaoui donne une déclaration à la MAP, dimanche (28/10/18) à Rabat, en marge de la clôture de 11ème édition de la World Policy Conference

Quelle influence en Afrique pour la France ?

REPLAY 28′. La Tribune publie chaque jour des extraits issus de l’émission « 28 minutes », diffusée sur Arte. Aujourd’hui, la France a-t-elle perdu son influence en Afrique ?
Lionel Zinsou et Marie-Roger Biloa répondent aux questions d’Antoine Glaser pour Arte

Emmanuel Macron a débuté lundi 11 mars une tournée en Afrique de l’Est où il souhaite mettre en avant la prestance des entreprises françaises afin de contrer l’influence croissante de la Chine, mais aussi de l’Allemagne, de l’Inde et de la Russie. Depuis plusieurs années, la France semble perdre son influence sur le continent africain, au point de se tourner vers des pays d’Afrique anglophone comme l’Éthiopie et le Kenya, où le président français se rendra après sa visite à son partenaire économique historique : Djibouti. Quelle stratégie la France doit-elle adopter pour rester en course ?

On en parle avec Antoine Glaser, journaliste, écrivain et spécialiste de l’Afrique, Lionel Zinsou, économiste et ancien Premier ministre du Bénin, et Marie-Roger Biloa, éditorialiste et directrice du groupe Africa International.

 

L’IMPUISSANCE STRATÉGIQUE DES OCCIDENTAUX AU MOYEN-ORIENT

Beyrouth, janvier 2019

Commencé au début de la présente décennie, le mouvement dit « des printemps arabes » a vu, au Moyen-Orient, l’affrontement entre deux idéologies, l’idéologie libérale occidentale et l’idéologie islamiste issue du mouvement des Frères musulmans. C’est une guerre dont aucune des deux idéologies n’est sortie vainqueur. C’est une guerre qui a pavé la voie au retour du fait national. Loin d’être oblitérées, les frontières sont plus marquées que jamais. Les citoyens ne croient plus à un monde arabe globalisé et modernisé par la libre expression sur les réseaux sociaux. Le rêve islamiste d’un califat réunissant tous les pays musulmans de la région est également évanoui. Le mouvement du retour à la nation continue au Moyen-Orient. Quand on regarde la région de l’intérieur, on constate que les nations ne cessent de s’y renforcer. Elles le font dans leurs rivalités comme dans les alliances qu’elles nouent entre elles ou à l’étranger.

Quand on contemple la région de l’extérieur, un phénomène est frappant en ce début d’année 2019. C’est l’impuissance stratégique de l’Occident au Moyen-Orient. Elle se voit partout, dans tous les pays.

En Syrie, l’Occident n’a pratiquement plus son mot à dire ; tout se passe au sein du club d’Astana, c’est-à-dire entre les Turcs, les Iraniens et les Russes. Les Syriens, appuyés par leurs alliés iraniens, voudraient reconquérir immédiatement la poche d’Idlib (nord-ouest de la Syrie), les Turcs eux ne veulent pas toucher au statu quo pour garder leurs alliés rebelles en place et les Russes sont favorables au contrôle par Damas de cette portion de territoire syrien, mais ils obtiennent actuellement des délais afin de privilégier une voie négociée avec les rebelles.

En Turquie, les Occidentaux n’ont pas réussi à convaincre le Président Erdogan de maintenir la trêve qu’il avait instituée avec les Kurdes en mai 2013. Les Kurdes syriens ont été les principaux supplétifs des Occidentaux dans leur guerre contre les djihadistes. Parce qu’ils sont liés aux Kurdes turcs révolutionnaires du PKK, les Kurdes syriens sont aussi devenus une cible stratégique du président turc. Ankara voit rouge dès qu’on évoque la possibilité d’un territoire autonome kurde, même en Syrie, où il existe de facto depuis 2011, sous le nom de Rojava (bande de terre courant au nord du territoire syrien, le long de la frontière turque). En mars 2018, les Occidentaux n’ont pas réussi à dissuader les Turcs de prendre aux Kurdes le contrôle du canton d’Afrin (nord-ouest du territoire syrien), et d’y installer leurs supplétifs arabes islamistes. Le 19 décembre 2018, le président Trump a annoncé qu’il allait retirer du Rojava les forces spéciales américaines (2000 soldats stationnés à Manbij, sur la rive droite de l’Euphrate). Abandonnés par les Occidentaux, les Kurdes syriens (qui sont laïcs) se tournent désormais vers le régime de Damas pour trouver une protection efficace face à l’armée turque.

Au Liban, pays créé par les Français en 1920, les Occidentaux n’ont désormais pas plus d’influence que l’Iran, dont le fils spirituel (le Hezbollah) détient un droit de veto sur toutes les décisions stratégiques du gouvernement.

Au Yémen, l’Occident s’est montré incapable d’empêcher la catastrophe humanitaire née de l’intervention, à partir de mars 2015, de ses alliés saoudiens et émiratis contre les rebelles nordistes houthis, qui tiennent toujours la capitale Sanaa.

Dans le Golfe, les Occidentaux n’ont vu qu’un réformateur dans le prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed Ben Salman (MBS), aveugles quant à son aventurisme militaire et à son cynisme politique. De 2012 à 2016, le Royaume wahhabite a commis trois grosses bévues de politique étrangère. Il s’est immiscé en pure perte dans la guerre civile syrienne, y finançant et y armant les rebelles les plus djihadistes, sur lesquels il a perdu tout contrôle aujourd’hui. Il s’est également immiscé dans la guerre civile yéménite, alors qu’il n’était nullement menacé par les montagnards houthistes (de confession zaïdite, proche du chiisme) qu’il combat aujourd’hui. Enfin, en juin 2017, il a imposé au Qatar un embargo terrestre, aérien et maritime, sans parvenir à faire fléchir le moins du monde le petit émirat gazier. En l’espace d’un an et demi, les Occidentaux n’ont même pas réussi à obtenir une réconciliation au sein du Conseil de coopération du Golfe (CCG), institution de coopération entre monarchies sunnites, dont ils avaient facilité la création en 1981, afin d’endiguer l’expansion de la révolution islamique iranienne.

En Palestine, les Occidentaux ne sont pas parvenus à faire prévaloir leur solution des deux Etats, dont ils ne cessent de parler depuis 30 ans. On n’a jamais été aussi éloigné de cette solution des deux Etats et la colonisation israélienne en Cisjordanie est si avancée aujourd’hui qu’on ne voit pas très bien comment on pourrait encore y créer un Etat viable pour les Palestiniens.

En Libye, qu’on peut rattacher au Moyen-Orient tant les intérêts égyptiens, émiratis, turcs et qataris y sont importants, l’Occident a créé un chaos qu’il n’est pas capable de gérer. Les efforts de conciliation de la France, entamés par le Président Macron à La Celle Saint-Cloud le 25 juillet 2017, n’ont toujours rien donné de concret sur le terrain.

En Afghanistan (on peut mettre l’Afghanistan dans le Moyen-Orient puisque l’ONU le fait), après 17 ans de présence, les Occidentaux sont impuissants à faire prévaloir leurs vues. Les Talibans, soutenus en sous-main par les services militaires de renseignement pakistanais, font plus que jamais la loi dans les campagnes.

En Iran, malgré toutes les sanctions unilatérales supplémentaires décrétées par Trump en mai 2018, les Américains ne vont pas réussir à faire changer le régime. Les Britanniques et les Français, alliés de l’Amérique, mais favorables au maintien de l’accord nucléaire du 14 juillet 2015 avec l’Iran et à la suspension des sanctions commerciales, sont dans une position d’impuissance stratégique caractérisée, car leurs banques suivent le diktat américain, par peur de représailles du Treasury de Washington. Pour survivre, l’Iran va se tourner massivement vers la Russie et vers la Chine.

Lorsque les Occidentaux expriment des vœux sur le devenir du Moyen-Orient, plus personne ne les écoute, que ce soit à l’intérieur de cette région ou à l’extérieur. Comment en est-on arrivé à une telle impuissance stratégique ? L’Occident a commis trois fautes principales.

La première est le néo-conservatisme, ce mouvement qui croit que l’on peut imposer la démocratie à des peuples étrangers par la force des armes. Quel terrible gâchis que celui de l’invasion de l’Irak en 2003, certes courageusement dénoncée par la France ! Le retrait prématuré des Américains en 2010 a été une erreur stratégique aussi profonde, parce qu’ils n’auraient dû se retirer qu’une fois l’Irak stabilisé.

La seconde faute des Occidentaux est la soumission de leurs politiques étrangères à leurs impératifs électoraux intérieurs. Des considérations de politique intérieure ne sont pas étrangères à la décision de Nicolas Sarkozy, un an avant la présidentielle, d’intervenir militairement en Libye, et à la politique de Trump avec l’Iran, pays détesté depuis quarante ans par sa base électorale. Les exemples désastreux de l’Irak et de la Libye ont convaincu les peuples orientaux que l’Occident était en définitive assez indifférent à leur bien-être, lorsqu’il intervenait militairement chez eux.

La troisième faute est l’indécision des Occidentaux. Combien de fois les Occidentaux se sont-ils montrés incapables de prendre une décision ! La proposition Tchourkine de février 2012 en donne un bon exemple. En février 2012, l’ambassadeur de Russie aux Nations Unies Vitali Tchourkine fait une proposition aux Occidentaux, c’est-à-dire aux membres du P3 (les Américains, les Français et les Anglais) parce qu’il a bien compris que le régime de Damas vacillait et qu’il fallait peut-être trouver une solution, c’est-à-dire faire partir, avec les honneurs, le Président Bachar al-Assad, afin de constituer un gouvernemment de transition. Les trois Occidentaux ensemble lui ont répondu : « Non, ce n’est pas la peine de négocier car, de toute façon, Bachar sera chassé par son peuple d’ici quelques semaines ! » Au Moyen-Orient, le wishful thinking a souvent tenu lieu de politique chez les Occidentaux.

La conséquence de ces fautes est l’effacement des Occidentaux, qui furent aussitôt remplacés par la grande puissance opportuniste de la région qu’est la Russie. La Russie a deux bases souveraines en Syrie, mais au-delà, elle a réussi le prodige de faire venir à Moscou en 2017 le Roi d’Arabie saoudite qui l’avait combattue en Syrie. Le réchauffement russo-saoudien est tel que Vladimir Poutine a apporté son soutien à MBS après l’affaire Khashoggi (opposant saoudien sauvagement assassiné le 2 octobre 2018 au Consulat saoudien d’Istanbul). « Il n’y a pas d’affaire, laissons la justice saoudienne traiter cet incident ! », a dit le maître du Kremlin. La Russie a réussi à améliorer ses relations avec un autre grand allié des Américains : Israël. On a vu Netanyahou arborer le ruban de St Georges sur la Place Rouge à côté de Poutine. La Russie est aussi en force en Egypte, où elle va construire une centrale nucléaire. Et le Général Haftar en Libye est devenu une carte russe autant qu’elle était autrefois une carte américaine.

Cet effacement de l’Occident au Moyen-Orient n’est pas une bonne nouvelle pour la région. Car les Occidentaux y ont aussi, par le passé, apporté de très bonnes idées. Pour libérer le Koweït, envahi par l’Irak le 2 août 1990, les Américains avaient constitué une large coalition militaire, comprenant de nombreux pays arabes. En octobre 1991, ils convoquaient à Madrid une vaste Conférence de paix où les Palestiniens furent invités. Moins de deux ans plus tard, le Palestinien Arafat et l’Israélien Rabin se serraient la main sur la pelouse de la Maison Blanche. Seul l’assassinat, en novembre 1995, du premier ministre israélien (par un extrémiste religieux juif) allait réussir à enrayer un processus de paix qui avait été enclenché grâce à l’impact de la Conférence de Madrid.

L’Amérique, qui n’a plus besoin du pétrole moyen-oriental, a décidé de diminuer son implication militaire et politique dans la région, où sa stratégie se limite à asphyxier les Iraniens, pour les faire changer de régime. La Grande-Bretagne et la France sont trop faibles militairement pour prétendre y rejouer un rôle important. L’impuissance stratégique de l’Occident au Moyen-Orient est donc un phénomène qui a toutes les chances de se poursuivre…

Renaud Girard

Amid Brexit Chaos, E.U. Sees a ‘Catastrophic Success’

BRUSSELS — Some of the smugness here is gone.

The European Union took a tough line in negotiating its divorce with Britain, wishing to preserve its unity and discourage other countries from wanting to leave the bloc. But now officials worry that what they have achieved may be “a catastrophic success.”

British politics is in meltdown after Parliament’s crushing defeat of Prime Minister Theresa May’s carefully negotiated plan for Brexit, as the process of withdrawal is known. And no other compelling alternative plan for an orderly exit is in sight, with just 10 weeks to go until Britain is set to exit the bloc.

European Union officials are now worried that Britain could leave without any agreement — a so-called “hard exit” that analysts warn could trigger a recession in Britain, causing huge backlogs, delays and shortages of goods, and badly hit the European economy, too, since more than 40 percent of Britain’s trade is with the bloc.

Yet they see no point in making any concessions now, since Mrs. May has lost control of the process.

“Catastrophic success is accurate, in that the general meltdown of the British political system highlights to everyone what a bad idea it is to leave the European Union,” said Nathalie Tocci, director of Italy’s Institute of International Relations. “That is success, but catastrophic because at this point there’s no obvious way out of this.”

Some in Britain are urging a delay in its scheduled March 29 departure, to allow time for a new consensus, a leadership change or even a second referendum. But even a delay, which the bloc would probably grant if a deal seemed imminent, has its own complications.

