L’épidémiologiste juge préoccupante la hausse des hospitalisations en France et en Espagne, mais souligne que la mortalité reste faible à ce stade en Europe.
Par Yves Bourdillon
Publié le 15 sept. 2020 à 17:21 | Mis à jour le 16 sept. 2020 à 8:39
Quelle est votre évaluation de la dynamique du Covid-19 en Europe ?
Nous avons bénéficié d’un répit estival bienvenu, mais constatons effectivement depuis peu une circulation exponentielle du virus en France, Espagne, Royaume-Uni, Autriche, Suisse, etc. Ce qui peut s’expliquer en partie par une politique de tests très intense, sans précédent historique. La notion de nouveaux « cas » manque par ailleurs d’une définition précise, puisqu’elle mêle aujourd’hui des malades plus ou moins symptomatiques et sévères, des cas contagieux mais asymptomatiques, ainsi que des personnes positives au test PCR dans les muqueuses nasales, mais avec une charge virale insuffisante pour les rendre contagieux. Pour autant, la hausse des hospitalisations en France et en Espagne nous oblige à envisager un scénario inquiétant, qui serait le résultat d’un « ensemencement » du virus sur tout le territoire, après une première phase d’émergence de « clusters ».
La fameuse deuxième vague ?
Plus précisément, nous sommes peut-être en train d’observer les fondements de ce qui deviendra une deuxième vague. Ce scénario d’une seconde vague plus homogène sur le territoire et peut-être l’Europe entière impose de s’y préparer, de mettre sur la table toutes les mesures nécessaires s’il survenait à l’automne.
Dans un autre scénario, plus optimiste, au vu du fait que, par ailleurs, cette flambée n’est pas observée partout en Europe, l’épidémie pourrait continuer à se propager seulement sous la forme de clusters, contrôlables tant que l’infection restera limitée aux jeunes de moins de 40 ans, lesquels développent très rarement des complications graves. Ce scénario s’il perdurait tout l’hiver permettrait de faire face comme cet été en Europe sans mesures trop contraignantes.
Comment expliquez-vous le décalage paradoxal entre flambée de cas et stagnation des décès partout en Europe, sauf dans quelques régions ?
En effet, ce décalage me pousse d’ailleurs à ne pas parler encore, malgré la progression des cas depuis presque deux mois, de deuxième vague, dont la définition devrait se restreindre aux situations de hausse importante et concomitante des décès. On ne teste pas non plus de la même manière qu’en mars, au risque que les données bénéficient d’un phénomène de loupe, avec de nombreux cas asymptomatiques. J’irais jusqu’à dire que si cet été on n’avait pas disposé de tests PCR massifs et si on n’avait pas été sensibilisés auparavant par la vague du printemps, on n’aurait seulement pas repéré le phénomène épidémique actuel.
Pourquoi cette différence paradoxale entre dynamique des cas et des décès ? Je ne crois pas qu’une souche moins létale aurait supplanté les autres. Certes les méthodes de réanimation, notamment de ventilation, ont évolué en tirant les leçons du printemps. De nouveaux traitements pour les cas graves, comme la dexaméthasone , s’avèrent aussi efficaces. Cela explique peut-être en partie pourquoi moins de patients décèdent dans les services d’urgence, alors qu’en mars, au moins 20 % des gens hospitalisés pour Covid en mouraient. Mais cela n’explique pas pourquoi beaucoup moins de cas sont hospitalisés qu’au printemps.
Du coup, quelle serait l’explication ?
La raison principale de cette faible sévérité cet été en Europe, c’est l’âge – moins de 40 ans – des personnes contaminées. Les personnes âgées se méfient et se protègent sans doute beaucoup mieux que cet hiver, les jeunes testés plus largement entrent peut-être moins en contact avec des parents à risque, lorsqu’ils se savent positifs. Si tout restait comme en juillet-août, il n’y aurait pas de raison de s’inquiéter particulièrement d’une pathologie moins grave que bien des infections respiratoires virales banales. Toutefois, la hausse soudaine des hospitalisations en réanimation depuis une dizaine de jours en Paca oblige à une vigilance certaine.
Paris et Londres mettent l’accent depuis quelques jours moins sur la prophylaxie du « tout masque » que, de nouveau, sur une restriction des rencontres…
Si on veut freiner l’épidémie, on ne peut jouer que sur deux paramètres : la probabilité d’une part que des cas transmettent le virus, donc en misant sur le port du masque qui, tout seul, n’est pas la panacée, et impose d’être bien porté, le lavage des mains, la distanciation sociale, la ventilation des locaux. D’autre part, on doit diminuer le nombre de contacts entre les bien portants et les porteurs du virus, avec la promotion du télétravail, le moindre recours aux transports publics, la fermeture éventuelle d’écoles, la réduction de la jauge des réunions. Ainsi, les Suédois, souvent présentés comme désinvoltes, avaient fixé très tôt une limite de 50 personnes pour les rassemblements. Le choix n’est donc pas entre le masque et la limite des rassemblements, ce sont deux mesures complémentaires légitimes pour limiter les conséquences d’une flambée épidémique, si elle devait se produire.
Prenez-vous au sérieux la théorie selon laquelle la baisse de la mortalité s’expliquerait par le fait que nous ne serions plus très loin d’une immunité collective ?