Postponing Britain’s departure, while avoiding chaos, “could still have bad and even catastrophic consequences for the E.U., given the delays involved and the imminence of the European elections,” Ms. Tocci said.

Those elections for a new European Parliament, set to begin May 23, are considered a crucial test of populist and euroskeptic sentiment on the Continent.

An extended Brexit debate and the subsequent uncertainty “would be spun in different national contexts, creating risks and unpredictability that most incumbent governments don’t want to raise,” Ms. Tocci said.

But European leaders seem united in rejecting any renegotiation of the withdrawal agreement, or divorce deal, which they believe already goes a long way toward meeting British demands.

For now, the Europeans will wait to see what emerges from Britain’s lawmakers. At the same time, they are preparing for a “no-deal” exit and consider March 29 to be a pressure-cooker deadline for Britain.

“Nobody wishes to end up with a complete breakdown, which would be bad for both sides, even if worse for the U.K.,” said Mark Leonard, director of the European Council on Foreign Relations. “But the other E.U. states are reasonably confident Britain won’t do that, since there is no parliamentary majority for a no-deal.”

Once a divorce deal is finally done, Britain’s future relationship with the bloc can be negotiated in many ways, European officials consistently say. But most of the likely options would require retaining the primary sticking point in Britain: the guarantee that no hard border will be created on the island of Ireland.

President Emmanuel Macron of France has been particularly tough on the issue, partly because France sees a larger role for itself once Britain leaves.

But now that he is so unpopular at home and challenged by the anti-Europe “yellow vest” protesters, “the more macabre and gruesome the British situation is, the better given his domestic situation,” Mr. Leonard said.

France will not accept any dilution of the single market, said Christian Lequesne, a professor of political science at Sciences Po in Paris. In regard to the European Parliament, France also wants to avoid “an ongoing negotiation with a new Parliament without Britons, while the British are not officially out of the E.U.,” he said, adding, “That’s just too complicated.”

Even Chancellor Angela Merkel of Germany, who has been eager to keep close ties with Britain, has said that “it is clear that there cannot be any renegotiations” of the current deal, although she is open in principle to extending the deadline for departure.

From the perspective of the European Union, the whole exercise has been something of a nightmare, said Fabian Zuleeg, chief executive of the European Policy Center, an independent think tank in Brussels.

“The E.U. would say it made a number of concessions to the U.K. but preserved its principles, making the best deal possible given British red lines,” he said.

The bloc deals only with governments, not with parliaments or the public, and the European Union was eager to help Mrs. May get her deal through.

“But if it now looks like that is not in her power, no matter what the E.U. puts on the table, the inclination is not to put anything more out there,” Mr. Zuleeg said. “And some still feel that the closer the U.K. gets to a no-deal, the more likely it is that they will compromise.”

There is little regret among European officials about their role in the talks. As Mr. Leonard said, the European Union’s primary goal from the start has been to preserve the single market, get money from Britain, preserve the rights of European Union citizens, make sure that Ireland was protected and make leaving look unattractive to other countries.

The member states held together, Mr. Leonard said, adding, “Brussels never sold out Ireland, as much as the U.K. may have wished it to.”

Governance lags behind youth expectations and needs

The 2018 Ibrahim Index of African Governance (IIAG) measures performance of the provision of political, social, and economic public goods and services that every citizen has the right to expect from their state, and that a state has the responsibility to deliver to its citizens. In the IIAG, country performance in delivering governance is measured across key dimensions that effectively assess a country’s Overall Governance performance (see Figure 1.1).

Over the past decade, public governance in Africa remains on average on a moderate upward trajectory, mainly driven by progress in Gender, Health, and Infrastructure. The 2018 IIAG shows that approximately three out of four African citizens live in a country where public governance has improved over the past 10 years. Many positive trends emerge from this year’s index. Thirty-four out of 54 African countries have improved in Overall Governance over the past decade, with 15 of these having accelerated their pace of improvement in the past five years. Among those, Côte d’Ivoire, Morocco, and Kenya display the most impressive progression, stepping up from 41st, 25th, and 19th ranks out of 54 countries to 22nd, 15th, and 11th over the past decade, respectively. On the continent, improvements stand out in indicators related to Health, the most improved of the 14 sub categories of the IIAG over the past decade, as well as in Gender and Infrastructure. There are also recent and welcome improvements in Rule of Law and Transparency & Accountability, even if scores in the latter are still low.

But despite these improvements, needs and expectations of the continent’s youth are not met. Faced with unprecedented demographic growth, key governance areas are not progressing fast enough to keep up with rising demands, and more specifically to answer the growing expectations of Africa’s youth (under 25 years old), who now represent more than 60 percent of our continent’s population and are still expected to increase their number by almost 20 percent in the next decade.

Considering Africa’s youth population growth, it is concerning to see the recent downturn of the African average score for Education. For 27 countries—half of African countries—Education scores registered deterioration in the past five years, meaning that education outcomes are worsening for more than half (52.8 percent) of Africa’s youth.

Though enrollment levels are higher, this concerning drop is driven by a fall in the indicators measuring whether education is meeting the needs of the economy, as well as education quality and citizens’ expectations of education provision.

In a world of globalized information and multiplying social networks, Africa’s growing number of young citizens also ask for better rights and participation.

Progress in Participation & Human Rights has been registered, and almost four out of five of Africa’s citizens (79.6 percent) live in countries that have progressed in this dimension over the past decade.

However, the increased number of free and fair executive elections does not necessarily translate into a better participatory environment. Alarmingly, citizens’ political and civic space in Africa is shrinking, with worsening trends in indicators measuring civil society participation, civil rights and liberties, freedom of expression, and freedom of association and assembly.

Also, strong macroeconomic growth over the past decade has failed to translate into progress in Sustainable Economic Opportunity for citizens, namely the extent to which governments enable their citizens to pursue economic goals and provide the opportunity to prosper. While Africa’s combined GDP has increased by almost 40 percent over the past decade, average progress has been almost null for citizens in Sustainable Economic Opportunity. Even if some countries do manage to register progress, almost half (43.2 percent) of Africa’s citizens live in one of the 25 countries where Sustainable Economic Opportunity has declined over the past 10 years.

The almost stagnant trend then strikes a concerning contrast with demographic growth and youth expectations. Africa’s population has increased by 26 percent over the past 10 years and 60 percent of the continent’s 1.25 billion people are now under the age of 25 years old. A deteriorating business environment and high unemployment, among others, are a huge missed opportunity that could become a recipe for disaster even for the largest African economies. Large unemployed populations are bound to fuel further migration flows or political unrest and shake the stability of countries for years to come.

The IIAG results confirm that governance must be citizen-centered. Common factors among the best-performing countries in Overall Governance are relatively higher scores in the provision of property rights, civil rights and liberties, government accountability, and social welfare policies to their citizens.

The index also confirms that Rule of Law and Transparency & Accountability are key pillars of good governance. These two sub-categories show the strongest relationships with Overall Governance scores. Transparency & Accountability is also key for progress in economic opportunity, being strongly correlated to the Sustainable Economic Opportunity category and the Business Environment sub-category. However, even if recent improvements here are encouraging, Transparency & Accountability performance is still low and needs to be further strengthened.

Africa is at a tipping point. We welcome progress in Overall Governance, but the lost opportunity of the past decade is deeply concerning. Africa has a huge challenge ahead: Its large and youthful potential workforce could transform the continent for the better, but this opportunity is now close to being squandered. Young citizens of Africa currently lack hope, prospects, and opportunities. Their leaders need to invest in education and speed up job creation to sustain progress and stave off potential deterioration, as well as to make sure the voice and expectations of the youth are included in policymaking. The time to act is now.

AFTER THE MIDTERMS: AUSTRALIA, THE UNITED STATES AND THE INTERNATIONAL ORDER

21 DECEMBER 2018
By Michael Fullilove
Executive Director Dr Michael Fullilove reflects on the Trump administration, the effect of the midterms on US foreign policy and what this means for Australia and the world order. This speech was delivered at the Lowy Institute on 13 November 2018.

Many of you will know that I have been arguing for some time that Australia needs to step up its foreign policy efforts.

In 2015 I was honoured to deliver the Boyer Lectures, which were titled ‘A Larger Australia’.[i] I called the first of my Lectures ‘Present at the Destruction’ – a play on the title of Dean Acheson’s memoir about the establishment of the post-war order, Present at the Creation. I argued that the country around which the post-war order was constructed, the United States, had stepped back from the world, while powers such as China and Russia had stepped forward into it. The pillars supporting that order were weak. And the principles that defined it were under challenge. The order was not necessarily finished, I said, but it was fraying.

Some protested that I was being too gloomy.

But since then we have seen the international system degrade further. Nationalism and protectionism are rising. Faith in democracy is falling. Strongmen and authoritarians are up on their hind legs. International norms are being flouted. Assassinations and extrajudicial executions on foreign soil seem to be multiplying. The United Kingdom is exiting the European Union, which will weaken both Britain and the West. And the leader of the free world is Donald J. Trump.

No one is saying now that I was too gloomy.

Ladies and gentlemen

We are now halfway through the first term of the Trump administration. Today I will talk about the first two years of Trump’s foreign policy, how the midterms will affect US foreign policy, and what this means for Australia.

President Trump’s foreign policy

Ladies and gentlemen

President Trump came to office with a more coherent worldview than other recent American presidents. For decades, he has held four core beliefs about the world.

They are not exactly the Four Freedoms.

First, Mr Trump scoffs at the longstanding American commitment to international leadership and cooperation. During the presidential election campaign he promised to wall off the world and reduce America’s international commitments. In his midterm election campaign he sent troops to the border to stop a caravan of migrants, and vowed to end birthright citizenship. Since the 1940s, American presidents have appreciated the advantages of global leadership. Mr Trump seems oblivious to them.

As I mentioned earlier, the process of pulling America back from the world did not start in 2016 – but it has certainly accelerated since then.

Second, Mr Trump is unimpressed by the alliance network through which Washington has traditionally projected its influence – even though China or Russia would dearly love to have an alliance network as powerful and cost-effective as that of the United States.

Third, he is hostile to free trade agreements (or at least those negotiated by others).

Finally, he has a weird affinity for strongmen such as Russia’s President Vladimir Putin. By contrast, he is lukewarm about most democratic leaders.

In office Mr Trump’s instincts have, in many respects, informed America’s policies.

He junked the Iran deal. He pulled out of the Paris Accord. He boosted the Brexiteers, and called for other countries to leave the European Union. He signalled that America will withdraw from the INF Treaty with Russia.

On alliances, he repeatedly refused to endorse the collective security guarantee of the NATO treaty, and threatened that the United States would ‘go (its) own way’ if ‘delinquent’ NATO members did not increase their defence spending. He has been ambivalent towards bilateral alliances with South Korea and Australia.

On trade, President Trump withdrew from the TPP and levied tariffs on A$350 billion of Chinese imports.

And he has pandered to President Putin. He accepted the Kremlin’s denial of election interference over the considered opinion of his own intelligence community. He has emboldened a cohort of strongmen including The Philippines’ Rodrigo Duterte, Hungary’s Victor Orban, Italy’s Matteo Salvini, Saudi Arabia’s Mohammed bin Salman and North Korea’s Kim Jong-un.

Of course, Mr Trump has had his foreign policy successes. He put upward pressure on NATO allies’ defence spending – a good thing, and no small thing. He forced allies such as Canada and Mexico to renegotiate trade agreements. He drew the eyes of the world when he met with Kim Jong-un.

But the scale of his successes is mostly modest; certainly, less than he claimed. For example, the US-Mexico-Canada Agreement is not notably different from NAFTA. It is more of a rebranding than a rewriting.

And at what price do these successes come? A stronger party can usually impose its will on a weaker party, but over time, bullying behaviour will undermine the regard in which the stronger party is held.

The genius of America’s conduct after the Second World War was, as historian John Lewis Gaddis observed, that Washington established ‘hegemony by consent’.[ii] If you push your allies to the brink in every negotiation, that consent will quickly evaporate.

At home, President Trump has lowered the bar of acceptable political conduct. His dismissal of all criticism as ‘fake news’ undercuts the free press and has been adopted by dictators abroad. His violent language helps to normalise political violence on the part of some of his followers. His cynicism undermines liberal values and strengthens the claim of Moscow and Beijing that Western democracy is a sham. As my friend, The New York Times columnist Bret Stephens, wrote: ‘The story of the Trump presidency so far isn’t catastrophe. It’s corrosion — of our political institutions, civic morals, global relationships and democratic values.’[iii]

Think of some of the disturbing international events of the past two years. Kim Jong-un assassinated his brother at a major international airport with a chemical weapon. The head of Interpol disappeared in China. A journalist was murdered and dismembered in the Saudi consulate in Turkey, apparently on the orders of the Crown Prince. Once Washington would have cared about these developments and done something about them. Now we hear crickets.

The ghastly case of Jamal Khashoggi is instructive. As Susan Glasser, Washington columnist for the New Yorker – who will soon visit the Lowy Institute – wrote recently, the Khashoggi case is ‘the Trump Presidency distilled to its morally compromising, press-bashing, truth-denying essence. At a time when many question American leadership in the world, Trump’s combination of credulity and cynicism in response to the brutal murder of a dissident who sought refuge here gives the world’s bad guys yet another reason to cheer.’[iv]

President Trump’s worldview has shifted US foreign policy and weakened international society. However, the president’s writ does not run everywhere. Two factors have limited the Trump influence on Trump foreign policy.

The first is opposition from within his administration – the so-called Deep State. The ‘adults in the room’ have prevented the president from doing irreparable damage to America’s alliances and foreign relationships. They have issued official documents such as the National Security Strategy and the National Defence Strategy, which reflect orthodox rather than Trumpian policies. For the most part, they have had a positive effect. Thank God for the Deep State.

However, by now most of the adults have left the room. There are persistent rumours that Chief of Staff John Kelly and Secretary of Defence Jim Mattis will soon follow the others out the door.

Second, the president lacks the patience, discipline and focus to implement his will. He is not really interested in solving policy problems. He is interested in being seen to win. As Tom Wright of the Brookings Institution and the Lowy Institute argued recently, Mr Trump’s style is to make a bold and unexpected move on an issue, declare victory and move on to something else.[v]

The historian Arthur Schlesinger said of Franklin Roosevelt that ‘detail stuck in his mind like sand in honey.’[vi] No one says this of Donald Trump. He is not a details man. Next steps are not important to him. He prefers cheap cheers.

Few observers believe, for example, that scrapping the Iran nuclear deal lessened the chance of Iran obtaining nuclear weapons. Few expect Kim Jong-un to give up his nukes. So goading Tehran and romancing Pyongyang were not real victories. But in the Trumpian era, what happened is a detail. What is seen to happen – what Mr Trump declared just happened – this is what matters.

These two factors – the Deep State’s resilience and the president’s character – have combined to limit the damage Mr Trump has done to the international system. He has hurt America’s interests, damaged international agreements and diminished America’s attractiveness, but he has not yet done irreversible harm.

However, we should not be too sanguine. President Trump is yet to face an externally generated foreign policy crisis. Most of his problems to date have been internally generated. President Obama came to office in the midst of a major financial crisis. Imagine if another such crisis were to occur, and our last line of defence were Donald Trump.

As Mr Trump’s confidence increases, and the influence of his professional advisers ebbs away, the likelihood of presidential error increases further.

The 2018 US midterm elections

This, then, was the foreign policy record submitted to the American people in last week’s midterm elections. Of course, the elections were not just about foreign policy. Midterms are traditionally seen as a referendum on the incumbent president, and this time around, President Trump declared them to be so.

So, did Mr Trump win or lose?

The answer is: ‘it’s complicated’. Both sides have something to skite about.

The president described the result as a ‘fantastic success’ and claimed a ‘Big Victory’. It is true that Republicans increased their majority in the Senate, so Mr Trump’s partisans can say there was no blue wave, only a blue ripple. In his post-election press conference, however, the president did not carry himself like a winner.

Democrats can point to the fact that they won control of the House of Representatives for the first time in eight years. They also won the House popular vote by seven or eight points at a time of record high employment and strong economic growth. Democrats now have the power to check the president’s agenda and investigate his affairs.

Mr Trump remains unpopular with the American people, however in the midterms he tightened his grip on the GOP. Republicans ran towards Trump, not away from him. Many who previously criticised or rejected the President, such as Senators Ted Cruz and Lindsay Graham, now embrace him. And several moderate Republicans lost office last week.

So Americans delivered a slap, not a punch, to Mr Trump. He was not submerged in a blue wave, but the water is now up to his knees.

The question is: how will this result affect a person like Mr Trump?

On the one hand, he might moderate, as George W. Bush did in the second half of his first term, when he realised that events weren’t proceedings as expected. The president may conclude that in order to maintain his reputation as a change agent, he needs to cooperate with Democrats on some areas such as infrastructure and emphasise the positives of the strong US economy rather than the negatives of immigration.

He may invite the adults back into the room – turning over more control of foreign policy to the experts, for example, by empowering Secretary Mattis.

This seems unlikely, however. It is more likely that he will double down.

Given the likelihood of gridlock in Washington, the president may well get bolder in his foreign policy – Trumpier, if you like – both because he has greater freedom to move abroad and because he thinks foreign wins will help him at home.

The president described these two scenarios himself the day after the midterms. He said that he and Speaker Nancy Pelosi could create a ‘beautiful bipartisan-type situation’ but, if the Democrats came after him, he would adopt a ‘warlike posture’.

We should prepare for both possibilities. Certainly, we can now say with some confidence that the United States will not ‘snap back’ to normality. Mr Trump is more likely than not to be re-elected in two years’ time. So America’s posture is unlikely to change any time soon.

President Trump and Australia

What does all this mean for Australia – a country that relies heavily on its security alliance with the United States, but whose citizens distrust the US president? Recall that this year’s Lowy Institute Poll found that only 30 per cent of Australians have confidence in Mr Trump ‘to do the right thing regarding world affairs’.[vii]

Australia believes in a rule-based order. Mr Trump does not. He does not believe in a rules-based order between individuals. He does not accept that rules that apply to other adults also apply to him. And he clearly does not believe in a rules-based order between nations. He believes in a power-based order, by which I mean using all of America’s power, even against its friends, to squeeze out the maximum short-term advantage for the United States.

There are broadly three approaches the Australian government could adopt in response to the Trump effect.

The first approach would be to imitate President Trump – to devise an ‘Australia First’ foreign policy. No one proposes explicitly that we should ‘Make Australia Great Again’. But you see hints of such an approach in suggestions that Australia should pull out of various international agreements or curry favour with Mr Trump by copying his policy positions.

Paul Kelly provided a succinct rebuttal of this line recently in The Australian. ‘The Trump fan club in this country’, said Kelly, ‘doesn’t grasp that America is big enough and powerful enough to live with decisions that antagonise much of the world — but that Australia isn’t, and doesn’t escape with such im­munity.’[viii]

Even if we could get away with aping his conduct, the truth is that President Trump’s instincts are profoundly antithetical to Australia’s interests.

Mr Trump is sympathetic to isolationism; Australians are inclined toward internationalism. Mr Trump is an alliance sceptic; Australians are alliance believers. Trump is hostile to free trade; Australia is a trading nation. Mr Trump swoons over autocrats and strongmen; Australia is an old democracy and a free society. Mr Trump decries globalists; nearly four in five Australians polled by the Lowy Institute agreed that globalisation is mostly good for Australia.[ix]

So an ‘Australia First’ foreign policy would make no sense.

A second approach would be the opposite of the first. Australia could join the ranks of the ‘Never Trumpers’. Our leaders could spend their time refuting President Trump’s untruths. We could edge away from the United States – perhaps move towards its rival, China.

This would be an act of self-sabotage. I am concerned about what President Trump presages for the world. Australia should stand up to him when our interests and the order are threatened. But we should not join the global Resistance. For all its frailties, the United States remains the keystone of the international system. And America is still in play – both its liberalism and its power. There is a good chance that America will be back.

I prefer a third approach.

I agree with the Australian government’s stated commitment to the rule-based order – but I think we should do more to support that order.

This would be a hard task in the best of circumstances. Australians are often complacent about the world. We are interested in international events – but we see them as things that happen over there, rather than things that will affect us here. Too often we regard ourselves as onlookers, rather than players.

And at the moment, of course, our political class is traumatised by a decade of failure and churn. It is hard for governments to be creative when they are beleaguered.

The last prime minister and foreign minister produced a foreign policy white paper that is persuasive on the importance of the rules-based order. But what new initiatives is the government undertaking to support the order? What risks will we take? What costs will we bear?

I would like to suggest eight principles that might inform a larger, more creative Australian policy towards the United States and the international order in the Trump era.

First, we need to maintain our alliance with the United States. As my chairman Sir Frank Lowy said in this year’s Lowy Lecture: ‘Australia would be mad to walk away from the alliance. And where exactly would we go?’[x]

In the long run it is China, not the United States, that poses the greatest challenge to the existing order. China’s rise makes the alliance more, not less, important. Far from suggesting that Washington retreat from regional leadership, as some suggest, we should urge that Washington reaffirm its presence in Asia. A robust US presence is necessary to maintain a balance of forces in the region.

Second, in our dealings with Mr Trump we should stand up for ourselves and our values. We should avoid the example of British Prime Minister Theresa May, who displayed unseemly enthusiasm in her early approaches to the president, culminating in a humiliating joint press conference in the garden at Chequers in which she looked on while he complimented her rival, Boris Johnson, and railed against the ‘fake news’.

Prime Minister Malcolm Turnbull has his famous phone call with President Trump. But compared to other allied leaders such as Germany’s Angela Merkel and Canada’s Justin Trudeau, he got off lightly. Australia’s time will likely come. When it does, Scott Morrison or Bill Shorten should stand up for Australian values. They needn’t troll the president, but neither should they defer to him. Like everything else in life, the Trump presidency will pass. My advice to leaders is: don’t do something you will regret later. Retain your self-respect. Maintain your independent bearing.

Third, we should call out challengers to the international order – whether they reside in the White House or Zhongnanhai. In March this year, then-Trade Minister Steve Ciobo was asked if Australia would consider supporting WTO action by other countries hit by President Trump’s aluminium and steel tariffs. He replied that Australia would ‘practise what we preach on free trade.’[xi] He was widely criticised for this statement – but he was right. There is too much at stake for us to keep our heads permanently below the parapet.

Standing up to Washington when required will give us credibility when we need to stand up to Beijing. Ciobo was correct: we should practise what we preach.

Fourth, we should be an exemplar in following international rules and observing international agreements. A country of our size benefits enormously from an international order in which the rules of the road are well established and widely observed. We should, in the words of Ralf Beste, head of policy planning at the German Federal Foreign Office in a recent appearance here at the Institute, ‘ruthlessly play by the rules’.[xii]

One example of this is the Paris Accord. The experts have told us what global warming will mean for Australia: more bushfires, worse heat waves, more droughts and flooding rains, rising sea levels, falling agricultural production. It is in our interest to play our part in helping the world to avoid the kind of dangerous warming predicted in the latest report by the IPCC. Accordingly we should bolster the Paris Accord. The last thing we should do is walk away from an agreement we signed under Prime Minister Tony Abbott, thereby weakening the case for concerted international action and also undermining our own reputation as a reliable country that sticks to its word.

Fifth, we should thicken our connections to other countries that matter to us. That means doing more with regional powers including Japan, South Korea, India, Indonesia and Vietnam – but also with like-minded extra-regional powers such as the UK and France.

This is easy to say, of course, and hard to do. Canberra should aim to build these relationships out. For example, it is important that Australia and Japan conclude an agreement to strengthen defence ties. We should also boost our cooperation with Southeast Asian militaries, particularly at sea. Australia is growing its navy because we know the big challenges to our security lie in the maritime domain. We also have an interest in helping Indonesia to increase its maritime capability.

Stepping up our intelligence cooperation with our neighbours would also be a good thing. I liked Defence Minister Christopher Pyne’s idea of providing training in reconnaissance and intelligence gathering to ASEAN countries.[xiii]

I also applaud French President Emmanuel Macron’s notion of greater cooperation between Australia, France and India.[xiv]We are three democracies with overlapping interests. Working more closely with New Delhi and Paris will open up new avenues of action.

Asia’s diplomatic geometry is changing. The linear application of power will not do the job any more. Australians will have to bone up on their trigonometry.

Sixth, we should work with other capitals to support global deals until the fever in Washington has passed. I commend the Turnbull Government for working with Tokyo and Ottawa to keep the TPP afloat. The TPP-11, ratified by Australia a fortnight ago, is a liberal development in a world that is increasingly illiberal.

Seventh, we should help to stand up a new concert of middle powers – countries that, like us, have an interest in supporting the international order and capabilities to help do so. It is past time to institutionalise a group of like-minded middle powers – a ‘coalition of the responsible’. In a recent essay in Foreign Affairs, Ivo Daalder and Jim Lindsay suggest that a G-9 of middle powers could meet annually at leader or ministerial level, or form an informal caucus within existing institutions such as the UN and the WTO.[xv]

Australia has a distinguished history of institution-building – from the United Nations and ANZUS to the Cairns Group and APEC – where our interests and values required it and the creativity of our leaders enabled it. We should draw on that history now.

Finally, and perhaps most importantly, we need to bolster our own national capabilities so that we are better positioned to shape our external environment and buttress the international system. If we want the United States to be a responsible stakeholder, then we must be a responsible stakeholder. We should not be one of those countries that opines furiously on international developments but refuses to stump up for a serious defence force – countries that speak loudly but carry a small stick. We should do what we say.

I welcome the progress made by the Coalition government in increasing defence expenditure towards 2% of our gross domestic product and I am pleased that the Opposition has also committed to the 2% target.  In the future, a credible ADF may well cost more than that. It certainly won’t cost less. For Australia, the era of cheap security is over.

In government, Labor would find this a difficult commitment to meet. Last time it occupied the Treasury benches, it cut defence spending significantly as a proportion of our GDP. I agree with those progressives who say we should lead, not free-ride, on climate change. But equally I would argue that we should lead, not free-ride, on the provision of security, especially in our neighbourhood. I was pleased, therefore, to hear Opposition Leader Bill Shorten declare at the Lowy Institute last month that the 2% pledge is ‘fundamental’.[xvi]

Along with a muscular ADF, we need a better resourced diplomatic corps and a generous aid program.

For most of the last three decades, DFAT’s budget stagnated and our network shrank. This government has arrested that trend. Since 2015, DFAT has opened 10 new posts, and Prime Minister Scott Morrison announced last week another five new posts in the Pacific. But Australia’s diplomats are still thin on the ground. DFAT fields substantially fewer personnel overseas today than it did in the late 1980s. Our network is one of the smallest in the G20. This makes no sense.

It is also hard to understand the recent cuts to Australia’s aid efforts. Since 2014 aid spending has fallen in real terms from roughly $5.5 billion to around $4 billion. As a proportion of gross national income, Australian aid has fallen to its lowest point in half a century. We have cut our aid budget too far. We should undo some of these cuts. Foreign aid helps us to do good in the world, but it also helps us to do well.

Conclusion

I said in my Boyer Lectures that Australia’s strategic circumstances demanded a larger foreign policy. Those circumstances have deteriorated significantly since 2015. The results in the midterms have not improved things.