Je suis sceptique à propos d’une telle hypothèse aujourd’hui . Aucune enquête de séroprévalence, c’est-à-dire de gens ayant des anticorps, n’établit que nous nous approchons du seuil de 50 à 60 % de personnes déjà infectées à partir duquel, effectivement, le virus ne parviendrait plus à circuler aussi facilement. La proportion de personnes d’ores et déjà immunisées est, selon toutes les enquêtes, de 10 % maximum, sauf dans quelques villes comme Manaus, Bombay ou Bergame. Il n’est théoriquement pas impossible que la proportion réelle soit un peu supérieure, mais l’hypothèse que nous ayons déjà atteint un seuil d’immunité collective n’est pas compatible avec la circulation du virus constatée actuellement dans de larges parties d’Europe. Nous serons peut-être à ce seuil au printemps si l’épidémie est intense cet automne et en hiver.
Yves Bourdillon
PARIS – It would be foolish to start celebrating the end of US President Donald Trump’s administration, but it is not too soon to ponder the impact he will have left on the international economic system if his Democratic challenger, Joe Biden, wins November’s election. In some areas, a one-term Trump presidency would most likely leave an insignificant mark, which Biden could easily erase. But in several others, the last four years may well come to be seen as a watershed. Moreover, the long shadow of Trump’s international behavior will weigh on his eventual successor.
On climate change, Trump’s dismal legacy would be quickly wiped out. Biden has pledged to rejoin the 2015 Paris climate agreement “on day one” of his administration, achieve climate neutrality by 2050, and lead a global coalition against the climate threat. If this happens, Trump’s noisy denial of scientific evidence will be remembered as a minor blip.
In a surprisingly large number of domains, Trump has done little or has behaved too erratically to leave an imprint. Global financial regulation has not changed fundamentally during his term, and his administration has flip-flopped regarding the fight against tax havens. The International Monetary Fund and the World Bank have carried on working more or less smoothly, and Trump’s furious tweeting did not prevent the US Federal Reserve from continuing to act responsibly, including by providing dollar liquidity to key international partners during the COVID-19 crisis. True, Trump has repeatedly spoiled international summits, leaving his fellow leaders flummoxed. But such behavior has been more embarrassing than consequential.
But, Trump will be remembered for his trade initiatives. Although it has always been difficult to determine the real aims of an administration beset by infighting, three key goals now stand out: reshoring of manufacturing, an overhaul of the World Trade Organization, and economic decoupling from China. Each objective is likely to outlast Trump’s tenure, at least in part.
Reshoring looked like a costly fantasy four years ago, and it still is in many respects. As my Peterson Institute colleague Chad Bown has documented, Trump’s chaotic trade war with the world has often hurt US economic interests. But reshoring as a policy objective has gained new life after the pandemic exposed the vulnerability entailed by depending exclusively on global sourcing. Biden has endorsed the idea, and “economic sovereignty” – whatever that means – is now a near-universal new mantra.
US Trade Representative Robert Lighthizer claims that a “reset” of the WTO has been a high priority for the administration. If so, it has made some headway. The other G7 countries now share the long-standing US dissatisfaction with the WTO’s leniency toward China’s government subsidies and weak intellectual-property protection. There is also a recognition that some US grievances against WTO dispute-settlement procedures (and in particular the so-called Appellate Body) are valid. But whether the battle ends with a reset or the deconstruction of the multilateral trading system remains to be seen.
The major watershed is US-China relations. Although bilateral tensions were apparent before Trump’s election in 2016, nobody spoke of a “decoupling” of two countries that had become tightly integrated economically and financially. Four years later, decoupling has begun on several fronts, from technology to trade and investment. Nowadays, US Republicans and Democrats alike view bilateral economic ties through a geopolitical lens.
It is not clear whether Trump merely precipitated a rupture that was already in the making. He is not responsible for Chinese President Xi Jinping’s authoritarian assertiveness, and he did not devise the Belt and Road Initiative, China’s massive transnational infrastructure and credit program. But it was Trump who ditched his predecessor Barack Obama’s carefully balanced China strategy in favor of a brutally adversarial stance that left no scope for events to take a different course. Whatever the cause of decoupling, there won’t be a return to the status quo.
A Biden administration would also not find it easy to achieve its goal of restoring ties with US allies, like-minded democracies, and partners around the world. Until Trump’s presidency, much of the world had become accustomed to regarding the US as the main architect of the international economic system. As Adam Posen, also of the Peterson Institute, has argued, the US was a sort of chair-for-life of a global club whose rules it had largely conceived, but still had to abide by. The US could collect dues, but was also bound by duties, and had to forge a consensus on amendments to the rules.
Trump’s trademark has been to reject this approach and treat all other countries as competitors, rivals, or enemies, his overriding objective being to maximize the rent that the US can extract from its still-dominant economic position. “America First” epitomizes his explicit promotion of a narrow definition of the national interest.
Even if the US under Biden were willing to make credible international commitments again, its outlook may change lastingly. The former Trump adviser Nadia Schadlow recently argued that Trump’s tenure will be remembered as the moment when the world pivoted away from a unipolar paradigm to one of great-power competition.
It is by no means obvious that if Biden wins, he will be able to restore the trust of America’s international partners. For all its aberrations, Trump’s presidency may indicate a deeper US reaction to the shift in global economic power, and reflect the American public’s rejection of the foreign responsibilities their country assumed for three-quarters of a century. The old belief among US allies and economic partners that Americans will “ultimately do the right thing,” as Winston Churchill reputedly said, may be gone.
In any event, Trump’s peculiar behavior has made it easy for America’s allies to postpone hard choices. That seems particularly true of Europe. A Biden-led US might seem like a familiar partner to most European leaders. But if it asked them to take sides in the confrontation with China, Europe would no longer be able to put off its own moment of decision.
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