The pace of regional diplomacy is picking up. But as we go into summit season, others are making the running. We seem to have lost a step. How could it be otherwise when our new prime minister will spend most of the time between now and next year’s election introducing himself to his counterparts?

Australia needs to rediscover its ambition and revive its history of creative diplomacy. In our dealings with President Trump’s Washington, we will need to be a busy ally. But that will not be enough.

Australia is a beneficiary of the international order. From time to time, we must serve in its bodyguard.


[i] Michael Fullilove, A Larger Australia: the ABC 2015 Boyer Lectures, (Melbourne: Penguin Random House, 2015). https://www.lowyinstitute.org/news-and-media/multimedia/audio/2015-boyer-lecture-1-present-destruction.

[ii] John Lewis Gaddis, Surprise, Security and the American Experience, (Cambridge, London: Harvard University Press, 2004), 77.

[iii] Bret Stephens, “The Rules for Beating Donald Trump”, The New York Times, 27 July 2018, https://www.nytimes.com/2018/07/27/opinion/donald-trump-2020.html.

[iv] Susan B. Glasser, ‘“Trump Never Handles Anything Right”: The President Is Acting Like Saudi Arabia’s Lawyer in the Khashoggi Affair’, New Yorker, 19 October 2018, https://www.newyorker.com/news/letter-from-trumps-washington/trump-never-handles-anything-right-the-president-is-acting-like-saudi-arabias-lawyer-in-the-khashoggi-affair.

[v] Thomas Wright, “Trump’s Mystifying Victory Lap at the UN”, The Atlantic, 26 September 2018, https://www.theatlantic.com/international/archive/2018/09/trump-united-nations-bolton-foreign-policy-iran-north-korea-russia/571339/.

[vi] Arthur M. Schlesinger Jr., The Age of Roosevelt, Vol. I, (Boston: Houghton Mifflin, 1957-60), 408.

[vii] Alex Oliver, 2018 Lowy Institute Poll (Sydney: Lowy Institute, 2018), https://www.lowyinstitute.org/publications/2018-lowy-institute-poll.

[viii] Paul Kelly, “Wentworth: no excuse for copying Trump on Israel or Iran”, The Australian, 20 October 2018, https://www.theaustralian.com.au/news/inquirer/wentworth-no-excuse-for-copying-trump-on-israel-or-iran/news-story/074f0238894b6650a4bd5e6b77744807.

[ix] Alex Oliver, 2017 Lowy Institute Poll (Sydney: Lowy Institute, 2017), https://www.lowyinstitute.org/publications/2017-lowy-institute-poll.

[x] Frank Lowy, An Ambitious Australia: the 2018 Lowy Lecture, (Sydney: Lowy Institute, 13 September 2018), https://www.lowyinstitute.org/publications/2018-lowy-lecture-sir-frank-lowy-ac.

[xi] David Wroe & Adam Gartrell, “Ciobo leaves door open to broader pushback against Trump’s tariffs”, The Sydney Morning Herald, 11 March 2018, https://www.smh.com.au/politics/federal/ciobo-leaves-door-open-to-broader-pushback-against-trump-s-tariffs-20180311-p4z3ti.html.

[xii] Ralf Beste, “Panel Discussion: Can middle powers save the international order? Views from Germany”, https://www.lowyinstitute.org/news-and-media/multimedia/audio/panel-discussion-can-middle-powers-save-international-order-views.

[xiii] James Massola, “Christopher Pyne backs Australia joining Asia’s ‘Our Eyes’ intelligence group”, The Sydney Morning Herald, 11 October 2018, https://www.smh.com.au/world/asia/christopher-pyne-backs-australia-joini….

[xiv] “Macron wants strategic Paris-Delhi-Canberra axis amid Pacific tension”, Reuters, 3 May 2018, https://www.reuters.com/article/us-australia-france/macron-wants-strategic-paris-delhi-canberra-axis-amid-pacific-tension-idUSKBN1I330F.

[xv] Ivo H. Daalder & James M. Lindsay, “The Committee to Save the World Order: America’s allies must step up as America steps down”, Foreign Affairs, November/December 2018, https://www.foreignaffairs.com/articles/2018-09-30/committee-save-world-order.

[xvi] Bill Shorten, The Foreign Policy of the Next Labor Government, (Sydney: Lowy Institute, 29 October 2018), https://www.lowyinstitute.org/publications/foreign-policy-next-labor-government.

Iran : les Etats-Unis rajoutent des sanctions ciblées

Le Trésor américain continue de sanctionner Téhéran et ses alliés. Les Européens patinent sur l’élaboration d’un véhicule financier qui leur soit propre.

Comme un métronome. En parallèle à la restauration des sanctions contre l’Iran par les Etats-Unis le 5 novembre dernier qui a notamment touché la vente de pétrole, les transports maritimes et avions iraniens, des banques et 700 individus, le Trésor américain a poursuivi une stratégie de sanctions ciblées. Le 16 octobre, il a ainsi bloqué les actifs de plusieurs établissements financiers dans l’orbite de la  Fondation coopérative Basij, accusée de financer le corps des gardiens de la révolution et le recrutement d’enfants soldats. Le 13 novembre, le Trésor a également bloqué  les actifs de quatre membres du Hezbollah développant des réseaux financiers et d’action en Irak.

« Ils soutiennent les actions terroristes en faisant de la contrebande de pétrole », a expliqué à Paris Sigal Mandelker, sous-secrétaire au Trésor en charge du terrorisme et de l’intelligence financière. Elle arrivait d’une tournée de cinq jours qui l’a menée de Londres à Berlin, Paris et Rome où elle notamment rencontré les milieux d’affaires pour redire le sérieux des sanctions américaines. « Nous allons les faire strictement respecter », a-t-elle prévenu, afin de pouvoir renégocier l’accord sur le nucléaire iranien ».

Pas d’hébergeur

Cherchant à préserver l’accord nucléaire et à éviter les sanctions secondaires américaines,  les Européens souhaitent développer depuis septembre un véhicule financier qui pourrait aider surtout les petites entreprises n’ayant pas d’intérêts aux Etats-Unis à commercer avec l’Iran. Mais ce « Special Purpose Vehicle » (SPV) est difficile à concevoir et à mettre en place d’autant qu’aucun pays ne souhaite l’héberger. L’Autriche s’y est refusée et, selon l’agence Reuters, la France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne (signataires de l’accord nucléaire) font maintenant pression sur le Luxembourg et pourraient aussi solliciter la Belgique.

A Paris la semaine dernière, Kamal Kharrazi, président du conseil stratégique des relations étrangères de la république islamique d’Iran et ancien ministre des Affaires étrangères, constatait « qu’avoir un passeport iranien est maintenant devenu un délit pour les banques ! ». La Bundesbank vient en effet de refuser le versement de 300 millions d’euros de la banque Europaeische-Iranische Handelsbank à un Iranien pour préserver les relations avec les Etats-Unis.

Isolement

Les sanctions américaines font leur effet et Kamal Kharrazi a prévenu : « tant que l’accord nucléaire permet de préserver les intérêts iraniens, nous resterons. Mais si l’Europe ne tient pas ses engagements, nous sortirons. Et quels effets cela aura-t-il sur le contexte sécuritaire de la région ? ». Accusé de plusieurs actions terroristes ces derniers mois en Europe (Danemark, France) dont un attentat fomenté lors d’un rassemblement des Moudjahidines du peuple à Villepinte, Teheran se défend. « C’est un piège très bien planifié à un moment où l’Iran et l’Europe doivent décider de leur avenir », a-t-il déclaré.

Le 18/11/2018, Les Echos

Virginie Robert

Renaud Girard: «Influence au Moyen-Orient, nucléaire, les mollahs à l’heure des choix en Iran»

Iran : les mollahs à l’heure des choix

La population iranienne n’a pas de chance. Aux élections présidentielles de 2013, puis à celles de 2017, elle s’était prononcée pour l’ouverture du pays. Dans le maigre choix que lui offrait le système théocratique conservateur en place, elle avait choisi le candidat le plus décidé à réintégrer la Perse dans l’arène internationale. Dans son premier mandat, le président Hassan Rohani avait obtenu une levée des sanctions internationales, en échange d’un encadrement étroit de son programme nucléaire par l’AIEA (Agence international pour l’énergie atomique de Vienne) et d’une renonciation à la bombe atomique (que le régime islamique prétend n’avoir jamais voulue). Washington et Téhéran n’avaient pas repris leurs relations diplomatiques (rompues en 1980 pendant la Révolution islamique), mais le Secrétaire d’Etat Kerry et le ministre des affaires étrangères Zarif avaient établi entre eux des liens de grande confiance.
Rohani souhaitait consacrer son second mandat à la désétatisation de l’économie et à la lutte contre la corruption – qui ronge l’élite au pouvoir, à commencer par le corps des Pasdarans (Gardiens de la Révolution), et certaines des grandes fondations religieuses chiites. Mais, patatras, tout ce beau programme s’est effondré après la décision de Trump de se retirer de l’accord nucléaire du 14 juillet 2015 (pourtant sanctuarisé par la résolution 2231 du Conseil de sécurité de l’Onu), de rétablir toutes les sanctions, de menacer de représailles toutes les entreprises qui continueraient à commercer avec l’Iran (hormis les secteurs agro-alimentaire et pharmaceutique). Depuis novembre 2018, la République islamique d’Iran vit à nouveau sous un régime de sanctions. Sa monnaie a perdu les deux tiers de sa valeur en un an. Ses exportations de pétrole sont déjà passées de 2,5 millions de barils/jour à moins d’un million et demi. Confrontées aux menaces américaines, les sociétés françaises Total, Peugeot et Renault se sont retirées d’Iran. Les perspectives ne sont pas gaies pour ce pays de 80 millions d’habitants, dont les deux tiers n’étaient pas nés lorsque le Shah fut renversé en faveur de l’ayatollah Khomeiny.
Lors de la dernière Assemblée générale de l’Onu, Rohani s’est montré un ardent défenseur du multilatéralisme. Mais le soutien iranien à la légalité internationale arrive trop tard. Téhéran se retrouve face à une Amérique intraitable, inspirée autant par les Saoudiens que par les Israéliens. Pour les Iraniens, il a déjà été très douloureux de renoncer à l’arme nucléaire, que détiennent quatre puissances dans leur voisinage immédiat : la Russie, Israël, le Pakistan et les Etats-Unis (dont la Cinquième Flotte est basée au Bahreïn). Mais le président Trump réclame davantage du régime des mollahs : il veut que Téhéran renonce à perfectionner ses armes balistiques et à exercer une influence militaire régionale (présence armée en Syrie, fournitures d’armements au Hamas, au Hezbollah libanais et aux houthistes yéménites). L’Amérique se plaint plus discrètement de la présence militaire iranienne en Irak, car Washington et Téhéran y poursuivent un objectif commun : l’élimination de l’Etat islamique.
Le problème des mollahs est qu’ils ne parviennent pas choisir entre deux stratégies très différentes : retrouver une position commerciale prééminente au Moyen-Orient et en Asie centrale ou conserver, par la force des armes et des milices, une politique hégémonique sur les territoires qui les séparent de la Méditerranée.
Lassée de l’anémie économique, la jeunesse iranienne a déjà fait son choix. Au début de janvier 2018, dans des manifestations anti-régime qui se sont propagées dans la plupart des villes du pays, elle défilait en hurlant : « Pas Gaza ! Pas la Syrie ! Occupez-vous de l’Iran ! ». Les étudiants que vous rencontrez dans la rue à Téhéran vous confient tous qu’ils n’ont rien contre Israël et qu’ils ne partagent pas l’obsession antisioniste du régime. Connectés au monde extérieur grâce à Internet, ils adorent la culture occidentale.
Lorsque les manifestants de l’hiver dernier ont commencé à crier dans la rue « Mort au dictateur ! », visant l’Ayatollah Khamenei, le Guide suprême de la Révolution (dont le pouvoir, dans le système iranien, est bien supérieur à celui du Président), le régime a vraiment pris peur. La répression fut sévère (25 morts), et on ferma le réseau Telegram, utilisé par les manifestants. Depuis Rohani l’a rouvert, passant outre l’autorité judiciaire, plus conservatrice que lui.
Il y a une schizophrénie iranienne : le régime est islamique, sa jeunesse ne l’est plus. Les mosquées sont quasi-vides à la grande prière du vendredi. L’Iran est devenu le moins pratiquant des pays musulmans. Plus personne ne croit à la pertinence du principe khomeyniste du Velayat-e-faqih (le gouvernement du savant en religion). S’il ne s’adapte pas rapidement à ce que réclame sa société civile, le régime des mollahs risque de connaître bientôt le sort de feu le communisme soviétique.

Le 19/11/2018, Le Figaro

Renaud Girard

 

 

La Chine cherche le soutien des Philippines pour avancer ses pions en mer de Chine

Les promesses d’investissements de Pékin convainquent le président Rodrigo Duterte de se tenir à un ton conciliant.

Par Frédéric Lemaître et Brice Pedroletti

Publié le 21 novembre 2018, Le Monde 

Après la Papouasie-Nouvelle-Guinée et le sultanat de Brunei, le président chinois, Xi Jinping, s’est rendu mardi 20 et mercredi 21 novembre en visite aux Philippines auprès du nouveau soutien régional de Pékin : le président Rodrigo Duterte. Une première pour un chef d’Etat chinois depuis treize ans.

Autant d’étapes qui montrent que, malgré les critiques américaines, la Chine n’a aucunement l’intention de renoncer à son projet d’investissements internationaux des « nouvelles routes de la soie ». L’étape philippine est stratégiquement importante car Manille est un allié de longue date des Etats-Unis.

L’un des vingt-neuf accords conclus au cours de cette visite concerne l’exploration conjointe du pétrole et du gaz dans les eaux litigieuses de la mer de Chine du Sud, encore au stade de protocole d’accord. « Si cela aboutit, Pékin marque un point, car il cherche depuis longtemps à mettre en place ce type de cadre avec des pays riverains. Les Vietnamiens ont toujours refusé, par exemple »,explique Jean-Pierre Cabestan, de l’université baptiste de Hongkong.

Pour la Chine, l’intérêt est de préparer le terrain pour des arrangements similaires avec les autres pays riverains qui contestent ses revendications maritimes en mer de Chine du Sud. M. Xi s’est donné trois ans pour mener à bien l’élaboration d’un « code de conduite », une sorte de pacte de non-agression, discuté de longue date, avec les pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est.Rodrigo Duterte a fait montre, dès son élection en 2016, d’une grande prévenance envers Pékin : il a décidé d’ignorer la décision, tombée quelques semaines après sa victoire, de la Cour permanente d’arbitrage de La Haye qu’avait saisie son prédécesseur, Benigno Aquino, après l’occupation par la Chine de l’atoll de Scarborough en 2012, à 220 km à peine des côtes philippines. Celle-ci avait donné raison à Manille en statuant que les revendications de Pékin en mer de Chine méridionale n’avaient « aucun fondement juridique ».M. Duterte s’était justifié au motif qu’aucune entité ne pouvait faire appliquer la décision. En octobre de la même année, il se rendait à Pékin avec l’ambition ouverte d’y signer des contrats, annonçant solennellement, pour le plus grand plaisir de son hôte, sa « séparation » d’avec les Etats-Unis.

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Mounting tension in Asia

The Asia-Pacific Economic Cooperation forum, or APEC, has 21 members throughout the Pacific Rim in Asia, Australia, Oceania and the Americas. The purpose of the organization, founded on the initiative of Japan, Australia and the U.S., is to promote free trade in the region. It is a loose association and its resolutions are nonbinding.

Last week, APEC held its annual summit in Port Moresby, the capital of Papua New Guinea. For the first time in the organization’s history, no common statement could be issued. The main reason for this was that Chinese President Xi Jinping and U.S. Vice President Mike Pence used the meeting as a platform to argue over their countries’ differences.

The allegations are substantial – especially those the U.S. has made against China – and the incident made even clearer the deep rift between the two countries. Besides old issues such as China’s theft of intellectual property and its economic espionage, the main American charge was that China, with its Belt and Road Initiative (BRI), has created several dependent states.

For his part, President Xi (hypocritically) criticized U.S. protectionism. But the biggest issue for China is that it believes Washington and its allies have worked to contain it, both politically and economically. It is true that the U.S. has engaged in this strategy – and it is a normal reaction from a hegemonic power toward a rising, assertive power. It must also be acknowledged that China’s attempt to fully control the South China Sea violates international rules.

Containment strategies

The American strategy to contain China is nothing new. Access to the Pacific Ocean is controlled by U.S. allies, starting with Japan and South Korea in the north, moving south through Okinawa, Taiwan, the Philippines and Singapore. Indonesia and especially Vietnam are also concerned about China becoming too powerful. Ironically, for all these countries – except Japan and Singapore – China is their largest trading partner. In fact, the Trans-Pacific Partnership (TPP), which would have created a free trade area between the U.S., Canada and some Latin American countries with Japan, South Korea and Southeast Asian states, was also aimed at containing China in terms of trade. It was a flagship project of the Obama administration, though President Trump pulled the U.S. out of the initiative.

As a counter to China’s BRI, the U.S. proposes the “Free and Open Indo-Pacific” strategy, which heavily involves Japan, India and Australia. It is seen as an association of democracies, assuring the economic and trade links between the Pacific and the Indian Ocean. The project is especially interesting for Indonesia, the world’s fourth-largest country in terms of population, whose archipelago of thousands of islands separates the two oceans.

India plays a big role in this strategy. During the Cold War, New Delhi leaned more toward the Soviet Union than the U.S. This has changed, especially due to India’s increased concerns about China. India sees China as a threat to its territorial integrity across the Himalayas, worries about Beijing’s political and economic flirtation with Pakistan and has begun to challenge China’s rising naval presence in the Indian Ocean.

Sino-Indian tensions manifest themselves on the countries’ border along the Himalayas. But there are other indicators. Take the Maldives, for example, a group of islands that so far has only held an attraction as a tourist destination. However, islands always have a strategic use as naval bases, or as U.S. General MacArthur once put it, “unsinkable aircraft carriers.” Last December, the Maldives signed a free trade agreement with China. After a visit from Indian Prime Minister Narendra Modi, the Maldives canceled the deal on the unconvincing pretext that the trade imbalance between it and China was too big.

Another move aimed at limiting China’s hegemonic ambitions is the Quadrilateral Security Dialogue, a military collaboration initiated in 2007 by Australia, India, Japan and the U.S.

U.S. President Donald Trump and President Xi will meet next week at the G20 summit in Buenos Aires. The antagonistic rhetoric used in Port Moresby could allow both countries to climb down and make a deal. Against all G20 conventions, Presidents Xi and Trump have agreed to meet face-to-face for dinner, showing their intention to come to an understanding. Although such an agreement would only be temporary, due to the superpowers’ diverging long-term strategic interests, such meetings will become more frequent, so as to avoid escalating tensions.

22 november 2018, GIS Reports Online

Prince Michael of Liechtenstein

La cyberguerre, au cœur de la polémique Trump-Macron

En atterrissant sur le sol français le vendredi 9 novembre 2018, Donald Trump a émis un tweet peu amène pour son hôte : « Le président français Macron vient de suggérer que l’Europe développe sa propre capacité militaire, pour se protéger des Etats-Unis, de la Chine et de la Russie. Quelle insulte ! » Il se référait à une intervention d’Emmanuel Macron sur Europe 1, incitant l’Europe à se protéger de « la Russie, de la Chine et même des Etats-Unis ». Bien sûr, le président français n’a jamais redouté une quelconque agression militaire des Etats-Unis contre la France, les deux nations étant les plus vieilles alliées du monde. En fait, la citation incriminée faisait suite à une mention par Macron des menaces cyber pesant sur l’Europe.

De fait, le système informatique de l’Elysée a été piraté par la NSA (National Security Agency, institution américaine d’écoutes et d’espionnage informatique planétaires, dotée d’un budget annuel de 12 milliards de dollars). C’était en avril 2012, entre les deux tours de la présidentielle française. De même, en octobre 2011, une conversation téléphonique de la Chancelière allemande avec son chef de cabinet est interceptée et transcrite par la NSA, comme le révélera en 2015 le transfuge Edward Snowden.

Le malentendu franco-américain a été clarifié entre les deux présidents le 10 novembre. Macron a rejoint son homologue américain sur la nécessité d’une augmentation de l’effort européen de défense. Mais le président français a également insisté sur l’urgence d’une autonomie stratégique européenne. Cela concerne en particulier le nouveau et essentiel domaine de la cyberdéfense.

Dans le champ de bataille nouveau qu’est la cyberguerre, Emmanuel Macron agit de manière similaire à Charles de Gaulle sur le nucléaire. Il privilégie le développement des capacités du Commandement de Cyberdéfense (qu’on appelle « COMCYBER » à l’Etat-major des armées). Ce commandement est chargé à la fois de protéger contre tout hacking l’ensemble des systèmes informatiques de la défense française, et de mener le cas échéant des actions cyber-offensives contre tout agresseur, étatique ou non.

En même temps, le président français a présenté, le lundi 12 novembre, au « forum de gouvernance de l’Internet » à l’UNESCO, l’« Appel de Paris pour la confiance et la sécurité dans le cyberespace » . Cette déclaration a reçu l’appui de grandes entreprises du numérique et de nombreux Etats, à l’exception notable des Etats-Unis, de la Russie et de la Chine… C’est un code de conduite, que l’on peut comparer à la Convention de Genève de 1949 relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre. Il s’agit de protéger tous les acteurs civils des « activités malicieuses en ligne ». Deux exemples parmi d’autres d’activités malicieuses s’étant déjà produites : le hacking de systèmes de distribution électriques et les tentatives d’interférence dans les processus électoraux.

Au temps de la guerre froide, les Américains, les Russes et les Chinois ne pouvaient s’affronter directement en raison du risque d’escalade nucléaire ; ils se combattaient par « proxies » (Vietnamiens, Angolais, Afghans, etc.). Aujourd’hui, la cyberguerre non létale devient le mode offensif privilégié des grandes puissances. Ce nouveau champ stratégique est remarquablement analysé dans un livre publié le 9 novembre aux Editions du Cerf : Cyber, la guerre permanente, par Jean-Louis Gergorin et Léo Isaac-Dognin.

Les Etats-Unis ont vécu dans l’illusion que leur domination du cyberespace était éternelle grâce à la force de leurs multinationales du numérique et aux capacités gigantesques de la NSA. Leur réveil a été douloureux en 2012, lorsqu’ils ont constaté que l’Iran avait réussi à perturber les systèmes informatiques de grandes banques de Wall Street, en représailles au sabotage en 2010 des centrifugeuses iraniennes d’enrichissement de l’uranium par le virus américano-israélien Stuxnet. Percevant tardivement l’étendue du cyber-espionnage industriel chinois, le président Obama a obtenu en septembre 2015 du président Xi Jinping l’engagement d’arrêter ces pratiques au niveau étatique. La guerre commerciale lancée au printemps 2018 par Trump a rendu inopérant l’engagement chinois.La souffrance des Américains est devenue insupportable lorsqu’ils se sont aperçus en 2016 que les Russes avaient réussi à pirater les fichiers du parti démocrate et du directeur de campagne d’Hillary Clinton, pour diffuser leurs secrets sur les réseaux sociaux juste avant le scrutin présidentiel du mardi 8 novembre.

Soumise aux sanctions, la Russie considère les cyber-offensives comme un moyen de rétablir le rapport de force avec les Etats-Unis, dans la perspective toujours souhaitée d’un accord bilatéral.

Thierry de Montbrial : « L’Europe ne peut pas se construire contre les nations »

« Le déficit de l’Europe n’est pas un déficit démocratique mais un déficit d’efficacité », estime Thierry de Montbrial, pour qui l’avenir de la construction européenne revêt un enjeu mondial. La vision court-termiste de Donald Trump va susciter une prise de distance générale vis-à-vis des Etats-Unis.

Le XXIe siècle va-t-il s’articuler sur la rivalité entre les Etats-Unis et la Chine ?

C’est une certitude pour les trente prochaines années. Nous serons alors en 2049, c’est-à-dire le centenaire de l’avènement de Mao Zedong au pouvoir. Depuis Xi Jinping, les communistes chinois ont cessé de faire profil bas et  affichent leur intention de devenir la première puissance mondiale . Ils cherchent à se doter de tous les moyens à cette fin, en particulier technologiques et militaires. Ils ont durci très fortement leurs positions, comme sur la mer de Chine méridionale. La compétition entre les Etats-Unis et la Chine va donc dominer ces trente prochaines années. Ce n’est pas vraiment une surprise. Quand George W. Bush a été élu, le premier dossier que le patron de la CIA lui a remis concernait la rivalité avec la Chine. Cette priorité est passée au second plan après les attentats du 11 septembre 2001.

Est-ce que le président américain parvient à recréer de l’équilibre avec la Chine avec sa guerre tarifaire ?

Trump a choisi l’attaque frontale sur le plan commercial.  Il utilise la politique économique comme une arme . Mais il n’obtiendra que des résultats de court terme. Tous les pays sont en train de se rendre compte qu’ils se sont beaucoup trop mis sous la dépendance américaine. Les Chinois, dans l’affaire ZTE, ont dû supplier les Américains de les exempter de sanctions faute de quoi ils n’avaient plus accès aux semi-conducteurs.

Ne doutons pas qu’ils voudront s’organiser pour diminuer beaucoup plus vite que prévu leur dépendance vis-à-vis des Etats-Unis. L’autre aspect est monétaire. Cette prise de conscience, dont le système Swift est une facette, que toutes les transactions en dollars passent un moment ou un autre par un segment qui les met sous la dépendance du droit américain, fait que tout le monde va vouloir en sortir. Même les Européens. Ma prévision, c’est la mort du dollar comme monnaie de réserve unique dans le monde. Cela prendra peut-être vingt ou trente ans. Il faudra du temps. Mais ce sera la conséquence inéluctable de la guerre commerciale tous azimuts, de la mise en péril du multilatéralisme économique,  de l’utilisation de plus en plus systématique du dollar comme une arme , par exemple pour soumettre les alliés des Etats-Unis à une politique qu’ils désapprouvent sur l’Iran. La dénonciation unilatérale de l’accord de 2015 sape la crédibilité américaine sur le long terme. On risque de le voir au sujet de la Corée du Nord. Le moment venu pour conclure un traité, Kim Jong-un, à qui je décernerais le prix Nobel de la stratégie s’il existait, demandera des gages sur la qualité de la signature américaine. La loi du plus fort peut donner l’apparence que Trump est gagnant, en tout cas à court terme, mais à long terme ses effets seront désastreux. Le problème de Trump, c’est que sa vision est étroite.

La Corée du Nord a-t-elle une stratégie cohérente ?

Sa stratégie vient de loin. Après la mort de son père, Kim Jong-un élimine physiquement ses adversaires, y compris son demi-frère. Cela a d’ailleurs fait enrager les Chinois car ce demi-frère était leur solution de rechange. Acte II, il démontre pendant des mois qu’il a de vraies capacités nucléaires et de projection, même si elles sont loin d’être parfaites. Ayant jugé ses objectifs atteints, il se dit prêt à parler. Après avoir échangé tous les noms d’oiseaux avec Trump, les deux hommes engagent une discussion. Kim Jong-un devient persona grata. Il a eu une chance, c’est  l’arrivée de Moon Jae-in à la tête de la Corée du Sud, un homme qui veut à tout prix résoudre le problème de la péninsule coréenne . Leur entente neutralise Trump. Kim Jong-un peut maintenant prendre son temps. La Chine le courtise de nouveau. La Corée est entourée géographiquement par trois mammouths : la Chine, la Russie et le Japon. Auxquels se sont ajoutés les Etats-Unis. Les Coréens savent manipuler les géants et jouer les uns contre les autres. Séoul et Pyongyang jouent actuellement de concert. Une des conséquences est que, pour rester dans le jeu, Tokyo devra financer une partie importante de la reconstruction de la Corée du Nord. Sur le long terme, le processus conduira à une certaine marginalisation des Etats-Unis en Asie de l’Est. En tout cas, le risque géopolitique sur la Corée du Nord a beaucoup reculé.

Dans ce monde bipolaire, quel peut-être le rôle stratégique de l’Europe ?

Si la construction européenne devait commencer à se défaire, ce serait un drame pour les membres de l’Union mais aussi au niveau mondial. Il n’y a que l’Europe de l’Ouest dont la construction régionale puisse apparaître comme un contrepoids, ou à tout le moins comme une entité porteuse d’espoir pour échapper à un monde qui redeviendrait bipolaire. Voilà pourquoi l’enjeu européen est très important, pour le monde entier. Je constate que l’Europe reçoit aujourd’hui beaucoup plus d’attention que naguère.

Mais elle est fragilisée de l’intérieur par une poussée populiste…

Il faut mettre le mot populisme en italique. Il y en a plusieurs sortes. Ce qui est sûr, c’est qu’ils sont largement la conséquence de nos propres erreurs. Prenez la question de l’immigration. On peut sur le long terme considérer qu’en effet il y a un déficit démographique en Europe. Mais faire entrer en un an 800.000 immigrés en Allemagne ne pouvait qu’avoir des conséquences politiques néfastes. Quant aux pays d’Europe de l’Est, à peine sortis des fourches soviétiques, je ne vois pas au nom de quoi on pourrait les contraindre à absorber des réfugiés dont ils ne veulent pas. L’idée d’imposer des quotas me paraît personnellement mauvaise. La construction européenne doit respecter la réalité nationale. A travers mes voyages, je suis de plus en plus sensible à l’hétérogénéité des cultures nationales. Cela vaut aussi pour l’Europe du Sud, comme l’Italie. L’Europe ne peut pas se construire contre les nations.

Mais comment mieux intégrer ce que vous appelez les cultures nationales ?

Le déficit de l’Europe n’est pas un déficit démocratique mais un déficit d’efficacité. Sur le long terme, un régime politique ne peut pas rester légitime s’il n’est pas efficace. Il faut aussi prendre en compte la notion de dignité. De plus, la démocratie ne doit pas se confondre avec des modalités particulières. L’Union européenne doit réinventer les siennes.

Il faut mieux situer les problèmes. Si l’on n’avait pas élargi l’UE aux pays de l’Est, il est vraisemblable que les extrêmes droites seraient arrivées plus rapidement au pouvoir. L’évolution de la Pologne est inquiétante . Mais la situation en Hongrie est à mon avis différente. L’expression de démocratie illibérale doit être regardée à la lettre. La démocratie se définit par deux principes : la séparation des pouvoirs et des élections périodiques et non manipulées. Au début de la Constitution hongroise, on trouve une invocation à Dieu et au peuple hongrois. Cela peut choquer certains Français, mais on ne peut pas dire que cette Constitution n’est pas démocratique. Au fond, elle dit que l’individu n’est pas l’unique valeur et que le groupe existe aussi en tant que tel. Il faut réfléchir davantage à ces questions avant de lancer des anathèmes.

C’est-à-dire reconnaître les spécificités de chacun, comme celle de la Hongrie, par exemple, et en même temps aller vers un gouvernement européen plus efficace ?

Je pense que l’hétérogénéité des cultures est un fait. On ne peut pas le nier. Cela fait quarante-cinq ans que je fréquente assidûment les Allemands et je ne cesse de prendre davantage conscience de leurs différences. Il s’agit de faire vivre ensemble des peuples qui ne se confondent pas, sur une base volontaire et non pas par la contrainte comme dans les empires multiethniques d’autrefois. L’approche de la construction européenne doit être beaucoup plus réaliste et mieux tenir compte des sensibilités nationales. Et puis il faut s’attaquer aux problèmes de gouvernance : Schengen apparaît aujourd’hui comme une construction précipitée et en tout cas mal appliquée. Même s’agissant de l’euro, l’histoire aurait été différente si les règles de base avaient été respectées. Il y a beaucoup à réparer.

Est-ce qu’avec l’affaire Khashoggi, la modernisation de l’Arabie saoudite est un projet en péril, ou, à tout le moins, dont on voit les limites ?

MBS [Mohammed ben Salmane, NDLR] a été très largement propulsé par Donald Trump. Quand ce dernier a été élu, fin 2016, le Congrès cherchait à mettre l’Arabie saoudite au ban à cause du 11 septembre. Ce pays a soudain cessé d’être considéré comme un pays terroriste. Le décor a changé brutalement et on est passé à une alliance entre Etats-Unis, Arabie saoudite, Egypte et Israël. Cependant, MBS s’est singularisé par des actions peu réfléchies au Yémen, par la séquestration du Premier ministre libanais Hariri, par le maltraitement d’une partie de la famille royale et on le soupçonne maintenant d’avoir commandité  l’élimination de Khashoggi . Personne n’osait plus soulever la question des droits de l’homme en Arabie saoudite. Malgré la realpolitik, cela va changer. Quant au plan Vision 2030, il a été conçu par McKinsey et je ne suis pas sûr que la société saoudienne soit prête à une telle révolution en à peine plus de dix ans ! Sur le long terme, peut-être. On s’interroge sur le rôle du roi Salmane. Mon hypothèse est qu’il n’a pas entièrement perdu la main. Espérons que cette tragédie débouchera sur un changement de comportements. Il faut le souhaiter, car personne n’a intérêt à une crise majeure en Arabie saoudite.

Virginie Robert

Face à Kim Jong-un, le courage du président sud-coréen

15/10/2018, Le Figaro

CHRONIQUE – Moon Jae-in, qui a entamé une visite de huit jours en Europe, a eu le génie de saisir la main tendue par le dictateur nord-coréen Kim Jong-un.

C’est par la France, membre permanent du Conseil de sécurité de l’Onu, que le président sud-coréen a entamé, le 13 octobre 2018, une visite de huit jours en Europe, destinée à expliquer sa stratégie de détente et de réconciliation envers la Corée du nord. Il était important pour Moon Jae-in de parler en tête-à-tête avec Emmanuel Macron, qui jusque-là s’était montré plutôt sceptique quant aux chances de succès d’une telle démarche. Le président français avait même rappelé au Conseil de sécurité, lors de son passage en septembre à New York, son devoir de rigueur dans l’application des sanctions à l’encontre de la Corée du nord. Ces sanctions avaient pour but d’amener le régime stalinien de Pyongyang à renoncer à son programme militaire balistique nucléaire, lequel menaçait non seulement ses voisins sud-coréen et japonais, alliés des Etats-Unis, mais aussi le territoire américain lui-même.

Après l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche et de nouveaux essais militaires nord-coréens, nucléaires comme balistiques, des insultes avaient été échangées, via des twitts ou des communiqués officiels, entre le vieux président américain conservateur et le jeune leader nord-coréen communiste. En septembre 2017, à la tribune de l’Assemblée générale des Nations unies, le premier avait même menacé le second de pulvériser son pays au moindre geste hostile envers les intérêts américains en Asie. En raison de la poursuite de ses essais nucléaires, le Conseil de sécurité avait alors décidé de renforcer considérablement les sanctions commerciales contre la Corée du nord. Le 27 novembre 2017, la Corée du nord procédait à tir de missile balistique à longue portée et annonçait que ses missiles pouvaient désormais atteindre n’importe quel point du territoire américain. L’US Navy envoyait une armada au large de la péninsule.

Depuis la crise des missiles de Cuba de 1962, on n’avait jamais eu aussi peur d’un déclenchement accidentel de conflit nucléaire.

Puis, enfoui dans un discours martial de nouvel an, survint un petit geste d’apaisement de la part de Kim Jong-un. Le dictateur nord-coréen proposa d’envoyer une délégation de sportifs et d’artistes aux jeux olympiques d’hiver de Pyeongchang, en Corée du sud, commençant le 9 février 2018. Il se déclara en outre prêt à entamer un dialogue avec Séoul. Le génie du président Moon est d’avoir su parfaitement saisir cette main tendue.

Cet avocat issu d’une famille modeste ayant fui le nord communiste peu avant la guerre (1950-1953), élu à la magistrature suprême en mai 2017, est un libéral et un catholique qui n’a jamais perdu l’espoir d’une réunification progressive de la péninsule. Praticien des droits de l’homme depuis ses années d’étudiant en droit, Moon Jae-in, aujourd’hui âgé de 65 ans, a toujours été un fervent défenseur du dialogue intercoréen. Il sait que n’est pas tenable à long terme une situation de division de la péninsule entre un sud de plus en plus prospère et démocratique – un modèle de réussite en Asie -, et un Nord de plus en plus militarisé, dont la pauvreté relative de la population ne cesse de s’accroître. Il comprend que, tôt ou tard, le régime nord-coréen tournera à la catastrophe, que celle-ci prenne la forme d’une aventure militaire extérieure ou d’une implosion du pays. Il saisit que, dans les deux cas, c’est la Corée du sud qui en subirait les premières et les plus graves conséquences.

Moon aime la paix et la recherche ; il n’est pour autant ni pacifiste ni naïf. Ayant face à lui un leader nord-coréen neuf, éduqué en Suisse, Moon pense simplement qu’il faut lui donner sa chance et accepter qu’il puisse être sincère. Après la trêve olympique, il envoya une délégation en Corée du nord, qui revint avec deux cadeaux du leader suprême : une proposition de dénucléariser la péninsule et une offre de rencontre avec le président américain. Le 8 mars 2018, à la surprise générale, et sans avoir prévenu personne, Donald Trump accepta. Le tourbillon diplomatique pouvait commencer. Le 27 avril, un sommet intercoréen se tint à Panmunjom et le 12 juin c’est la rencontre Trump-Kim de Singapour. Les Nord-Coréens font des gestes concrets : ils démantèlent un site nucléaire et un site balistique. Kim, qui a médité le précédent de Kadhafi, n’abandonnera pas du jour au lendemain son arsenal nucléaire sans de solides garanties. Pragmatique, Moon le comprend parfaitement. Aujourd’hui, il milite pour que les Occidentaux fassent à leur tour un geste à l’égard de Pyongyang, en allégeant les sanctions. Il a raison. Pour que la Corée du nord poursuive dans la voie de la dénucléarisation, il faut qu’elle ait concrètement quelque chose à y gagner.

En politique étrangère, comme le général de Gaulle nous l’a montré, il faut parfois savoir prendre de grands risques. C’est ce qu’a fait Moon. Et il est déjà, pour cela, entré dans l’Histoire.

Renaud Girard

« La sécurité, première exigence des peuples »

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CHRONIQUE – Les idéologues de droite, obsédés par leur culte de la liberté, et les idéologues de gauche, obsédés par leur culte de l’égalité, oublient trop souvent que ce que les citoyens demandent en premier à l’État, c’est de leur assurer la sécurité.

En votant à 46 % pour le député populiste, ancien officier de l’armée de terre, Jair Bolsonaro, le 7 octobre 2018, au premier tour de l’élection présidentielle, et en ne donnant que 29 % des voix à l’universitaire du Parti des travailleurs Fernando Haddad, la population brésilienne a-t-elle émis un vœu de retour à la dictature militaire, telle qu’on l’a connue de 1964 à 1985? Le plus grand pays d’Amérique latine aurait-il soudain tourné fasciste, comme le laissent entendre certains commentateurs? Bien sûr que non.

La preuve en est qu’aux élections législatives – qui avaient lieu en même temps – le Parti social libéral (PSL) de Bolsonaro n’a conquis que 52 sièges sur 513, un nombre légèrement inférieur à celui du Parti des travailleurs (gauche modérée, dont le chef historique, le syndicaliste Lula, président de 2003 à 2011, a été jeté en prison pour une obscure affaire de corruption). Au demeurant, le Brésil est un pays fédéral, qui connaît de très solides contrepouvoirs et ce n’est pas demain qu’il se transformera en dictature mussolinienne.

Mais il est évident que la population brésilienne a voulu, dans ce scrutin présidentiel particulier, envoyer un message très clair aux élites politiques : ras le bol de l’insécurité ! A Rio de Janeiro, il y a des quartiers entiers où la police n’ose plus entrer, même de jour. Dans les favelas, les gangs de la drogue se font la guerre dans les rues. A Sao Paolo, la capitale économique, les automobilistes ont peur de s’arrêter aux feux rouges, de peur d’un « carjacking » par des groupes de jeunes en capuches. En 2016, le Brésil a recensé près de 62000 homicides, soit sept homicides par heure en moyenne. Le taux de meurtres pour 100000 habitants est de 25,5 au Brésil. C’est le plus haut du monde. Il est cinq fois supérieur à celui des Etats-Unis, vingt-deux fois supérieur à celui du Portugal, soixante-quinze fois supérieur à celui du Japon.

Les idéologues de droite, obsédés par leur culte de la liberté, et les idéologues de gauche, obsédés par leur culte de l’égalité, oublient trop souvent que ce que les citoyens demandent en premier à l’Etat, c’est de leur assurer la sécurité. Pour leur personne, pour leur famille, pour leurs biens. L’Etat ne se définit-il pas en effet comme l’institution disposant du monopole de la contrainte légitime ? Quand un Etat n’est plus capable d’assurer la sécurité à ses citoyens, il ne mérite même plus le nom d’Etat. Sans sécurité, les valeurs républicaines de liberté et d’égalité ne signifient plus rien, car privées de terrain d’application.

Lorsque, en 2003, les Américains ont envahi l’Irak pour y renverser la dictature politique de Saddam Hussein, ils se sont félicités d’y introduire la démocratie. De fait, en janvier 2005, eut lieu l’élection d’une assemblée nationale constituante, où chaque Irakien a pu voter comme il l’entendait. Mais comme ils n’ont pas été capables, parallèlement, de maintenir la sécurité dans les rues, les Américains ont vite été détestés par la grande majorité de la population. Une mère de famille n’a que faire de son nouveau droit de vote si elle a peur d’envoyer ses enfants à l’école. Les Occidentaux néoconservateurs ont mis longtemps à comprendre que, pour les peuples d’Orient, il y avait pire que la dictature politique : l’anarchie. Et pire que l’anarchie : la guerre civile.

Aux Philippines, Ricardo Duterte, le président populiste élu à l’été 2016, mène, avec des méthodes expéditives, une guerre sans merci aux trafiquants de drogue et aux toxicomanes (qui a déjà fait plus de 4000 morts). Il dit vouloir éviter que l’archipel ne devienne un narco-Etat. Les fréquentes bavures de sa police n’ont pas rendu le président impopulaire. Il récolte des taux de popularité supérieurs à 75%. La vérité est que la population, lasse de la criminalité engendrée par la drogue, est prête à payer le prix fort pour l’extirper du pays.

Depuis peu, les électorats d’Europe occidentale sont eux aussi tentés par différents votes populistes. La faute en revient aux gouvernements qui ont dirigé le continent depuis la fin des années soixante, qu’ils fussent inspirés par le libéralisme économique ou par la social-démocratie. Naïfs quant à la nature humaine, ils ont laissé se développer des quartiers où la loi de la jungle est venue supplanter les lois républicaines. Quand la population des quartiers populaires leur a demandé une réponse à poigne, ils ont fait preuve de pusillanimité, par peur d’être traités de « fascisants » par la bien-pensance bourgeoise (protégée, elle, par son argent). Ils n’ont pas compris que, pour tuer les tentations autoritaires, les démocraties devaient à tout prix assurer à leurs administrés le premier des droits de l’homme, qui est la sécurité.

China, Japan, and Trump’s America

 

Japan’s anxieties about Donald Trump’s « America First » orientation and protectionist policies are not surprising. When two allies’ defense capacities are not symmetrical, the more dependent party is bound to worry more about the partnership.

CAMBRIDGE – The key strategic issue in East Asia is the rise of Chinese power. Some analysts believe that China will seek a form of hegemony in East Asia that will lead to conflict. Unlike Europe, East Asia never fully came to terms with the 1930s, and Cold War divisions subsequently limited reconciliation.

Now US President Donald Trump has launched a trade war with China and negotiations with Japan that take aim at Japan’s trade surplus with the United States. While the recent announcement of bilateral talks postpones Trump’s threat of auto tariffs against Japan, critics worry that Trump may push Japan closer to China, whose president, Xi Jinping, is scheduled to hold a summit with Prime Minister Shinzo Abe later this month.

The balance of power between Japan and China has shifted markedly in recent decades. In 2010, China’s GDP surpassed Japan’s as measured in dollars (though it remains far behind Japan in per capita terms). It is difficult to remember that a little over two decades ago, many Americans feared being overtaken by Japan, not China. Books predicted a Japanese-led Pacific bloc that would exclude the US, and even an eventual war with Japan. Instead, during President Bill Clinton’s administration, the US reaffirmed its security alliance with Japan at the same time that it accepted the rise of China and supported its admission to the World Trade Organization.

In the early 1990s, many observers believed that the US-Japan alliance would be discarded as a Cold War relic. Trade tensions were high. Senator Paul Tsongas campaigned for president in 1992 on the slogan, “The Cold War is over and Japan has won.” The Clinton administration began with Japan-bashing, but after a two-year process of negotiation, Clinton and then-Prime Minister Ryutaro Hashimoto issued a declaration in 1996 that proclaimed the alliance to be the bedrock of stability for post-Cold War East Asia.

There was a deeper level of malaise, however, and although it was rarely expressed openly, it related to the Japanese concern that it would be marginalized as the US turned toward China. When I was involved in negotiating the reaffirmation of the alliance in the mid-1990s, my Japanese counterparts, seated across a table festooned with national flags rarely discussed China formally. But later, over drinks, they would ask whether America would shift its focus from Japan to China as the latter grew in strength.

Such anxieties are not surprising: when two allies’ defense capacities are not symmetrical, the more dependent party is bound to worry more about the partnership. Over the years, some Japanese have argued that Japan should become a “normal” country with a fuller panoply of military capabilities. Some experts have even suggested that Japan drop some of its anti-nuclear principles and develop nuclear weapons. But such measures would raise more problems than they would solve. Even if Japan took steps to become a “normal” country (whatever that term may imply), it would still not equal the power of the US or China.

Today, Japan has a new set of concerns about American abandonment. Trump’s “America First” orientation and protectionist policies pose a new risk to the alliance. Trump’s withdrawal from the Trans-Pacific Partnership was a blow to Japan. While Abe has skillfully played to Trump’s ego to deflect conflict, acute differences remain. The Trump administration’s imposition of steel and aluminum tariffs on national security grounds surprised Abe and has fueled disquiet in Japan.

The Trump administration has also suggested that US allies in Asia should do more to defend themselves and openly questioned the value of forward deployed US forces. Some analysts wonder whether Trump’s actions will force Japan to hedge its bets and edge toward China. But that is unlikely at this stage. While such options may be explored, they will remain limited, given Japanese concerns about Chinese domination. The US alliance remains the best option – unless Trump goes much further.

Thus far, the alliance remains remarkably strong. Abe reached out early to President-elect Trump, meeting him first at Trump Tower in New York and then during visits to Washington, DC, and Mar-a-Lago, Trump’s Florida residence. The Abe-Trump relationship allowed the Pentagon to maintain close cooperation on security matters. North Korea helped focus the alliance’s attention and provided an opportunity for Trump to assure Japan that the US was behind Japan “100%.”

Abe and Trump both supported the “maximum pressure” strategy against North Korea, working hard to build international support for United Nations sanctions. Meanwhile, Japan announced a major new investment in ballistic missile defense and cooperated in its joint development. On the other hand, Trump’s surprising reversal in attitude toward North Korean leader Kim Jong-un after their Singapore summit in June raised Japanese concerns about a US deal focusing on intercontinental missiles and ignoring the medium-range missiles that could reach Japan.

Trump’s rhetoric about burden sharing has also raised concern. While Japan’s defense expenditure is little above 1% of GDP, it contributes significant host-country support. The US Department of Defense estimates suggest that the Japanese government pays roughly 75% of the cost of supporting US forces in Japan. This year alone, the Japanese government budgeted ¥197 billion ($1.7 billion) for cost sharing, ¥226 billion ($2 billion) for the realignment of US forces, and ¥266 billion ($2.3 billion) in various types of community support, among other alliance-related expenditures.

As the Clinton administration recognized a quarter-century ago, China’s rise created a three-country balance of power in East Asia. If the US and Japan maintain their alliance, they can shape the environment that China faces and help moderate its rising power. But that will depend on whether the Trump administration successfully maintains the US-Japan alliance.

Le capital-investissement défend sa contribution positive en Afrique

03 octobre 2018 à 17h41 | Par 

Les acteurs du capital-investissement africain, réunis à l’occasion d’une conférence à Paris le 2 octobre, ont rappelé l’importance de leur rôle dans le financement des économies du continent, dans un contexte où les sommes mobilisées sont en recul de presque 60 % depuis 2015.

« Les controverses actuelles sur le surendettement de l’Afrique sont un discours de lobotomie complète. Oui, certains États sont en train de se surendetter, mais les économies africaines dans leur ensemble ne sont pas financées du tout. »

C’est une position forte et à rebours du discours habituel qu’a adoptée le financier Lionel Zinsou, ancien Premier ministre du Bénin et coprésident de la société de conseil SouthBridge, dans son discours d’ouverture de la nouvelle conférence « Opportunités du capital-investissement en Afrique », organisée le 2 octobre au siège du cabinet Deloitte, à la Défense, dans l’ouest de Paris.

5 % DES ENTREPRISES AFRICAINES OBTIENNENT LES FINANCEMENTS SOUHAITÉS

Devant une trentaine de participants, dont plusieurs poids lourds du métier en Afrique – dont Marc Rennard, PDG d’Orange Digital Ventures, Stéphane Bacquaert, directeur de Wendel Africa, Aziz Mebarek et Ziad Oueslati, cofondateurs d’AfricInvest, Laurent Demey, cogérant de Amethis et vice-président du Club Afrique de l’association professionnelle France Invest, et Johnny El Hachem, directeur général de Edmond de Rothschild Private Equity -, le dirigeant franco-béninoisa rappelé qu’à peine « 5 % des entreprises africaines obtiennent les financements souhaités pour leurs investissements et leurs besoins en fonds de roulement. »

Face à ces lacunes, a insisté Lionel Zinsou, le capital-investissement apporte une contribution positive (« une utilité marginale supérieure ») au financement de l’économie réelle en Afrique. Selon le vétéran du métier, longtemps président du fonds d’investissement français PAI Partners, le private equity « finance la croissance du continent et la création d’emploi, participe à l’amélioration de la gouvernance et constitue une des solutions au problème essentiel de l’expansion de l’Afrique. »

Plus de 150 sociétés de capital-investissement, dont 62 % basées en Afrique

Le secteur compte désormais plus 150 entreprises, dont 62 % comptent leur siège sur le continent, a rappelé Simon Ponroy, économiste à France Invest. Une demi-douzaine de ces sociétés, dont le panafricain Emerging Capital Partners, les britanniques Helios Investment Partners et Development Partners International comptent plus de 1 milliard de dollars d’actifs.

CES PERFORMANCES SONT TRÈS DÉPENDANTES DE ‘MÉGA-LEVÉES’

Le plaidoyer pro domo du private equity africain intervient dans un contexte délicat, marqué par la mise en liquidation du colosse dubaïote Abraaj (1,1 milliard de dollars d’actifs en Afrique), l’échec de l’aventure africaine du géant américain KKR, qui n’a réalisé qu’une seule transaction en trois ans, et les atermoiements du titan new-yorkais Carlyle, qui se plaint du montant de ses frais généraux sur le continent. De plus les sommes mobilisées ont baissé à 1,94 milliard de dollars en 2017, loin des 4,8 milliards de dollars obtenus en 2015. « Ces performances sont très dépendantes de ‘méga-levées’, parfois supérieures à un milliard de dollars, bouclées par quelques leaders du métier », a rappelé Simon Ponroy.

« L’écosystème se développe en Afrique, avec l’émergence de plus de fonds spécialisés, une meilleure qualité des équipes de gestion », a insisté Stéphane Bacquaert. Autre preuve du dynamisme du secteur, selon ses promoteurs, de plus en plus de gestionnaires d’épargne africains se laissent séduire par leurs offres.

C’est le cas notamment de la Caisse nationale de prévoyance sociale de la Côte d’Ivoire (CNPS), représentée à la conférence par son directeur général Denis Charles Kouassi, qui a confié près de 27 milliards de F CFA (41 millions d’euros) à des véhicules d’investissements dont ceux d’Amethis, de Yelen et d’AfricInvest. « Nous allons accroître les ressources dédiées à ce secteur. Et il n’est pas exclu, à moyen terme, que nous mettions en place une structure spécifique dédiée à ce type d’investissement », a dévoilé le dirigeant ivoirien.

Jean Pisani-Ferry : « 100 % de dette publique, ce n’est pas prudent »

LE MONDE |  |Par Jean Pisani-Ferry (Economiste)

Dans sa chronique, l’économiste pointe les risques pour la France d’atteindre un niveau d’endettement proche de 100 % du PIB.

Tendances France. La dette publique française frôle aujourd’hui 100 % du produit intérieur brut (PIB) du pays. Il est inévitable – et salutaire – que l’approche de ce seuil suscite un débat. Sommes-nous en danger ? Faut-il réduire la dette ? En suivant quelle stratégie ?

Commençons par l’évidence : il n’y a pas de risque immédiat. Nous sommes toujours dans une période de déficits sans pleurs, parce que l’Etat français emprunte sur dix ans à un taux nettement inférieur à 1 % qui ne compense même pas l’inflation. Tendanciellement, si cela continue, la charge des intérêts représentera moins d’un point de PIB, comme à la fin des années 1970 lorsque la dette ne pesait que 20 % du PIB. Certes, les taux vont remonter, mais sans doute lentement et, surtout, la maturité moyenne de la dette est de plus de sept ans : quand bien même la normalisation serait brutale, l’impact sur la charge annuelle d’intérêts demeurera graduel.

Cela n’implique pourtant pas de céder à l’insouciance. Pour deux raisons. La première est que la dette n’a guère servi à augmenter l’actif public. Il serait légitime de nous endetter pour équiper le pays, investir dans les compétences ou accélérer la transition écologique. Mais nous n’osons pas le faire. En revanche, nous le faisons sans vergogne pour consommer. Or, rien ne justifie de léguer aux générations futures un double passif, financier et écologique.

La deuxième raison est que la trajectoire de la dette est répétitive et malsaine : elle augmente par à-coups lors des récessions (+ 21 points au début des années 1990, + 9 points au début des années 2000, + 35 points entre 2007 et 2018) et au mieux se stabilise lors des périodes d’expansion. Si nous n’agissons pas, nous devrons lors de la prochaine récession choisir entre rester impuissants et franchir un nouveau palier d’endettement.

Cible de réduction

Jusqu’où un Etat peut-il s’endetter ? Ce n’est pas facile à dire. Aux lendemains…

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Europe’s Critical Election

 

Ahead of the European Parliament election in May 2019, nationalist parties across Europe are unifying behind a message that is clear, forceful, and, for many, compelling. If Europe’s defenders are to win, they will need to offer a vision that is similarly powerful – and not hide behind French President Emmanuel Macron.

MADRID – Discussions about Europe-wide elections are invariably infused with expectations of dramatic change that rarely, if ever, are met. But the upcoming European Parliament election in May 2019 may break the mold, as it could determine the outcome of an ongoing struggle between two visions for Europe’s future: progress toward greater openness and interconnectedness or a reversion to divisive and blinkered nationalism.

Previous European Parliament elections have been preceded by promises that the vote would mean something to the electorate. But, whatever structural and institutional changes have occurred, from increasing the body’s powers to introducing new campaigning procedures, the results have remained lackluster.

With voters unconvinced that European Parliament elections have any concrete impact, domestic political calculations dominate, with citizens using their votes – when they bother to vote at all – to send signals to national parties and punish incumbents. In fact, even as the European Parliament has gained more authority, voter turnout in European elections has steadily decreased since 1979, reaching a low of 42.5% in 2014.

But this year, the election really does matter. An increasingly organized coalition of nationalist forces that are hostile to European integration – and, indeed, to European values – has been gaining traction and cohesion. These forces include Fidesz in Hungary, the Law and Justice (PiS) party in Poland, Germany’sAlternative für Deutschland, the Swedish Democrats, the League in Italy, Marine Le Pen’s National Rally (formerly the National Front) in France, and Geert Wilders’ Dutch Freedom Party.

Opposition to the EU is not new; nor are nationalist parties. But these parties have deepened their cooperation with one another since the last European elections in 2014, particularly on the issue of migration. In August, Hungarian Prime Minister Viktor Orbán and Italian Interior Minister Matteo Salvini held a “summit” where they called for a united front against French President Emmanuel Macron’s pro-integration vision of Europe.

Beyond the clear irony of the far right’s internationalism, this unification of nationalist parties into a Europe-wide force is highly dangerous – not least because these forces have coalesced around a clear, forceful, and, for many, compelling message. To face the challenges of the future, they declare, Europe must return to a less uncertain time, when sovereign countries’ closed borders kept foreigners out.

The nostalgia on which these leaders successfully campaign cannot serve as a basis for policy, because the world they describe never existed. But those who recognize the far-reaching benefits of an open and forward-looking EU are struggling to make their case in a persuasive way. They, too, are focusing on the past, often citing a laundry list of accomplishments; but their version comes across as technical and bloodless. In order to convince a skeptical public that Europe’s strength lies in cooperation, European leaders need to focus on the future. They cannot simply rely on past successes. We have peace and prosperity and no more data roaming charges, but what’s next?

“More unity” is not an adequate answer, even if some treat it as one. In general, abstract and lofty visions are not good enough to compete with the simple and potent message espoused by nationalists.

This does not, however, mean that Europe’s defenders should attempt to hijack the nationalists’ vocabulary to serve a pro-European agenda, as European Commission President Jean-Claude Juncker did when he called for “European sovereignty” – whatever that is – in his recent state of the union address. Pro-European leaders cannot forge a new way forward by making themselves look more like nationalists; on the contrary, they must show just how different they are.

This means combining ideals with tangible proposals for Europe’s development. It means showing why the EU is the most viable and appealing vehicle to take Europe into an ever-more prosperous future. It means proving that the EU is better equipped than individual states to address contemporary challenges, particularly in a world in which a critical mass of power (military, economic, demographic) is increasingly necessary to have any room for maneuver. And it means convincing citizens that the EU, as a community of nations, offers the best chance to strengthen economic resilience, foster innovation, and preserve Europe’s cultures.

Macron has become the poster child for this approach. Too often, however, his is a lone voice; his fellow defenders of Europe nod quietly in agreement, but are unwilling to take political risks of their own. In the months leading up to the May election, all who believe in a European approach to European problems must step up.

The campaign is just beginning, so there is still time to change the narrative and put Europe on a path toward greater influence and increased prosperity. But the window of opportunity is closing fast. Unless those who understand the value of the EU wake up soon and respond effectively to their increasingly unified nationalist adversaries, it will be too late.

Europe faces a stark choice: Will its nation-states move forward together, building strength upon strength, or will they take separate paths, each leading to mediocrity? Believe it or not, the outcome of the upcoming election really does matter. For Europe, the stakes could not be higher.

The Case Against Climate Despair

 

The growing severity and frequency of extreme-weather events suggests that climate scientists’ nightmare scenarios must be taken seriously. Fortunately, rapid advances are being made in clean-energy technology and carbon-neutral forms of living.

STOCKHOLM – Heat waves and extreme-weather events across the Northern Hemisphere this summer have brought climate change back to the forefront of public debate. Early analyses strongly suggest that natural disasters such as Hurricane Florence – which barreled into the US East Coast this month – have been exacerbated by rising global temperatures. Though US President Donald Trump has reneged on the 2015 Paris climate agreement, the rest of the world is becoming increasingly convinced of the need to limit greenhouse-gas (GHG) emissions.

Last month, a group of climate scientists published a report in the US Proceedings of the National Academy of Sciences warning that the planet could be on a path to becoming a “hothouse” that may not be habitable for humans. The Earth has already registered the highest temperatures since the last Ice Age. But, as the report notes, what we are experiencing today will be nothing compared to what is in store if average global temperatures surpass 2° Celsius above pre-industrial levels.

At that point, the authors write, “[global] warming could activate important tipping elements, raising the temperature further to activate other tipping elements in a domino-like cascade that could take the Earth System to even higher temperatures.” The scientific debate about climactic tipping points and nightmare scenarios is ongoing. But no one can say for certain that the risks outlined in the “Hothouse Earth” report are not real.

But there is another risk: that warnings such as these will lead to despair. Numerous reports have already concluded that it will be exceedingly difficult to meet the targets outlined in the Paris agreement. But to conclude that the situation is hopeless is not just dangerous; it is also factually incorrect. After all, political and technological developments that are currently underway offer grounds for genuine hope.

At the Global Climate Action Summit in San Francisco, California, this month, there was plenty of talk about the numerous alarming reports that have come out in recent months and years. But the real focus was on the Exponential Climate Action Roadmap, a major new study showing that progress in the use of non-fossil-fuel technologies is advancing not just linearly, but exponentially.

You may not realize it, but solar- and wind-power usage is doubling every four years. If that continues, at least half of global electricity production could come just from these two forms of renewable energy by 2030. And there is no good reason to think that progress couldn’t accelerate further. Just in the past few years, there have been rapid advances in solar-energy technologies and energy storage.

The Global Commission on the Economy and Climate estimates that $90 trillion will be invested in new infrastructure around the world over the course of the next 15 years. Owing to the new technologies that are now emerging – not just in energy but in the digital domain as well – humanity could have an historic opportunity to leapfrog into far more sustainable, carbon-neutral patterns of habitation.

Moreover, in addition to the far-reaching advances in technology, there is also growing private- and public-sector awareness of the importance of factoring sustainability into all decisions. New approaches to energy, industry, architecture, city planning, transportation, agriculture, and forestry have the potential to halve GHG emissions by 2030. But that will happen only if a broad coalition of decision-makers decides to deploy them.

Fortunately, governments and major corporations have begun to show leadership on these issues. As a result, GHG emissions have already peaked in 49 countries that account for 40% of global emissions; and ten countries have even committed to being carbon-neutral by 2050. California and Sweden say that they will produce zero net emissions by 2045.

The Exponential Climate Action Roadmap shows that we do still have a say over our climate future. The dangers that await us cannot be denied. If GHG emissions and rising temperatures continue on their current trajectories, we could well reach the point at which future generations will have to endure “Hothouse Earth,” assuming that they can survive at all.

But just as recent scientific work has underscored the dangers of climate change, so, too, has it shown the way forward. There is hope in the rapid diffusion of new technologies, and in the growing awareness of the problem within industry, government, and civil society. If we can ensure exponential technological progress and marshal the necessary political will, we can tackle the climate crisis. A “Stable Earth” is still within our reach.

Renaud Girard : «Pourquoi Donald Trump veut aller jusqu’au bout sur la Chine»

25 septembre 2018

Trump veut aller jusqu’au bout sur la Chine

Le porte-parole du gouvernement chinois vient d’accuser les Etats-Unis d’avoir commencé « la plus grande guerre commerciale de l’Histoire économique ». Le lundi 24 septembre 2018, sont entrés en vigueur les nouveaux droits de douane imposés par le président Trump aux produits chinois. 200 milliards de dollars d’exportations chinoises vers les Etats-Unis sont touchées (sur un total de plus de 500 milliards par an). La surtaxe décidée par la Maison Blanche est de 10%, mais elle grimpera à 25% en 2019 si les deux gouvernements ne parviennent toujours pas à s’entendre. Les Chinois ont épuisé leurs moyens, dans la mesure où leurs importations d’Amérique ne dépassent pas les 130 milliards annuellement.

L’offensive tarifaire du président Trump contre la Chine est une politique qui a reçu un soutien substantiel des parlementaires américains (démocrates comme républicains) et des alliés européens des Etats-Unis. La chambre de commerce européenne en Chine a expliqué que la cause première de cette guerre commerciale sino-américaine est l’ouverture incomplète des marchés chinois aux biens et services en provenance de l’étranger.

Les autorités chinoises ne peuvent se plaindre de ne pas avoir été prévenues. Depuis qu’il a été élu, Donald Trump leur a demandé de modifier leurs pratiques commerciales, notamment lors du sommet de Mar-a-Lago (Floride) d’avril 2017. Au forum économique de Davos, en janvier 2018, Trump a déclaré : « Nous sommes en faveur du libre-échange, mais il doit être juste, et il doit être réciproque ! » Or les Américains estiment que la Chine, depuis trente ans, n’a jamais fait preuve de réciprocité dans son commerce avec les Etats-Unis, et qu’elle s’est montrée de surcroît très injuste.

Washington ne reproche pas seulement à Pékin l’énormité du déséquilibre commercial entre les deux nations. Les Américains accusent les Chinois de violer les règles de l’OMC (dont la Chine est membre depuis 2001) en ayant systématiquement recours au dumping et aux aides d’Etat camouflées. Trump est le premier dirigeant occidental à avoir dénoncé les stratégies chinoises de pillage technologique et d’intimidation des investisseurs occidentaux en Chine. Tel industriel souhaitant s’installer en Chine est prié de constituer une joint-venture avec un industriel local. Au début, les relations avec l’associé chinois sont merveilleuses, les usines démarrent, la distribution suit, les clients apprécient, l’investisseur occidental gagne de l’argent. Mais dans une deuxième phase, l’associé chinois se saisit d’un prétexte pour quitter soudainement la joint-venture. Les Occidentaux le retrouveront bientôt dans une autre usine, fabriquant des produits similaires, grâce à toute la technologie qu’il a auparavant volée. S’ils osent se plaindre, le Ministère de l’Intérieur les menace de leur retirer sur le champ leurs titres de séjour.

Trump a décrété que les Chinois ne voleraient plus jamais la technologie américaine. La Chine va-t-elle se soumettre aux demandes américaines ? Va-t-elle réagir de manière rationnelle ou émotionnelle ? Rationnellement, les Chinois seraient bien avisés de faire des concessions car ils ont davantage besoin de l’Amérique (en termes de formations universitaires, de technologie à importer et de marchés à l’export) que l’Amérique a besoin d’eux. Les 2000 milliards de bons du trésor américain que détient la Chine ne peuvent constituer pour elle un moyen de pression. Les vendre massivement reviendrait pour elle à se tirer une balle dans le pied, par dépréciation de ses actifs. Et les Américains trouveraient toujours preneurs ailleurs pour leurs obligations libellées en dollars.

Mais une dernière mesure américaine, d’une toute autre nature, pourrait très bien déclencher une réponse émotionnelle, c’est-à-dire nationaliste, de la part des Chinois. Le 20 septembre 2018, en vertu des lois américaines d’embargo votées après l’annexion de la Russie et après l’affaire Skripal, l’EDD, qui est l’organisme chinois chargé d’améliorer la technologie des armements de l’APL (Armée populaire de libération) et son chef, Li Shangfu, ont été sanctionnés pour avoir acheté à la firme d’Etat russe Rosoboronexport une dizaine de chasseurs bombardiers Sukhoi 35 ainsi que des missiles sol-air S-400. Leurs comptes sont gelés aux Etats-Unis et interdiction est faite à toute personne morale ou physique américaine d’être désormais en affaires avec cette personne et cette entité chinoises. L’Amérique a encore étendu l’extraterritorialité de son droit, car la transaction sino-russe n’était pas libellée en dollars…

Les Chinois vont-ils se sentir victimes de traités inégaux comme au XIXème siècle et se rebeller ouvertement contre l’Amérique ? C’est possible, car ils ont exigé d’elle publiquement le retrait de ces sanctions. Qui cédera le premier ? La réponse n’est pas pour demain. Ce n’est que le début d’un très long bras de fer…

Renaud GIRARD